Municipales : à Villejuif, la machine à perdre du PS est en route

par Bernard Campa
jeudi 18 octobre 2007

Alors que tous les indicateurs sembleraient donner une liste menée par le PS comme gagnante au premier tour des municipales, il semblerait que les rivalités internes de la section de Villejuif soient exploitées par les éléphants du département pour éviter de perdre leur prédominance locale. Il faut dire que l’enjeu est de taille, car Villejuif est la plus grosse commune de la communauté d’Agglomération du Val-de-Bièvre, mais aussi une commune conséquente du département comptant plus de 50 000 habitants. C’est aussi l’une des 36 villes française de plus de 20 000 habitants ayant (encore ?) un maire communiste, la ville symbole de l’ancienne circonscription de Georges Marchais et aussi la seule femme maire du département. Récit de deux mois de campagne interne.

Depuis 2001, presque toutes les élections locales ont vu le PS devancer le PC, Villejuif est d’ailleurs l’une de ces villes ou Ségolène Royal a fait un score de plus de 30 % au premier tour et de 65 % au second. D’après le blog d’Alain Lipietz, les Verts seraient prêts à rallier une liste PS dès le premier tour, tout comme vraisemblablement le PRG et le MRC. Dans une telle configuration, testée pour les régionales de 2004, une telle liste aurait a priori toutes les chances d’arriver largement en tête au premier tour, profitant d’un ral-le-bol tel que même la droite modérée locale se dise prête à voter socialiste pour qu’enfin une alternance ait lieu à Villejuif.

Courant août, Christine Revault D’Allonne, tête de liste de 2001 du PS, contrainte alors de faire liste commune avec PC, négocie avec Gérard Teriltzian, l’un des actuels adjoints au maire, pour essayer de présenter une candidature interne commune. Le couple est intéressant, car il permettrait d’associer l’expérience de ces deux militant tout en présentant une femme contre Claudine Cordillot (PC), actuelle maire de Villejuif. Présenter une image d’unité de la section est vraisemblablement le meilleur moyen d’obtenir l’aval du parti pour faire une liste séparée de celle des communistes au premier tour, mais se réunifiant au second pour battre le candidat de droite.

Début septembre, premier coup de théâtre : les rumeurs enflent au sein de la section sur le fait que Dominique Girard, le secrétaire de la section, soit vivement encouragé par d’autres personnalités de la région de présenter lui aussi sa candidature. L’effet de la rumeur est immédiat : rupture des négociations entre nos deux premiers protagonistes, il y aura donc 3 candidats, adieu l’unité.

Courant octobre, nouveau coup de théâtre, le bureau fédéral du PS vote une motion attribuant de fait la représentation à une femme, dans le cadre des accords de parité interne au PS. Etonnamment, un courrier électronique aurait circulé au sein de la section, quelques heures avant la réunion du bureau fédéral, indiquant que le NPS allait présenter cette motion sous l’impulsion de la candidate qui fait partie de ce courant. Indignation au sein du bureau de la section qui ne s’interroge pas une seconde sur le fait qu’une telle action de la part de la candidate soit logique ou non. C’est alors l’occasion rêvée pour ressortir toutes les rancoeurs qu’ont laissé la candidature de cette femme aux élections précédentes : il est évident qu’elle a essayé de court-circuiter le vote des adhérents. La bureau local vote alors une motion dénonçant la décision fédérale à l’unanimité et décident donc de continuer une campagne mixte.

Dans la foulée, les choses s’embrouillent de plus en plus, une quatrième candidature arrive de la part d’un proche de la candidate, sous la forme d’un mail incendiaire, condamnant la position de la section, qui se met à circuler lui aussi sous le manteau. Ce proche n’est d’ailleurs pas n’importe qui puisqu’il s’agit de Philippe Xavier Bonnefoy, membre des instances nationales du PS, souvent utilisé par le parti pour faire des candidatures de « barrage », comme ce fut le cas récemment au Kremlin-Bicêtre. Est-il là aussi en opération commandée ou défend-il ainsi les chances de son amie ?

Devant un tel imbroglio, les militants du Parti socialiste de Villejuif vont devoir élire parmi ces quatre prétendants le premier d’entre eux. Malheureusement, devant le spectacle affligeant que la section affiche suite à ces multiples rebondissements, ils se doutent qu’ils n’auront que peu de chance de pouvoir présenter une liste dont ils auront la tête au premier tour des municipales. Il y a également fort à parier que si les Verts et autres partis de gauche modérée s’associent au Modem pour le premier tour, la commune soit alors perdue pour le PC comme pour le PS. Il est enfin probable que la plupart de ces coups de théâtre aient étés orchestrés par les poids lourds de la fédération duVal-de-Marne qui auraient pu voir d’un mauvais oeil l’arrivée d’une nouvelle ville de poids dans leurs instances. Le fonctionnement du Parti socialiste dans le Val-de-Marne n’a pas changé depuis 1977 : ce sont les maires socialistes qui décident, les instances politiques officielles du parti étant là uniquement pour décorer.

Le PS paiera donc encore longtemps le prix d’une organisation fédéraliste archaïque qui a du mal à se justifier à l’ère d’internet, mais à laquelle les rouages qui la composent s’accrochent désespérément. Il est affligeant de voir comment de telles logiques peuvent amener si souvent ce parti à faire campagne contre lui-même.


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