Quand Tsipras accepte un demi-siècle d’austérité
par Laurent Herblay
samedi 30 juin 2018
La semaine dernière, la majorité des média évoquait tranquillement la sortie de la Grèce du plan dit d’aide de l’UE. Après huit longues années et demi d’austérité, on pourrait croire qu’Athènes allait enfin pouvoir respirer, reprendre son autonomie, et retrouver sa latitude financière. Que nenni, cette pseudo sortie n’est qu’un changement de cellule, qui durera jusqu’en 2059 !
De l’horreur UEuropéenne et des souverainistes progressistes en carton
Nul doute qu’un jour, dans quelques années j’espère, et pas quelques décennies, les historiens et les économistes prendront plus de recul sur les incroyables suites de décision prises en Grèce, au nom de l’UE, mais avec aussi le soutien de dirigeants grecs qui ont préféré une servitude très violente socialement plutôt que la rupture. C’est un sujet qui m’est cher depuis plus de 8 ans, et il y a quelque chose d’assez stupéfiant à voir ses prévisions vérifiées, et des dirigeants qui se disent de gauche mener une telle politique, aussi antisociale que peu démocratique. Depuis 2015, Tsipras est devenu l’exécuteur des désidératas de la troïka et a gagné l’estime du Point, à défaut d’avoir sauvé son peuple.
Pour qui suit d’un peu loin l’actualité, il pourrait être possible de croire à une fin heureuse du plan européen pour la Grèce. Déjà, il convient de remettre en perspective la qualification de ces plans, dits, indécemment, « d’aide », alors qu’ils ont présidé à une baisse du PIB de plus d’un quart, d’une baisse des retraites de plus d’un tiers. Ce n’est pas la Grèce ou les Grecs qui ont été aidés, ce sont les banques européens, qui ont évité des pertes par le mécanisme mis en place par l’UE, tout comme l’euro, dont le départ d’un membre en pleine crise aurait pu fragiliser définitivement son baroque édifice. Les élites européennes se sont sauvées en saignant depuis déjà huit longues années le peuple Grec.
Et là, stupéfaction : alors qu’il parade dans le Point, qui fait un mea-culpa inverse de celui de Mélenchon, le premier ministre grec vient d’accepter un plan encore plus effarant que les précédents. Car la Grèce n’est pas sortie des plans européens. Elle a d’accepté une forme de perpétuité antidémocratique et antisociale, tant Tsipras a accepté de lier les mains de son pays pour longtemps. Non seulement la Grèce devra dégager un excédent budgétaire primaire de 3,5% du PIB d’ici à 2022, mais Tsipras a pris l’engagement d’en maintenir un de 2,2% jusqu’en 2059 ! En clair il a accepté le rançonnage de l’économie grecque pour 41 années de plus ! La Gèce devient la colonie de ses créanciers.
Merci à Olivier Delorme de s’être indigné de cet accord, trop souvent mal présenté par les média. Ce faisant, en acceptant une effarante tutelle budgétaire pour 41 années supplémentaires, Alexis Tsipras montre bien qu’il faut se méfier des discours ambigus, qui peuvent ouvrir la porte à des compromissions extravagantes. Une campagne électorale doit permettre de gagner un mandat clair.