Que se passe-t-il au péage autoroutier (ATMB) de Nangy (Haute-Savoie) ?

par Alain Michel Robert
vendredi 9 décembre 2005

Tous les mardis matin, depuis un mois, de 6 h à 8 h 30, des usagers de l’autoroute A40 en colère manifestent sur le parking juste après le péage de Nangy en allant vers Genève. Malgré la pluie, la neige et le froid, ils déploient leurs banderoles : « A40 Halte au racket », ou « Télépéage trop cher », « Manifestez www.frontalier.com » Depuis le début de l’opération, plus de 2000 pétitions ont été signées pour alerter les autorités et les politiques sur la décision de l’ATMB d’augmenter de manière scandaleuse le coût de l’autoroute pour les 12 000 personnes qui vont à leur travail tous les jours dans le bassin d’Annemasse/Genève.

Les plus motivés, ceux qui ne sont pas frontaliers, et qui n’ont pour vivre qu’un salaire français, se retrouvent dans des situations dramatiques. En effet, l’ATMB a décidé de supprimer les abonnements qui existaient depuis 30 ans pour les remplacer par un système de télépéage qui va, au minimum, doubler le prix des abonnements lesquels abonnements ont déjà déjà augmenté de 50 % en cinq ans !

À titre d’exemple : une personne habitant la Vallée Verte, et qui se rend à son travail tous les jours à Annemasse (8 km d’autoroute), payait jusqu’à présent 320 € d’abonnement par an pour un nombre illimité de passages, ce qui lui permettait de rentrer chez elle à midi si elle avait des horaires coupés. Avec le nouveau système de télépéage, le prix de l’autoroute, pour se rendre à son travail, va doubler, et même quadrupler si la personne continue de rentrer chez elle à midi. Pour une personne habitant Sallanches, un aller-retour par jour pendant un an (hors vacances) lui coûtera 1900 €, soit un mois et demi de salaire, rien que pour se rendre à son travail !

Le Groupement transfrontalier européen (GTE), dont les membres sont eux-mêmes concernés par ce problème, a décidé d’aider tous les usagers (frontaliers ou non) à se faire entendre. Pour ce faire, ils ont ouvert des pages sur leur site Internet. (www.frontalier.com)

Or, l’ATMB, refuse de voir l’évidence, et conteste l’évolution des tarifs en affirmant que ceux-ci augmenteront, certes, mais dans une proportion très inférieure. Si tel est le cas, comment ses dirigeants expliquent-t-ils qu’en trois semaines plus de 2000 pétitions aient été signées spontanément pour dénoncer ces augmentations !? Les usagers de cette portion d’autoroute ne sont pas en colère pour rien, ils ont simplement pris leur calculette (calculette qui semble faire défaut aux gestionnaires de l’ATMB) et se sont rendu compte qu’effectivement, le prix de leur abonnement allait au minimum doubler.

Soyons clairs, le produit télépéage voulu par l’ATMB propose une réduction de 45 % sur le prix du passage (30 % de réduction ATMB et 15 % subventionnés par le conseil général), or, les usagers et le GTE refusent que cette subvention soit inscrite au prochain budget du Conseil général si elle n’est pas conditionnée à un effort commercial de l’ATMB beaucoup plus important que celui des 30 % de réduction actuelle. Le message que les usagers adressent aux politiques est simple : « Nous vous avons toujours demandé votre soutien pour faire pression sur l’ATMB, nous n’avons jamais demandé d’argent sous forme de subvention, c’est l’ATMB qui est venu avec un projet de participation du CG. Nous ne sommes pas contre cette aide (bien qu’elle soit discutable et à discuter), mais elle doit être validée SEULEMENT ET SEULEMENT SI l’ATMB fait un effort, sinon le CG ne DOIT PAS verser un sou ! » Or, cet effort est possible. Dans des conditions similaires en France, les réductions s’échelonnent de 10 % à la gratuité complète, selon les villes et les sociétés d’autoroute gestionnaires. Rien que pour le tunnel du Mont-Blanc les réductions vont jusqu’à 65 %.

Il y a toujours la solution de prendre la route, mais non seulement tout est saturé maintenant partout (des essais comparatifs ont été réalisés entre la route et l’autoroute : à cause des embouteillages dans l’agglomération d’Annemasse et des bouchons sur les routes nationales, le temps de transport est à peu près doublé), mais en plus il est de notoriété publique que le tronçon Cluses/Bonneville est le plus « accidentogène » du département. Le drame du tunnel a fait 30 morts, combien de morts fera la suppression des abonnements pour les personnes qui ne sont plus assez riches pour pouvoir prendre l’autoroute !? Trois, trente, cinquante par an ? Personne ne peut le dire. Mais cette décision de supprimer les abonnements fera de toutes façons des morts. Y aura-t-il un procès pour ces morts-là !?

L’ATMB est une société privée qui a mission de service public. Les usagers demandent simplement qu’elle remplisse cette mission en octroyant aux personnes qui se rendent à leur travail tous les jours des réductions qui soient en adéquation avec la réalité du coût de la vie et l’évolution des salaires.

Il y a de cela dix ans, l’INSEE prévoyait une augmentation de 54 % de la population dans le bassin d’Annemasse. Or, aucune politique n’a été mise en place pour développer les transports en commun, les parkings péri-urbain, et les axes routiers. Aujourd’hui, l’agglomération Annemasse/Genève est entrée dans un entonnoir infernal que plus personne ne maîtrise. Pour donner une bouffée d’air provisoire à cet imbroglio (ce qui laisserait le temps à tout le monde de réfléchir), le déblocage du péage de Nangy, grâce à des tarifs décents (actuellement c’est 1.60 € en tarif plein pour faire les 8 km d’autoroute pour se rendre à Annemasse), serait le bienvenu.

ADU Coordination

Association de défense des usagers de l’ATMB


Lire l'article complet, et les commentaires