Suspendre Schengen : il faut le faire au lieu d’en parler

par Catherine Segurane
lundi 25 avril 2011

Après l'octroi de visas Schengen pour leur permettre de séjourner partout en Europe, donc en particulier en France, un pas de plus vient d'être fait pour diriger vers la France les clandestins qui débarquent à l'île de Lampedusa. D'après une télé italienne, relayée par Fdesouche.com, les autorités italiennes offrent des billets de train gratuits Rome-Vintimille aux clandestins.

Comment en est-on arrivés là ?

A l'origine, le traité de Schengen ne devait pas supprimer la surveillance aux frontières, mais seulement la déplacer. Il y aurait une frontière unique européenne au lieu de frontières nationales, et elle n'en serait que mieux protégée. A plusieurs, on est plus forts, nous disait-on. Et d'ailleurs, nous serinait-on encore à l'époque où l'on cherchait à nous vendre le traité, Schengen peut être suspendu en cas de nécessité.

On a vu la suite ...

On rappellera que Rome offre déjà aux clandestins des visas de séjours de six mois dans l'espace Schengen, c'est à dire, concrètement, la possibilité de passer en France. Devant une attitude aussi égoïste, le bon sens voudrait que la France ferme sa frontière avec l'Italie et sorte du traité de Schengen, qui permet aux moins coopératifs d'être généreux avec le territoire des autres.

Des velléités paraissent vouloir aller dans ce sens, mais elles sont minimes, limitées dans le temps, et s'analysent davantage comme une opération de communication du gouvernement que comme la mise en place d'une vraie barrière. La circulation des trains avait été suspendue entre Vintimille et la France ... oh rassurez-vous ... juste une journée ! Maintenant, Sarko propose de revoir le traité de Schengen, ou plutôt quelques-uns de ses mécanismes. On va en discuter au rythme lent des instances européennes, et, pendant ce temps, les arrivées continuent.

Comment en est-on arrivé là ? Un article du Figaro montre comment une brêche suffit à rendre inutile un rempart. Il rappelle que :

"Lorsque la France, l'Allemagne et les trois pays du Benelux ont décidé de supprimer les contrôles pour ouvrir un espace européen sans passeport en 1985, tous avaient compris que le relâchement à l'intérieur aurait pour contrepartie le renforcement d'une frontière externe devenue « commune ». "

Quelle naïveté ! Depuis, le gouvernement des juges est passé par là :

"Depuis le 21 janvier, un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme interdit aux autres États de Schengen de renvoyer dans la péninsule les clandestins arrivés par la Turquie. La règle qui fait de tout pays placé en première ligne le gardien de sa part de frontière européenne se retrouve ainsi abolie, sur l'un des fronts les plus chauds de l'immigration."

Donc, pendant que les clandestins entrent comme ils veulent aux points les plus faibles du dispositif, et viennent ensuite comme ils veulent dans le pays le plus généreux, c'est à dire la France, notre président envisage de demander des discussions sur d'éventuels aménagements du traité.

Ces simples velléités suffisent à indigner les socialistes. Selon Sandrine Mazetier, secrétaire nationale à l'immigration, une révision du traité : "signifierait concrètement le rétablissement d'une frontière et la fin de la libre circulation des personnes, droit fondamental garanti aux citoyens de l'Union européenne depuis vingt ans".

Le Front national dénonce une supercherie, et Marine Le Pen estime que "la seule position raisonnable est de négocier la sortie de l'espace Schengen au plus vite".

Elle avait avant cela demandé que les débarquements soient empêchés physiquement par une action conjointe des marines française, italienne et espagnole.

Côté UMP, on essaya de tirer un profit médiatique d'une idée voisine, mais, comme toujours avec ce parti, sous une forme castrée. La députée Chantal Brunel, d'ailleurs isolée sur ce point, parla de remettre les clandestins dans des bateaux. La nuance est à souligner. Remettre dans des bateaux, ce n'est pas empêcher le débarquement. Pour pouvoir remettre dans un bateau un clandestin déjà installé en France, il faut une autorisation du juge et elles s'obtiennent au compte-goutte. Marine Le Pen souligna les différences. Par ailleurs, même vidée de toute puissance, la proposition suffit à déclencher, dans toute la bien-pensance, une "chasse à la Brunel".


Lire l'article complet, et les commentaires