Afrine, le masque tombe : Erdogan officialise le nettoyage ethnique

par REMY Ronald
samedi 24 mars 2018

Ils n’envahiraient soit disant qu’avec « modération » (promis juré !), afin de ne faire partir que les « méchantes » milices terroristes kurdes. Les bobos gogos les ont cru. Hélas, le masque est tombé dès l’entrée des troupes turco-djihadistes dans la capitale provinciale : terreur au sein de la fraction de population n’ayant pas pu ou voulu s’enfuir, mauvais traitement des personnes suspectées d’être pro-YPG, destructions rageuses inutiles, pillage en règle, éradication de toutes traces culturelles kurdes. La manifestation de la haine et de la guerre totale était bien l’objectif du viol militaire de la frontière syrienne. Soigneusement camouflée par une habile et massive propagande, le nettoyage ethnique a maintenant été rendu officiel par les médias turcs. Preuve de leur complet sentiment d’impunité diplomatique internationale. Voilà les « gentils » turcs claironnant qu'ils comptent installer à Afrine des centaines de milliers de réfugiés syriens en Turquie, pour l'essentiel des Arabes à la place des « méchants » kurdes. Erdogan officialise ouvertement le nettoyage ethnique et argumente son abjecte forfaiture en parlant de rendre ces territoires d’Afrine à leurs "véritables propriétaires" (statistiques démographiques bidonnées à l'appui). Le concept de « véritables propriétaires » ne faisait pas parti, comme par hasard, de ses multiples harangues guerrières d’avant l’invasion ; puisqu’il ne visait officiellement que les « méchants » terroristes du YPG. Emmanuel Macron a été splendidement roulé dans la farine par le roublard tyran islamo-fasciste à qui il a fait confiance en lui demandant… de la « retenue ». Une invasion que notre jeune Président inexpérimenté avait imprudemment mais officiellement jugée « légitime » (malgré qu’elle était de toute évidence injuste, scandaleuse et en totale contradiction avec toutes les lois internationales !).

Et oui, nettoyage ethnique, A l’instar de l’ex Yougoslavie. Comme le craignait votre serviteur. Comment ? En décortiquant simplement les nombreuses failles illogiques de la grossière propagande d’Erdogan (digne d’un Goebbels mais mal ficelée). Et aussi en analysant avec patience les textes des « troll » fanatiques sur le web. La haine était bien là, cuite et recuite, avec un désir de victoire complète et radicale. Une haine guerrière qui foisonnait et étouffait les rares et timides expressions de désir de paix entre turcs et kurdes, entre musulmans et non musulmans, dans cette Syrie éviscérée par les bombes depuis huit ans. Le nettoyage ethnique était donc bien présent dans l’esprit des envahisseurs depuis le départ.

Pourquoi une invasion de toute évidence injuste ? Parce que pour ceux qui ont un tant soit peu de culture géographique, historique et géopolitique, Afrine la laïque, terre ancestrale kurde, avait la réputation d’être pacifique, laborieuse et tolérante au point d’avoir accueilli une énorme masse de réfugiés non kurdes. Afrine n’était que peu défendue pour contrer une armée puissante et moderne. Pas de blockhaus, quelques tardifs et interrompus petits souterrains se comptant sur les doigts d’une main, des armes modernes anti chars en très faible nombre et des missiles portables anti aériens totalement absents. Afrine ne s’attendait pas à être véritablement attaquée, car vivant dans le déni. Une grave insouciance au vue des menaces guerrières quasi quotidiennes d’Erdogan et de l’entassement massif des chars et canons à la frontière depuis la première invasion du nord de la Syrie fin 2016 (opération bouclier de l’Euphrate).

Pourquoi cette insouciance des kurdes ? Parce qu’ils se croyaient protégés par leur conduite pacifique exemplaire et… par le bouclier diplomatique américain ! Nikki Haley, représentante permanente des Etats-Unis auprès des Nations unies, n’avait-elle pas énergiquement protesté contre le non respect du cessez-le-feu humanitaire de 30 jours en Syrie ? (pourtant voté à l’unanimité, fin février, par le Conseil de sécurité de l'ONU). Le 12 mars, à l’occasion du dépôt d’une résolution au Conseil de sécurité pour un cessez-le-feu immédiat en Syrie, n’avait-elle pas averti à nouveau les quatorze autres membres du Conseil que les Etats-Unis « restaient prêts à agir » sur le dossier syrien si la voie onusienne s'avérait insuffisante. Les kurdes ont cru ces belles paroles enflammées. Malgré « l’incident sanglant » de Deir ez-Zor (dans la nuit des 7 à 8 Février 2018, bordure Est de l’Euphrate, 100 à 300 tués, dont de nombreux mercenaires russes), Poutine et Erdogan n’en croyaient pas un mot. Cette diplomate médiatisée, soigneusement écoutée par les kurdes, savait-elle que, dans son dos, le chef de la diplomatie américaine avait négocié en secret avec Erdogan l’abandon d’Afrine ? Même si Rex Tillerson, a ensuite été viré (par simple Twitter), cette situation en dit long sur la réelle crédibilité des menaces américaines. Résultat, le 18 Mars, les chars turcs étaient dans Afrine, dévastée et ravagée par les pillards islamistes fanatisés. 

Pourquoi un si naïf aveuglement d’Emmanuel Macron ? Parce qu’il a cru à la propagande grossière d’Erdogan sur Afrine soit-disant repère de terroristes. Il a cru à la promesse de « retenue » du tyran islamiste. Le jeune "bisounours" a cru que le dictateur, oppresseur de son propre peuple, se contenterait de virer les milices YPG, ménagerait la population locale puis rendrait sagement le territoire au Gouvernement Syrien.

Mais un aveuglement terrible aussi à cause de ses très mauvais conseillers à l’Élysée, qui n’en sont pas à leur première gaffe (et ce n’est pas faute d’avoir plusieurs fois tiré le signal d’alarme). Un viol militaire de frontière « avec retenue », sans autorisation du pays envahis et sans mandat de l’ONU, mais autorisable s’il ne dépasse pas 30 Km de profondeur ?! Tel est le nouveau concept éthique et juridique, inventé par une fraction dirigeante décérébrée de la macronie, pour gérer les conflits internationaux ?! Imaginez les russes où les Ukréniens appliquer cet "original" assouplissement des règles diplomatiques ! Imaginez l’état de l’Europe au but de quelques décennies avec cette diplomatie démentielle ! Ou bien certaines de nos élites, trop éloignées de la réalités et de la morale, autour de champagne et de caviar, estimeraient que ce sont que des règles applicables seulement et uniquement pour des kurdes et des arabes ?...

Vu la gravité des conséquences de ce criminel amateurisme, les conseillers défaillants devraient objectivement reconnaître leur catastrophique erreur et démissionner. Sur le champ. Car le plus grave serait que cet aveuglement se poursuive. Ce qui pouvait passer pour de la naïveté due à l’inexpérience sous tutelle de mauvais conseillers, sera alors, à la longue, fatalement jugé comme une volontaire complicité diplomatique d'invasion militaire, voire de complicité de crime de guerre.

Déjà, rien qu’aujourd’hui, il y a un gros risque de poursuite judiciaire du gouvernement français.

Explication :

Les médias français n’ont pas encore réagi à un suicidaire point presse officiel du Ministère des Affaires Étrangères Français du 19 Mars 2018 (passé pour l’instant totalement inaperçu aussi par les partis).

Des questions ont été posées par les journalistes à propos de la position française concernant la crise du nord de la Syrie. Malgré la preuve avérée des objectifs et exactions turco-djihadistes, le Ministre Jean-Yves Le Drian s’est refusé à condamner l’invasion illégale de la province d’Afrine par Erdogan.

Extrait de la réponse officielle du Ministre : 

La France exprime sa vive préoccupation face à la situation humanitaire à Afrin où des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées (il minore intentionnellement, 350.000 en réalité) et où de très nombreux civils se trouvent dans une situation critique. Elle demande le respect du droit international humanitaire (mais pas le respect du droit international tout court !!!) et rappelle que la résolution 2401 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée à l’unanimité le 24 février (mais jamais appliqué par Erdogan), exige une cessation des hostilités sur l’ensemble du territoire syrien, ce qui inclut Afrin (mais la diplomatie Française s’était justement opposée à ce qu’Afrin soit nommément cité !!!).

Notre position est constante (donc aucun remord malgré les dramatiques conséquences humanitaires, politiques et militaires présentes et à venir) : les préoccupations légitimes de la Turquie concernant la sécurité de sa frontière (l’invasion est donc maintenant officiellement légitimée après avoir été seulement « comprise ») ne doivent pas conduire à une implantation militaire (implantation NON, mais invasion militaire OUI !!!) dans la profondeur du territoire syrien (quelle profondeur est tolérable pour la diplomatie française ? 30 Km comme annoncé par Erdogan ? 40 Km comme réalisé à Afrine ? Ou plus ? Et quid des 900 Km de frontières restant que Erdogan déclare ouvertement vouloir aussi envahir ?)

 

En conclusion :

Maintenant

=> que les objectifs et exactions des turco-djihadistes sont enfin mondialement connues,

=> que l’invasion a été condamnée dès le 20 janvier 2018 par le gouvernement Syrien,

=> que l’invasion a été condamnée le 8 Février 2018 à l’unanimité par le Parlement Européen, => que le cesser le feu a été voté le 24 Février 2018 à l’unanimité par le Conseil de l’ONU,

=> que la Turquie est néanmoins allé jusqu’au bout de cette invasion ;

=> que cette très imprudente déclaration officielle de Jean-Yves Le Drian a été prononcée après toutes ces dates, le 19 Mars 2018,

le gouvernement français encourt effectivement une poursuite judiciaire pour complicité d’invasion illégale et éventuellement, par conséquent, pour complicité de crime de guerre. Il suffit qu’une plainte officielle soit déposée, via le gouvernement Syrien ou via le Parlement Européen, etc., auprès de la cour de justice internationale.

Il faut protéger juridiquement et politiquement notre jeune Président, dynamique, volontaire mais encore inexpérimenté (et pour lequel je continuerai à voter malgré ses erreurs —qu’il faudra corriger— car les autres candidats étaient bien pire que lui et avaient déjà fait preuve de leur incompétence). Solutions ? Il y en a déjà une évidente : 

Que le Ministre Jean-Yves Le Driant quitte sans éclat le Gouvernement. Qu’il prenne sa retraite à taux plein discrètement, dignement, rapidement. Pour raison de santé par exemple. Mais très rapidement.

Il faut empêcher le dictateur Erdogan d’envahir Manbij, comme il n’a cessé de l’annoncer. Des moyens disponibles ? Pas beaucoup, hélas, tant sa détermination est forte et tant celle des Etats-Unis est bien molle ou incertaine. La France n’a maintenant quasiment plus de crédibilité diplomatique. Et comme nous l’avons dit dans un précédent texte sur Agoravox, il lui faudrait minimum une année pour s’équiper, s’organiser et s’entraîner en vue d’une éventuelle opération sécurisée (économe en ressources humaines) d’harcèlement aérien type « Ourga ». De plus, selon le chercheur Fabrice Balanche, qui était à Manbij en février 2018, « Si les Kurdes n'ont pas été capables de résister dans une région montagneuse et ethniquement homogène comme Afrine, comment pourraient-ils résister au milieu de populations mixtes à Manbij ? ».

En dehors de l’empilement des sempiternelles condamnations, inutiles avec les dictateurs (surtout s’ils se découvrent être de véritables psychopathes hors contrôle), en dehors des polémiques stériles en provenance des « troll » pro turques ou pro russes inondant le web, et du « Ya Ka Fo Kon » sur les sites type cafés du commerce, il y a tout de même une chose à faire pour sauver le peu d’honneur qu’il reste à la France, à l’Europe, aux membres de l’OTAN et plus largement de l’OCDE :

Mettre en place un Tribunal international comme pour la Yougoslavie.

Dès maintenant. Sans attendre. Sans tergiversations politiciennes en vue de gagner du temps. Avec forte pression populaire s’il le faut. Cela permettra d’accumuler au niveau international des preuves soigneusement vérifiées par toutes les parties. Y compris notre fameuse revendication de photos aérienne avant/après bombardement sur Afrin.

La médiatisation du travail de ce Tribunal développera la crainte d’avoir à rendre des comptes un jour. Elle divisera peut-être par 2 ou 3 le nombre de villages « aplatis » par les bombes, le nombre de personnes torturées dans les prisons de Bachar ou d’Erdogan, ou le nombre de vidéos djihadistes sur des prisonniers publiquement égorgés (y compris un enfant de 10 ans !) ou massacrés et seins coupés comme la milicienne kurde Barin Kobane.

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