A. Tsipras, ou l’art de (bien) faire semblant !
par Laurent Simon
jeudi 9 juillet 2015
Car Alexis Tsipras n'est-il pas devenu un maître de cet art de faire semblant ?
- Faire semblant de donner un signe de bonne volonté en ne faisant plus appel à son turbulent Ministre des Finances, alors que c'est bien plus parce qu'il était choqué de la prise de parole de Y. Varoufakis devant le peuple grec, le soir du référendum, avant lui
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Faire semblant de négocier, alors que son nouveau Ministre des Finances vient sans aucune des propositions concrètes, crédibles, clairement attendues par les négociateurs européens ? - Faire semblant de vouloir rester dans l'euro, alors que tous ses actes vont dans le sens d'une sortie inéluctable de cette zone euro ? [2]
- Faire semblant d'être à l'écoute de son peuple, et des différents partis grecs, y compris ceux partisans du OUI, alors que la dynamique enclenchée crée la mort de l'économie et le chaos en Grèce (non amorce d'aucune vraie réforme structurelle depuis 5 mois, désinformation pour faire croire que l'Europe demande à réduire le montant des retraites alors qu'il s'agit de repousser l'âge de la retraite, arrêt progressif de l'économie qui pouvait cependant repartir dès 2015, fermeture des banques pour plus d'une semaine, qui empêche les plus élémentaires activités économiques, etc.)
Il vient de rassembler la classe politique grecque sur un texte commun [3], de "soutien aux négociations entre le gouvernement Tsipras et les créanciers du pays, en vue d'un accord dans le cadre européen", alors qu'il fait tout pour reculer ce moment fatidique.
Et que son attitude depuis 5 mois, et depuis le résultat du référendum, a le don de hérisser les négociateurs européens contre lui.
Ne fait-il pas exprès de s'attirer ces foudres contre lui, en créant une situation de facto favorable à la sortie de la zone euro, pour mieux pouvoir ultérieurement faire porter la responsabilité d'une sortie de l'euro aux dirigeants européens ?
La tactique serait d'essayer de faire apparaître aux Grecs, et aussi aux Podemos, FN et autres partis populistes, qu'il n'y a pas moyen de négocier avec les 18 autres dirigeants européens [4] et responsables de la zone euro.
Bien joué, en apparence, mais l'avenir dira si sur la durée ces choix seront 'payants', car les malheurs à venir du peuple grec risquent fort de se retourner très vite contre lui !
Et la confiance, essentielle en économie, et tout particulièrement en période de crise, n'est pas là
En attendant, nombre de commentateurs, de tous bords, se posent des questions à son sujet :
- Carole Barjon (Obs), LCP, ’Politique matin’ : « la partie de poker menteur n’est peut-être pas là où on croyait qu’elle était. En fait on a l’impression que Tsipras, sachant que son peuple ne veut pas de mesures d’austérité, et ne veut pas sortir de l’euro, attend que ce soit les européens qui prennent la décision à sa place ! »
- Marc Fiorentio, Cdans l'air, n'a pas la réponse à la question "est-il un authentique 'révolutionnaire' qui n'a pas abandonné son rêve de dynamiter le système ?"
- JD.Giuliani, Cdansl’air : « il y a un jeu politique, pour qui va porter la responsabilité de la catastrophe. ... Imaginez qu’il y ait un accord. A. Tsipras va faire pendant 3 ou 4 ans le contraire de ce qu’il a promis. Donc normalement il y laisse sa carrière. Donc je comprends qu’il n’ait pas très envie, et on peut le soupçonner de jouer un double jeu. »