Gaza : quel est l’accord entre Israël et le Hamas ?

par Sylvain Rakotoarison
vendredi 24 novembre 2023

« Le gouvernement approuve les grandes lignes de la première étape d'un accord selon lequel au moins 50 personnes enlevées, des femmes et des enfants, seront libérées pendant quatre jours au cours desquels il y aura une accalmie dans les combats. » (Gouvernement israélien, communiqué du 22 novembre 2023).

Après de longues semaines de négociations, un accord entre Israël et le Hamas a été conclu dans la soirée du 21 novembre 2023. Le gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou a approuvé les bases de cet accord qui ne devrait pas être mis en vigueur avant vendredi 24 novembre 2023. Selon le Qatar, le début de la trêve aurait lieu ce même vendredi le matin et une première libération d'otages le vendredi après-midi : 13 otages du Hamas en échange de 39 prisonniers palestiniens.

De quoi s'agit-il et avant, comment a-t-il été négocié ? Il est toujours surprenant qu'un protagoniste qu'on veut anéantir, éradiquer, devienne du jour au lendemain un interlocuteur pour un accord. En fait, c'est le cas pour toutes les guerres. Les deux parties sont foncièrement focalisées par l'élimination de l'autre, sinon, il n'y aurait pas de guerres mais simplement des discussions. Et pourtant, il faut bien aboutir à la paix et, auparavant, à la trêve ou au cessez-le-feu. On ne conclut la paix, même provisoire, qu'entre deux belligérants.

Comme dit depuis longtemps, c'est le Qatar qui a servi d'intermédiaire. Le rôle du Qatar est ambivalent puisqu'il est économiquement très implanté en Europe, par exemple, mais il est aussi la base principale du Hamas. Pour la situation actuelle, c'était donc l'intermédiaire idéal : Israël pouvait discutait avec le Qatar (avec les États-Unis) et le Hamas également.

La nature de l'accord, c'est l'échange de prisonniers : libération de 50 otages du Hamas contre la libération de 150 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes. Le rapport 1 pour 3 est différent du rapport relevé auparavant (1 pour 10). /ors de ces libérations et échanges, pendant quatre jours, un cessez-le-feu est prévu.

Les 50 otages du Hamas libérés (sur 236 otages en tout, dont certains sont certainement déjà morts car placés en boucliers humains) sont uniquement des femmes et des enfants (de moins de 19 ans). À leur libération du Hamas, ils seront examinés médicalement par la Croix rouge puis seront interrogés comme témoins par l'armée israélienne, enfin seront ensuite libres de retrouver leurs familles et proches. Parmi ces 50 otages, la France espère qu'il y en aura 4 de nationalité française.

Du côté israélien, 150 prisonniers palestiniens seront donc également libérés, aussi uniquement des femmes et des enfants. Quand on entend cette information, il y a évidemment tout de suite un élément qui choque : il y a des enfants palestiniens dans les prisons israéliennes. À la différence des otages du Hamas, innocents et enlevés de manière arbitraire, les personnes retenues dans les prisons israéliennes le sont selon une procédure judiciaire et pour des raisons pénales, car Israël est un État de droit.

Le gouvernement israélien a publié à l'attention des médias une liste de 300 noms dont les 150 émaneraient. Elle a été émise par le Département de la Justice sous le titre : "Publication au public de la décision gouvernementale 1077 – Libération de prisonniers pour des raisons de gestion des relations extérieures et de la sécurité du pays".

Elle contient ainsi 300 fiches nominatives contenant des informations précises sur les prisonniers. Par exemple, ce jeune homme de 18 ans (né le 30 janvier 2005) qui a été arrêté le 14 novembre 2022, pas encore jugé ("en état d'arrestation") donc sans durée de détention, avec l'indication de la cour de justice dont il dépend (ici la cour martiale) et les infractions que la justice israélienne lui reproche, ici "lancer une bombe ou un incendiaire ; lancer des pierres ; créer un objet explosif ou incendiaire".


On peut comprendre que des adolescents qui ont le même motif d'arrestation puissent être en prison. La justice de adolescents de 13 à 18 ans pose aussi un problème en France où les auteurs d'infractions parfois très graves sont de plus ne plus jeunes (c'est un sujet qui revient régulièrement dans le débat public en France et le terrible assassinat de Thomas 16 ans le 18 novembre 2023 à Crépol sera certainement l'occasion de l'alimenter).

Dans cette liste publiée, il y a une trentaine de femmes, pour la plupart majeures, âgées de 15 à 59 ans. Parmi les mineurs, cela va de 14 à 18 ans. Les prisonniers libérés n'ont pas été arrêtés pour des affaires de meurtres voire d'assassinats, mais des tentatives de meurtres, un soutien au terrorisme, des tirs sur des personnes, des lancements de bombes, des incendies criminels.

50 prisonniers seraient affiliés au Hamas, dont quelques mineurs de 17 et 18 ans et deux femmes. Ces deux femmes affiliées au Hamas sont les suivantes : une jeune femme de 24 ans arrêtée pour blessures corporelles graves, port de couteaux et poignards ; une femme de 41 ans arrêtée pour atteinte à la sûreté de la l'État. La grande crainte du gouvernement israélien est de libérer un dirigeant du Hamas.

L'arrestation du directeur de l'hôpital Shifa à Gaza, le plus grand hôpital de Gaza, parce que son hôpital servait de base de commandement du Hamas et de repli des terroristes auteurs des massacres du 7 octobre 2023, a permis à l'armée israélienne d'atteindre une de ses objectifs.

La manière dont se dérouleront les quatre jours de trêve donnera une idée de négociations ultérieures pour la fin des combats à Gaza, d'une part, et pour la construction d'une paix durable entre Israéliens et Palestiniens, d'autre part. On est loin d'y être encore, mais la libération d'otages par le Hamas aura quand même de quoi rendre la situation un peu moins tendue.


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Sylvain Rakotoarison (23 novembre 2023)
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