Argentine : le choix juste et logique de ne pas payer les fonds vautours
par Laurent Herblay
vendredi 1er août 2014
Comme on pouvait s’y attendre depuis le jugement de la Cour Suprême des Etats-Unis en faveur du fond vautour NML Capital, l’Argentine a refusé d’obtempérer et de payer 1,5 milliards de dollars aux deux fonds vautours suite à l’échec des négociations avec eux.
Bien sûr, à partir du moment où ces titres dépendent des lois des Etats-Unis et étant donné que la Cour Suprême a tranché en faveur de NML, on pourrait penser que l’Argentine doit assumer sa signature. Mais le débat n’est pas clôt par la décision de la justice étasunienne. D’abord, comme le montre l’affaire BNP Paribas, le jugement de cette justice est questionnable (en Allemagne, et même aux Etats-Unis, mais pas assez en France). Ensuite, se pose tout de même un problème d’équilibre par rapport aux autres créanciers, qui ont accepté une décote de 70% sur 97% de la dette. Même s’il y a une faille judiciaire, il ne semble pas juste qu’une petite minorité de créanciers puissent obtenir un traitement privilégié, d’autant plus qu’ils n’étaient pas des créanciers originels et qu’ils visent seulement à réaliser une énorme plus-value dans l’opération.
Mais surtout, est posée ici une question fondamentale d’équilibre entre le droit et la politique, que Jacques Sapir a brillamment traitée dans une série de papiers sur son blog. Pour lui, « la fétichisation de l’état de droit comme état de légalité est certainement une des tendances les plus dangereuses pour la démocratie elle-même ». Bien sûr, une leçon de cette affaire est qu’un pays doit éviter le plus possible d’émettre des titres sous un droit étranger pour rester maître de son destin dans un cadre démocratique normal. Mais étant donné qu’un accord a été trouvé pour 97% de la dette, il n’est pas politiquement normal que les pirates de la finance profitent d’un droit qui leur est trop favorable pour rançonner un pays et obtenir bien plus que les créanciers originels, alors même qu’ils n’avaient pas avancé le moindre fond à la base et que cela leur permettrait de multiplier leur mise d’une manière indécente alors que 97% de la dette a été soldée à -70%.