Union bancaire, austérité : l’Europe va dans le mur et accélère !

par Laurent Herblay
samedi 21 décembre 2013

Comme à chaque sommet, nous avons droit aux déclarations enthousiastes de Pierre Moscovici qui annonce dans le Monde que les décisions prises sont historiques. Par-delà le ridicule qu’il y a à dire cela à chaque sommet, l’analyse détaillée des détails de l’accord démystifie ses déclarations.

La grande illusion de l’union bancaire
 
Pour être honnête, tout n’est pas à jeter dans l’accord sur l’union bancaire. Il est sain, par exemple, de partir du principe que les actionnaires et les créanciers doivent être les premiers contributeurs. C’est un principe beaucoup plus sain que les 1000 milliards d’euros prêtés à 1% par la BCE aux banques de la zone sans la moindre contre-partie. Il n’est pas normal que le secteur bancaire ait droit à une ligne de crédit bon marché pour la protéger de ses erreurs. Mais de cela, l’accord sur l’union bancaire ne dit rien et cela est dommage car du coup, il laisse à la BCE toute lattitude pour aider les banques.
 
Et par delà le fait que l’Allemagne ait obenu tout ce qu’elle voulait, cet accord pose trois problèmes qui ont été assez peu identifiés. Le premier, c’est que l’UE met en place un mécanisme de résolution d’une crise bancaire sans traiter les causes de ces crises. En clair, elle traite les conséquences et non les causes. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir eu du temps – cela fait plus de cinq ans que la crise financière s’est déclenchée – ni même d’exemples – les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ou la Suisse ayant produit des réglementations spécifiques additionnelles aux normes Bâle 3.
 
Mais le point le plus incroyable qui n’a pas été identifié, c’est que le mécanisme mis en place serait inutile en cas de crise systémique comparable à celle de 2008. En effet, rien n’empêche le jeu de dominos des faillites car les banques sont créancières les unes des autres et la faillite d’une d’entre elle aurait des conséquences pour toutes les autres. En outre, la mise en place d’un fonds de 55 milliards (sur 10 ans) est le summum du ridicule quand on sait que cela ne couvre même pas la facture de la crise bancaire espagnole. Enfin, l’institutionalisation de la saisie d’une partie de l’épargne est choquante.
 
« L’austérité acte III »

L’autre point du sommet européen, c’est qu’absolument rien n’est fait pour remettre en cause les politiques d’austérité. Certes, beaucoup d’objectifs ont été repoussés, mais c’est parce que ces politiques sont contre-productives, l’austérité générant une baisse des recettes et qu’il y a quand même des limites aux mesures qui peuvent être prises, même si cela n’arrête pas la troïka dans la mise en place de politiques inhumaines. Cela fait plus d’un an et demi que François Hollande et son gouvernement nous bassine avec une politique de croissance européenne. On a bien vu en 2013 son résultat.

Romaric Godin, journaliste à la Tribune, qui rend compte de manière pédagogique et vivante des sommets européens a bien raison de parler d’une « austérité acte III ». En effet, ce ne sont pas les quelques milliards d’investissement, dérisoire à l’échelle de nos économies, Krugman ayant parlé, avec justesse, de « pistolet à eau contre un rhinocéros qui charge  », qui vont changer quoique ce soit. Et il est effarant que l’on parle encore d’ajouter de nouveaux mécanismes austéritaires, sachant qu’il en existe déjà le six pack, le two pack, et le TSCG, pas moins de trois camisoles budgétaires pour les Etats.
 
Mais ce que l’Allemagne veut… A mille lieues des espoirs délirants du PS, le SPD s’est aligné sur la position très dure d’Angela Merkel dans leur contrat de gouvernement. Cela veut dire que jusqu’en 2017, le seul et unique souci de Berlin sera de récupérer l’argent avancé par les fonds européens pour éviter de déclencher les garanties auxquelles elle s’est engagée. Ce n’est pas incompréhensible, mais cela montre aussi que l’euro pousse à des politiques délirantes, l’Allemagne demandant aux pays « aidés » de baisser leurs salaires et leurs dépenses alors qu’elle fait exactement l’inverse à domicile !

En fait, ce sommet, loin d’être une réussite, montre que l’UE est dans une impasse totale. Alors que nous ne parvenons pas à vraiment sortir de la crise depuis 5 ans, nous persistons dans les mêmes politiques qui ont échoué dans le passé. Signe que ce système ne fonctionne pas et qu’il faut l’abattre.


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