Traité simplifié européen : entre prudence et déception

par Henry Moreigne
mercredi 27 juin 2007

L’accord trouvé lors du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement européens de Bruxelles le week-end dernier a permis de sauver, pour un temps, les meubles de la maison Europe. Certes, la chancelière allemande est parvenue à arracher in extremis un compromis sur le contenu du traité destiné à remplacer le traité constitutionnel européen (TCE), mort-né suite à son rejet voici deux ans par la France et les Pays-Bas. Il reste pourtant à faire l’autre moitié du chemin, toute aussi délicate : rédiger le texte.

Officiellement, on a évité la crise. “Nous avons pu nous extraire de la phase d’arrêt et de réflexion pour jeter les bases d’un nouveau traité”, a déclaré Angela Merkel après l’annonce d’un accord. La Chancelière souhaite l’organisation au plus vite, dès cet été, d’une conférence intergouvernementale en vue de la signature du “traité réformateur”. L’ouverture de cette conférence pourrait se faire même en l’absence de certains Etats, l’unanimité des Etats membres n’étant requise que pour l’adoption du traité.

En témoin extérieur avisé, Valéry Giscard d’Estaing a manifesté, sur les ondes de France Inter le 27 juin, sa prudence pour ne pas dire sa réserve sur le résultat obtenu. “On a évité la crise mais, sur le fond, il faut attendre la sortie du texte pour voir si le résultat correspond aux attentes”.

L’ancien président de la Convention à l’origine du TCE a rappelé que l’accord trouvé résulte d’un compromis entre trois positions. Les maximalistes, notamment les Allemands, qui voulaient achever le processus de ratification de la Constitution, déjà ratifiée par 18 pays. Les Français, emmenés par leur volontariste président, qui souhaitaient sortir de l’impasse à tout prix. Les Anglais dont l’unique souci était d’empêcher toute avancée dans l’intégration européenne.

Au final, il semblerait que ce soit bien ces derniers qui soient les plus gagnants dans l’accord trouvé. Telle une bouteille à moitié pleine ou à moitié vide, c’est selon, l’accord trouvé repose tout à la fois sur une avancée et un recul. L’avancée, c’est le fait que le futur traité devrait reprendre pratiquement les neufs aménagements institutionnels proposés par le TCE mais seulement ceux-ci. La marche arrière est incarnée par le recul de l’esprit européen, l’abandon des symboles de l’Union et l’isolement de la Grande-Bretagne.

Selon VGE, l’Union européenne se trouve à un tournant de son histoire, tiraillée entre une inexorable marche en avant et un repli sur des simples fonctions de marché intérieur, la vision britannique. Le rejet de l’idée d’une représentation diplomatique de l’Union est à ce titre symbolique du refus de faire de l’Europe un acteur international. L’ancien président français souhaite un éclaircissement de la situation : ” Il va falloir tirer les conséquences de la position anglaise. Il faut donc lui trouver un statut particulier avec une position d’exception pour ne pas décourager la volonté d’intégration des autres pays.”

Encore et toujours la perfide albion. Celle que le général de Gaulle considérait déjà comme le cheval de Troie des Américains dans la construction européenne. Déjà intégrée militairement dans le dispositif de défense des Etats-Unis, la Grande-Bretagne, qui a refusé l’euro tout en exigeant depuis le début de l’aventure européenne un traitement particulier, apparaît de plus en plus et irrésistiblement tournée vers le grand-frère anglo-saxon.


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