Des trains pas comme les autres

par olivier cabanel
mercredi 17 novembre 2010

Notre « gloire » nationale, le TGV, bat des records, mais pas ceux dont on a envie de se vanter.

Un TGV se prépare à battre le prix du kilomètre le plus cher.

Et un convoi de déchets nucléaire a battu le record de lenteur.

Les projets de lignes LGV fleurissent dans tout le pays : de Lyon à Turin, ou de Bordeaux à Paris, la Bretagne n’est pas épargnée puisqu’un projet devrait la relier à Paris.

Une coordination internationale (Italie, Espagne, Allemagne, France,) s’est d’ailleurs mise en place le 23 janvier 2010 à Hendaye pour demander que la priorité soit donnée au TER, et que les projets économiquement non rentables soient annulés.

Des actions de toutes les associations se manifesteront le 11 décembre prochain contre les mauvais projets.

Le projet Paris Rennes est estimé à 3,4 milliards d’euros et permettrait de mettre Rennes à 1h 26 de Paris. C’est tout de même 37 minutes de gagnées par rapport à la desserte actuelle.

Sauf que de citoyens responsables trouvent que la minute gagnée revient un peu cher : 91 891 891 euros, soit 1,5 million d’euros la seconde. lien

Le chiffre n’est pas définitif si l’on se souvient qu’invariablement le projet une fois terminé coute au moins 2 fois plus cher.

Le tunnel sous la manche, par exemple, a finalement couté plus de 15 milliards d’euros.

Le prix initial était estimé à 7 milliards d’euros.

Ce n’est pas un cas isolé : il y a mieux, certains projets ont vu leur prix grimper au cours des années, avant même d’avoir été réalisés.

Le projet Lyon Turin, par exemple, estimé au départ à 7 milliards d’euros, est passé à 20,8 milliards, mais les associations qui le contestent évoquent le chiffre de 25 milliards définitif, ce qui pourrait lui permettre de battre le record du Paris Rennes s’il était tout de même réalisé. lien

Le chiffres estimé au départ (7 milliards d’€) peut faire sourire si on le met en parallèle avec le prix du tunnel ferroviaire du st Gothard, lequel a quasi la même longueur que le tunnel de base du Lyon Turin, et qui au final a couté 7,5 milliards d’euros.

Or dans le projet Lyon Turin, il y a outre le tunnel de base plus de 100 km de tunnels, ou tranchées couvertes.

Mais d’autres trains battent des records, comme par exemple ce train de déchets nucléaires, qui vient de battre des records de lenteur.

Parti de la Hague le 5 novembre, à 17h45, le convoi composé de 11 conteneurs « Castor  » va se trouver freiné tout au long du parcours par des milliers de manifestants.

Sur les voies, sur les routes, dans les arbres, enchainés aux voies, avec des tracteurs, des barrages de camions, etc.

il passe à Sotteville-lès-Rouen à 22h, puis à Amiens à 00h47, à 2h44 à Arras, à 5h47 à Charleville Mézières, à 8h00 à Morhange, à 12h19 à Bischheim, à 13h17 à Lauterbourg ou d’importantes forces de police sont mobilisées pour le passage du train à un passage à niveau, face à quelques militants venus informer la population.

A 12h45 un homme et trois femmes se sont enchainé à un bloc de béton sous la voie ferrée à 500 mètres de la gare de Berg.

Il faudra plusieurs heures pour découper le bloc de béton afin de libérer la voie. lien

Résultat, le tracé initial que devait employer le convoi de 123 tonnes de déchets nucléaires a du être modifié. lien

En effet, devant l’impossibilité de continuer sur le rail, le transport des matériaux nucléaires a du se terminer sur la route pour franchir enfin les 20 derniers kilomètres. lien

Là, nouvelle difficulté, des militants de Greenpeace se sont enchainé à un camion de transport.

Les paysans allemands entrent dans la course :

Sur la route les responsables du convoi nucléaire  ont du affronter un blocage réalisé avec 42 tracteurs. vidéo

Ils rencontrent plus tard deux pyramides de béton d’un mètre de haut, avec 4 agriculteurs enchainés à chaque fois.

Il est impossible de soulever les pyramides sans casser les bras des agriculteurs. lien

Il faut ajouter que les containers vitrifiés dégageaient, malgré tout, une radioactivité deux fois plus importante que celle dégagée par la catastrophe de Tchernobyl, et 20 fois supérieure au taux de radioactivité naturel. lien

Les tenants jusqu’au boutiste nucléaires se souviendront longtemps de ce voyage de l’enfer.

Le mardi 9 novembre à 00h25, le premier des 11 castors (containers vitrifiés) arrivera enfin sur le site d’entreposage de Gorleben.

Il faut dire que les 50 000 militants écologistes français et allemands mobilisés ne lui avait pas facilité la tache. lien

Ils ont provoqué la mobilisation de 17 000 policiers français et allemands, de gendarmes à cheval, d’hélicos, de gendarmes avec chiens,  tout au long du trajet. lien

Il aura fallu 5 jours, 90 heures de voyage, pour parcourir 1170 km soit une moyenne de 13 km à l’heure.

Il faudra attendre plusieurs centaines de milliers d’années pour que les actinides mineurs ne soient plus dangereux, et la durée de vie d’un "castor" est de 40 ans.

Que se passera-t-il dans 40 ans ?

Moins préoccupant, et heureusement plus ludique, c’est le travail réalisé par deux frères allemands : Frédérick et Gerrit Braun.

Ils ont réalisé le plus grand circuit de trains miniatures du monde.

Le travail, commencé en 2000 s’achèvera en 2014.

Le circuit qui fait déjà 1150 mètres carrés couvrira en fin de compte 1800 mètres carrés.

Pas moins de 700 trains y circulent, trainant 10 000 wagons.

La maquette représentera finalement 8 pays : l’Allemagne, la Suisse, la Scandinavie, l’Autriche, la France, l’Italie, la grande Bretagne et les Etats Unis.

On peut y apercevoir un fjord avec un bateau de 1 mètre de long, flottant réellement, le mont Rushmore, le grand canyon, les Everglades, les montagnes rocheuses…

Le tout est contrôlé par un centre informatique hight Tech..

160 000 personnages miniatures ont été réalisés individuellement, ainsi que 4000 véhicules dont les phares s’allument ou s’éteignent dans un décor somptueux ou le jour ou la nuit sont créés artificiellement, au choix des concepteurs.

Le train le plus long fait 14 mètres.

La maquette comporte 2800 édifices, éclairés par 250 000 ampoules contrôlées par informatique.

Il y a un stade, avec un match en cours, et on voit crépiter les flashes des spectateurs.

Ils ont déjà travaillé 500 000 heures et dépensé 8 millions d’euros, et la construction du décor à nécessité plusieurs tonnes d’acier.

Çà s’appelle Wunderland et on peut admirer une vidéo de 4 minutes sur ce lien.

Pour aller découvrir ce monde en miniature, il faut aller à Hambourg.

On peut aussi s’arrêter à Mulhouse afin de visiter le musée du train ou se trouvent aussi des maquettes, à coté de trains grandeur nature, et on peut même monter à califourchon sur un train miniature à vapeur pour faire le tour du musée. lien

Ce Musée, qui vient d’être rénové, propose au spectateur un plateau de cinéma de 6000 m2 racontant l’aventure du train.

On peut y découvrir les locomotives des pionniers dont la célèbre « St Pierre  » copie de la non moins célèbre loco construite par Robert Stephenson. lien

On y découvre aussi les plus grosses machines, comme la Pacific Chapelon, mais aussi les autorails à essence, les automotrices électriques, et le fameux autorail Bugatti, qui préfigurait les TGV actuels.

On y apprend que la  « Micheline »  avait été appelée ainsi parce que  l’ingénieur Michelin avait doté le fameux autorail jaune et rouge de pneus michelin.

Tout cela nous ramène à l’histoire de ce voyageur qui s’inquiétait de la vitesse d’un train sans cesse de plus en plus rapide, et à qui il était répondu juste avant le déraillement :

«  vous n’avez donc pas remarqué le nom du train ? …il s’appelle « Le Progrès », et comme vous le savez, on n’arrête pas le progrès !  »

On le voit, les trains se suivent et ne se ressemblent pas, car comme dit mon vieil ami africain :

« On ne peut pas traverser la jungle avec un ticket de zoo ».

L’image illustrant l’article est de l’auteur.


Lire l'article complet, et les commentaires