Bilderberg 2014 : une rencontre sur fond de crise

par Indépendance des Chercheurs
jeudi 29 mai 2014

La rencontre de Bilderberg de 2014 commence aujourd'hui à Copenhague, d'après le communiqué de presse officiel. Une liste des participants est également diffusée. Ce n'est donc pas si secret que certains le laissent entendre. Il en est de même de la Commission Trilatérale, qui s'est réunie il y a un peu plus d'un mois en dont la liste officielle des membres en date d'avril 2014 est également publique. On peut ainsi constater que l'actuel milieu gouvernemental français est présent dans les deux cercles. A la Trilatérale, avec la présidente de la Commission des affaires étrangères de l'Assemblée Nationale, Elisabeth Guigou. A la rencontre de Bilderberg, via la secrétaire d'Etat Fleur Pellerin et le secrétaire général adjoint de l'Elysée Emmanuel Macron. Si la Commission Trilatérale est par définition tricontinentale (pour l'essentiel Europe - Amérique du Nord - Asie), Bilderberg incarne un groupe plus restreint autour des milieux dominants de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Les résultats des dernières élections européennes feront très certainement l'objet de débats à cette rencontre de Bilderberg qui commence deux jours après un Conseil européen où l'inquiétude des milieux dirigeants s'est clairement exprimée. Quelles que soient les voies par lesquelles elle se soit exprimée, l'attitude de révolte d'une partie croissante de la population européenne constitue un réel souci pour les « élites occidentales » dans l'actuel contexte économique, social et politique. Sans oublier l'Ukraine, la montée en puissance des pays « émergents », les différentes tensions internationales... Une situation qui rend cette rencontre de Bilderberg particulièrement digne d'attention.

Hotel de Bilderberg - Oosterbeek
photo par Michiel1972 http://nl.wikipedia.org/wiki/Michiel1972
CC BY-SA 3.0 http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/

C'est notamment au vu de la situation qui s'est créée avec les résultats des élections européennes, et de la crispation évidente du Conseil Européen de mardi, qu'il nous a semblé opportun de consacrer à la rencontre de Bilderberg de cette semaine les trois articles suivants :

« Bilderberg 2014, cette semaine à Copenhague »

http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2014/05/28/bildeberg-2014-cette-semaine-a-copenhague-49974.html

« Bilderberg 2014 : un contexte difficile »

http://blogs.mediapart.fr/blog/scientia/280514/bilderberg-2014-un-contexte-difficile

« Bilderberg 2014 : un contexte sous tension (I) »

http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2014/05/29/bildeberg-2014-un-contexte-sous-tension-i-49976.html

Les déclarations récentes des dirigeants politiques présentent un intérêt certain car, même si elles ne sont guère credibles, elles reflètent leur inquiétude et font état de sujets « dérangeants ». Les raisons de la crainte d'une « contestation interne » montante s'expriment directement ou indirectement dans ces prises de position.

En particulier, il nous paraît indipensable d'examiner en détail les déclarations de François Hollande avant et après la tenue du Conseil Européen :

http://www.elysee.fr/chronologie/#e6408,2014-05-27,conseil-europeen-5

ainsi que celles de Herman van Rompuy :

http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/142855.pdf

http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/142862.pdf

et le communiqué du Conseil Européen (déclaration des chefs d'Etat ou de gouvernement) sur l'Ukraine :

http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/ec/142864.pdf

Sans oublier le site de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) :

http://www.wto.org/indexfr.htm

Un sujet évident de préoccupation pour les groupes dominants est la mise en cause des accords transatlantiques de l'Union Européenne avec le Canada (déjà signé) et avec les Etats-Unis (en cours de négociation), comme évoqué dans nos articles « Assemblée Nationale, Traité transatlantique, OMC... (I) » et « L'Accord économique commercial global UE - Canada (I) ». Les enjeux économiques de ces accords sont colossaux.

De quoi se faire de sérieux soucis, si on fait partie des participants à une rencontre comme celle qui commence aujourd'hui à Copenhague.

 

D'autant plus que la France est loin d'être le seul pays concerné par la vague de colère populaire. En Espagne, par exemple, l'émergence de nouveaux partis au détriment du binôme habituel a été un trait marquant des élections de dimanche dernier. Et dans un pays comme la Catalogne, le Parti Socialiste a perdu rien de moins que 50% des voix entre 2009 et 2014 malgré le soutien sur place de Manuel Valls et Martin Schulz. Voir, par exemple, notre article « Manuel Valls et le Partit dels Socialistes de Catalunya (PSC) ».

Que peuvent répondre les Hollande, van Rompuy... à cette mise en cause de leur politique à l'échelle continentale ? Le lieu commun « croissance, compétivité, emploi » tout en prenant pour cible le prétendu « coût du travail » témoigne de leur immobilisme. La réalité est que le développement des « marchés de la main d'oeuvre » européen et planétaire comporte inévitablement un massacre des acquis sociaux des populations des pays de l'Europe occidentale : salaires, prestations sociales, droit du travail, services publics, santé, stabilité de l'emploi...

Rien d'étonnant si dans ces conditions et en désespoir de cause, les électeurs britanniques ont apporté un fort soutien à l'UKIP (United Kingdom Independence Party). Et peut-on sérieusement qualifier ce genre de votes d'anti-européens ? Pourquoi les travailleurs, les classes moyennes... devraient-ils docilement se laisser enlever leurs acquis pour le plus grand bien des grandes multinationales et des milieux financiers ? Précisément, le situation des classes moyennes constitue un souci explicite de cette rencontre de Bilderberg.

Dans le cas de la France, la réalité est que le programme proposé par le Front National n'était pas, pour l'essentiel, un programme d'extrême-droite. Ce n'est pas sur une telle base qu'il a été soutenu par les électeurs. Mettre en cause l'Union Européenne ou l'euro ne relève pas de l'extrême-droite. Refuser le Traité transatlantique, non plus. Et même sur l'immigration, les propositions avancées par le Front National ne sont pas spécifiques à l'extrême-droite, pas plus que la mise en cause de l'espace de Schengen ou de la directive européenne de 1996 sur le détachement des travailleurs.

Déjà en 2013, le programme de la rencontre de Bilderberg avait brandi explicitement des mots tels que « nationalisme » et « populisme ». Cette année, politiques et médias ont ajouté l'expression « europhobie ». L'ensemble de ce vocabulaire relève de la pure démagogie.

 

Que peut-il résulter, dans ces conditions, de la rencontre de Bilderberg de 2014 ? Une chose paraît certaine : d'une part, le processus de mondialisation et de casse sociale planétaire est en marche depuis longtemps ; de l'autre, la force de la réaction des populations européennes a vraisemblablement pris au dépourvu les milieux décideurs installés.

A suivre, donc.

 

Le collectif Indépendance des Chercheurs

indep_chercheurs@yahoo.fr

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http://groups.yahoo.com/group/problemes_des_scientifiques

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