Quels risques à la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijia ?

par Molhem Assef
lundi 6 mars 2023

Une explosion dans les piscines de désactivation de l'un des réacteurs nucléaires de la centrale de Zaporijia, qu'elle soit due à l'inflammation de l'hydrogène accumulé ou à la réaction nucléaire en chaîne, peut entraîner la propagation de déchets radioctifs à une distance pouvant atteindre entre 100 à 1000 kilomètres, selon les circonstances météorologiques, et il sera difficile de contrôler et de surmonter ces effets sur des décennies.

Lors de la visite de la délégation de l'Agence internationale de l'énergie atomique à la centrale nucléaire de Zaporijia l'année dernière, l'accent a été mis sur les dommages externes causés par les bombardements, ce qui n'est en fait pas suffisant pour évaluer l'état de la sûreté et de la sécurité à la centrale, car de nombreux événements internes peuvent survenir et provoquer une catastrophe nucléaire de grande envergure.
L'une des conditions les plus importantes que la mission de l'AIEA a négligées est l'état des piscines de désactivation du combustible nucléaire dans le bâtiment du réacteur. Le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, mentionnait dans son rapport rendu en septembre dernier que les piscines de désactivation fonctionnent bien.


Le problème avec les piscines est que le combustible nucléaire y est conservé pendant une période allant jusqu'à 5 ans, et après que sa radioactivité s'affaiblit considérablement, il est transféré vers l'installation de stockage de combustible nucléaire sec, où il est placé dans de grands fûts de ciment, et cette installation est située dans le périmètre de la centrale, et elle est entourée d'un haut mur pour protéger contre les radiations.
Dans les piscines de désactivation, le combustible nucléaire génère beaucoup de chaleur en raison des processus de désintégration radioactive, de sorte que les systèmes de refroidissement doivent fonctionner en continu. Nous avons étudié les piscines de désactivation et calculé le temps nécessaire à l'ébullition de l'eau et de son évaporation totale dans une recherche détaillée publiée dans une revue scientifique.

Dans ce cas, plusieurs scénarios d’un accident nucléaire peuvent avoir lieu :
1- Défaillance des systèmes de refroidissement due à l'interruption de leur alimentation électrique, ce qui entraînera une élévation de la température de l'eau et du combustible nucléaire avec elle, pouvant entraîner le déclenchement d'une réaction nucléaire en chaîne.
2- En raison de la température élevée, l'eau entourant le combustible nucléaire va commencer à bouillir et à s'évaporer, ce qui peut entraîner la vulnérabilité du combustible nucléaire et donc une augmentation importante de sa temperature, ce qui peut conduire soit au déclenchement d'une réaction nucléaire en chaîne ou à la destruction des structures métalliques qui transportent le combustible nucléaire.
3- Du fait de la température élevée, l'hydrogène va commencer à être généré par deux méthodes : soit par analyse radioactive directe de l'eau, soit par oxydation du métal zirconium dans l'eau ou la vapeur d'eau. Le zirconium métallique se présente généralement sous la forme de tubes entourant des barres de combustible nucléaire. L'hydrogène est un gaz inflammable et, par conséquent, sa réaction avec l'oxygène atmosphérique peut entraîner une explosion majeure.
Ce type d'explosion a eu lieu à la centrale japonaise de Fukushima en 2011. Une fuite d'hydrogène s'est produite en 1979 à la centrale de Three Mile Island dans l'État américain de Pennsylvanie.
4- En plus de l'oxydation du zirconium dans l'eau, il est également oxydé dans l'air, et le zirconium peut entrer dans une réaction de nitruration avec l'azote atmosphérique. Aussi, les métaux entrant dans la composition des structures métalliques entourant le combustible nucléaire (à savoir : le fer, le nickel et le chrome) peuvent être également oxydés. Toutes ces réactions sont des réactions exothermiques, qui conduiront à un chauffage, une ébullition, une évaporation et une libération d'hydrogène plus rapides d'une part, et à une augmentation plus rapide de la température du combustible nucléaire d'autre part, et à la suite une réaction nucléaire en chaîne peut se produire.

Malheureusement, la mission de l'AIEA n'a étudié aucun de ces scénarios, sachant qu'il y a eu des accidents nucléaires similaires antérieurs que nous avons mentionnés ci-dessus, et je ne pense pas que les membres de la mission les ignorent.

En conclusion, il faut noter qu'une explosion dans les piscines de désactivation de l'un des réacteurs nucléaires de la centrale de Zaporijia, qu'elle soit due à l'inflammation de l'hydrogène accumulé ou à la réaction nucléaire en chaîne, peut entraîner la propagation de déchets radioctifs à une distance pouvant atteindre entre 100 à 1000 kilomètres, selon les circonstances météorologiques, et il sera difficile de contrôler et de surmonter ces effets sur des décennies.


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