Une nouvelle étude sur les méfaits de l’euro pour la France

par Laurent Herblay
samedi 16 mars 2019

Décidément, l’union monétaire européenne est fâchée avec les économistes, dont presque toutes les études sérieuses concluent à des vices profonds de forme, aux conséquences calamiteuses. Nouvel exemple avec celle du Centre pour l’Intégration Européenne, peu suspect d’euroscepticisme, qui vient de confirmer que si l’euro avait profité à l’Allemagne, il a coûté cher à la France, entre autres.

 

Une construction profondément déraisonnable
 
Le Zentrum für Europaische Integrazion avait déjà publié une étude passionnante sur la Tchécoslovaquie, qui, quelques semaines après sa scission politique, avait choisi une scission monétaire instructive pour la zone euro. En effet, après sept décennies de vie commune dans un même pays et un budget unique, ce petit Etat n’avait pas réussi à devenir ce que l’on appele une Zone Monétaire Optimale. Autant dire qu’à l’échelle incomparablement plus grande, plus diverse et moins intégrée de l’euro, l’unification monétaire est purement et simplement une absurdité qui ne fonctionnera jamais. Mieux, il concluait que le démontage de l’union monétaire européenne ne serait ni compliquée ni coûteuse.
 
Cette nouvelle étude approfondit et chiffre les conséquences de l’euro pour les différents pays européens. Ce faisant, elle confirme ce que j’avais écrit il y a six mois en disant que l’Allemagne est le grand bénéficiaire de la monnaie unique. Les chiffres évoqués dans les média, 1893 milliards d’euros gagnés par l’Allemagne, 3591 milliards d’euros perdus par la France, sont extrêmement élevés car ils portent sur 19 années, de 1999 à 2017. Mais la lecture du papier de l’étude permet de lire l’impact à l’échelle de la seule année 2017. Pour le CEP, le PIB de l’Allemagne est 280 milliards d’euros plus haut qu’il ne l’aurait été sans l’euro, pour la France, il est 374 milliards d’euros plus bas (530 en Italie).
 
En clair, notre PIB aurait été 16% plus haut sans l’euro, quand celui de l’Allemagne aurait été plus bas de 8,5%. En pleine crise des Gilets Jaunes, il n’est pas inutile de rappeler que le PIB par habitant de la France aurait été 5 570 euros plus élevé sans l’euro. De manière très intéressante, on retrouve sans cette étude le même écart qu’il y a dans la valorisation du FMI de l’euro par rapport à nos deux pays. En effet, l’institut de Washington soutient que l’euro est sous-évalué de 18% pour l’Allemagne quand il est surévalué de 6,8% pour la France. D’ailleurs, le CEP pointe l’impossibilité de dévaluer comme la raison du décrochage de la France et de l’Italie, privées de cette soupape monétaire.
 
Mais ce qui est intéressant ici, c’est que le CEP n’est en aucun cas un institut eurosceptique, comme son nom l’indique. D’ailleurs, il conclut son étude en appuyant les réformes portées par Emmanuel Macron, qui devraient permettre à notre pays de regagner en compétitivité, sans se rendre compte que cette recherche de compétitivité risque d’être sans fin, et que sans monnaie nationale, tout le poids de l’ajustement se fait sur les classes populaires et moyennes alors que les dévaluations sont finalement un moyen bien plus sain et beaucoup moins douloureux d’ajuster son économie. Intéressant de trouver à nouveau des arguments contre l’euro au sein des cénacles qui sont pourtant ses soutiens.
 
Bien sûr, des esprits tordus pourraient soutenir que le FMI et Berlin veulent en réalité sa fin pour détourner le débat. Plus fondamentalement, ce qui est impressionnant depuis près de dix ans, c’est de constater la relative unanimité des économistes sur l’euro, à savoir que c’est une construction qui n’aurait pas du voir le jour, qui fonctionne mal, et dont les déséquilibres grandissent au lieu de se corriger. Le plus fort est que cette analyse rassemble l’ensemble du spectre politique, de libéraux défenseurs du système actuel (comme le FMI ou le CEP) ou d’alternatifs plus étatistes, comme Stiglitz, qui y a consacré un livre, ou Krugman, parmi la dizaine de « Prix Nobel d’économie » euro-critiques.
 
 
Il faut donc le répéter, la construction de la monnaie unique européenne a bien été une calamité pour notre pays, qui n’a profité qu’à la zone mark, comme le démontre l’étude du Centre pour l’Intégration Européenne. On cherche toujours la moindre étude un peu sérieuse qui montrerait son intérêt. Mieux, beaucoup d’études affirment que son démontage ne serait pas si compliqué

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