Une mantille noire était jetée sur sa tête...
par rosemar
mardi 20 août 2019
C'est ainsi que Chateaubriand décrit une de ses héroïnes, Blanca, à travers le regard d'Aben-Hamet, dans la nouvelle intitulée Le dernier Abencerage.
Le récit se déroule à Grenade, au 16 ème siècle, il relate les aventures d'un survivant de la famille Abencerage, une tribu maure...
Ce personnage s'appelle Aben-Hamet : il revient sur la terre de ses ancêtres et s'éprend de Blanca, une chrétienne descendante de Rodrigue et Chimène.
Dans cette scène de rencontre amoureuse, le héros est sensible à la beauté de la jeune femme, mise en valeur par une mantille...
Une mantille ! Le mot, en lui-même, résonne d'éclats : il évoque l'Espagne, Grenade, l'Andalousie, la Castille, l'Estramadure, des noms aux sonorités mystérieuses, exotiques et lointaines.
On entend, aussi, des airs de fandangos et séguédilles, des cliquetis de castagnettes, des guitares, des musiques entraînantes.
La mantille déroule ses dentelles sombres, elle nous fait découvrir des douceurs de tissus soyeux, des entrelacs pleins de finesse...
La mantille qui sert à voiler la tête, les épaules des espagnoles crée un mystère, elle cache, elle dissimule, tout en révélant la beauté.
Le mot "mantille" nous émeut, par ses échos de labiale, dentale et palatale finale, des consonnes emplies de douceur et d'éclats.
La voyelle nasalisée "an" suggère la légèreté, la souplesse du tissu, des évanescences de dentelles. Elle semble mimer l'élégance de ce foulard qui sert à envelopper le haut du corps.
La mantille forme des résilles, sur les longs cheveux bruns des espagnoles, parure subtile et pleine d'attraits.
Le mot semble avoir des origines lointaines, et doit être rattaché au nom "manteau", en latin "mantellus", avec un suffixe à valeur de diminutif.
"Petite couverture", la mantille cache, à peine, les cheveux qu'elle laisse entrevoir.
Parfois vaporeuse, elle s'épanouit dans des envolées de tulles, de mousselines et de dentelles.
On entrevoit des motifs légers, aériens, des transparences : la mantille sublime la beauté des espagnoles.
Un mot plein de charmes, d'élégance,de poésie, un mot qui fait rêver à des danses virevoltantes, à des parures légères et somptueuses !
Dans l'extrait de l'oeuvre de Chateaubriand, on perçoit toute la séduction de cette parure, associée à un geste de la jeune femme.
Comparée à une "guimpe", mot plein d'étrangeté, la mantille devient un véritable objet de séduction.
Le blog :
http://rosemar.over-blog.com/2015/10/une-mantille-noire-etait-jetee-sur-sa-tete.html
Le dernier Abencerage, le texte de Chateaubriand :
https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Dernier_Abencerage
Vidéo :
Illustration : un tableau de Goya