Avis de chienlit financière en Chine
par Laurent Herblay
mardi 1er mars 2016
C’est une histoire étonnamment passée relativement inaperçue chez nous : Ezubao, le leader chinois du prêt entre particuliers, a fait faillite, laissant près d’un million d’investisseurs allégés d’environ 50 milliards de yuans (plus de 7 milliards d’euros). Comme le symbole d’une époque.
Le pire de la finance et de la nouvelle économie
Décidément, l’histoire se répète, y compris certains épisodes bien connus, démontrant notre difficulté à tirer les leçons des erreurs passées. Les arnaques financières sont malheureusement vieilles comme la finance, et la crise de 2008 a rappelé au monde le concept des schémas de Ponzi, où une entreprise attire des investisseurs en payant les rémunérations par les placements des nouveaux investisseurs. Ezubao a été fondé en 2014 et son succès météorique a même poussé le gouvernement à en faire un exemple en diffusant une interview de son patron sur son site. Depuis, le brouillard s’est dissipé et un ancien dirigeant confie que « 95% des projets d’investissement sur Ezubao étaient des faux ». Il a fallu vingt heures pour extraire du sol sa comptabilité, enfouie profondément dans le sol !
La Chine, qui s’est ouverte à une spéculation pas moins folle que dans les pays dits développés, en subit toutes les conséquences, même si, pour The Economist, « la Chine n’est pas davantage prédisposée à la fraude financière que les autres pays en voie de développement ». La chienlit financière se développe dans tous les pays qui dérégulent leur secteur financier, malheureusement : en 2012, la banque centrale d’Afrique du Sud recensait 222 shémas suspects. Pire encore, il semble que cette nouvelle économie démultiplie les possibilités d’arnaques, notamment dans les prêts entre particuliers, qui représentent 980 milliards de yuans. En décembre, la Commission de Régulation Bancaire de Chine avait tiré la sonnette d’alarme en classant pas moins de 3600 sites de tels prêts comme posant problème.
Où l’on distingue une fois de plus que derrière la propagande verbale de l’économie pseudo-collaborative, outre des barbares brutaux à la recherche de rentes, on trouve aussi purement et simplement de bonnes vieilles arnaques. Et l’on peut craindre que cela ne soit pas limité à la Chine…