Sur-rémunération : toute la Réunion est concernée

par Fabrice PAYET
mercredi 2 janvier 2008

Les actuels remous autour des régimes spéciaux de retraite amènent certains politiques à s’interroger sur la question de la sur-rémunération des fonctionnaires à la Réunion et dans les Territoires d’outre-mer en général. Interrogations fondées ou simple hypocrisie ?

La question de la sur-rémunération à la Réunion a toujours été inévitable et bien qu’étant un thème sensible, cette spécificité réunionnaise aurait dû faire l’objet de réforme depuis une bonne dizaine d’année.

La sur-rémunération qui est un coefficient multiplicateur du salaire de base des fonctionnaires est fixée à 40 % en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane et atteint 53 %, chez nous, à la Réunion. Ce coefficient est servi sans limitation de durée et s’applique également aux agents titulaires des fonctions publiques locales.

Depuis 1950, les agents de la fonction publique bénéficient de cette majoration salariale.

Si aujourd’hui ce privilège est clairement remis en cause par une partie de la population réunionnaise ; on peut se demander si, nous, Réunionnais avons un intérêt à ce qu’une partie de la population active locale perde une partie de son pouvoir d’achat ?

Les analyses nous montrent que la sur-rémunération joue un effet distordant sur la formation des prix et sur le système de production locale.

En simplifiant, nous pourrions dire que c’est le salaire qui va conditionner les prix des marchandises, et donc que la sur-rémunération entretient la politique des prix chers, et dans un deuxième temps la sur-rémunération crée l’engouement des jeunes demandeurs d’emploi, et pas seulement, pour la fonction publique au détriment du secteur privé (presque 90 % des jeunes étudiants réunionnais voudraient être fonctionnaires).

Pour autant, faut-il supprimer la sur-rémunération et avec elle tous les bénéfices qu’en tire la société et l’économie réunionnaise ?

La sur-rémunération des fonctionnaires de la Réunion a trois effets principaux ; et non les moindres puisqu’en fait ce sont tous les fonctionnaires et non-fonctionnaires qui profitent de la sur-rémunération directement ou indirectement.

Le premier effet est un effet de revenu global : il soutient la demande et l’emploi.

Le second effet est un effet de distorsion : la sur-rémunération augmente le niveau des prix locaux et favorise ainsi les secteurs de consommation non-exposés à la concurrence, et les importations, au détriment de l’investissement et des exportations.

Le troisième effet est un effet de distribution - la sur-rémunération bénéficie directement aux ménages dont le revenu de base est le plus élevé (ménages expatriés et qualifiés locaux).

La sur-rémunération se retrouve à tous les niveaux de l’économie de la Réunion, et notamment dans la grande distribution, milieu qui se fonde sur la sur-rémunération des fonctionnaires afin de fixer certains prix.

Ainsi certains entrepreneurs de la grande distribution laissaient entendre que si la sur-rémunération des salaires des fonctionnaires venait à être « revue » ou « supprimée », de nombreuses grandes surfaces seraient amenées à fermer leurs portes et avec elles de nombreuses personnes mises au chômage.

L’exemple de la grande distribution n’est qu’un exemple, mais beaucoup de pans de l’économie réunionnaise s’appuient sur la sur-rémunération afin de vivre.

Aujourd’hui la question n’est pas à se demander si les fonctionnaires sont dans le collimateur, mais surtout savoir comment redistribuer cette manne à l’ensemble de l’économie réunionnaise et non plus à une minorité de la population active ?


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