Cameroun : Petits pas vers le désordre national

par Aimé Mathurin Moussy
jeudi 31 mai 2018

La destruction d’un monument en la mémoire de Ruben UM NYOBE, par les chefs traditionnels Duala la semaine dernière, et la crise anglophone qui bat son plein depuis deux ans, ont enterré plus qu'un espoir de paix. La montée en puissance du communautarisme et des replis identitaires, démontrent que toutes les conditions sont réunies pour la déchéance de notre unité nationale si durement acquise.

Paul Biya a réussi en 36 ans de règne à tuer la fibre patriotique, à tuer l’émulation individuelle, à tuer notre vivre-ensemble. Jamais nous n’avons autant vécu l’exacerbation criarde, affichée et soutenue du tribalisme. Jamais nous n’avons vu autant le népotisme s’ériger en système de gouvernance. Jamais nous n’avons vu autant de pauvreté dans ce pays. En somme, les sillons de la décrépitude et de la chienlit ont ouvert leurs vannes.

Comment comprendre, comment expliquer à la communauté nationale, que ce pays, doté de la plus grande police politique d’Afrique, du plus grand réseau d’indics, voit des fonctionnaires, des édiles être enlevés sans que cela n’égratigne l’administration centrale de Yaoundé ?

Comment nous faire gober que l’Ambazonie n’est pas une fabrication du système, quand on sait combien Paul Biya investit pour la défense et les services de renseignements et d’intelligence ?

Au vu de ce qui se dessine, le désordre semble être le système social que perpétue le régime en place. Il agite cet environnement émotionnel, pour fédérer les esprits faibles : les revanchards, les fainéants, les courtisans et les sadiques.

Au lendemain de l’exposition bravade des agissements des chefs Duala, contre un martyr national, on comprend bien que la stratégie du président de la République est de fragmenter au maximum la communauté nationale pour s’ériger en sauveur.

L’outrage des chefs Duala à l’encontre d’un corps constitué, en l’occurrence le délégué du gouvernement ; la destruction d’un édifice public à hue et à dia ; sans que le procureur de la République ne se saisisse de faits aussi graves ; est la démonstration que le pouvoir en place valide cette outrance villageoise.

Si le peuple ne se lève pas comme un seul homme, pour bouter hors Paul Biya et ses affidés, ce sera la défaite de chacun de nous. Il se vit dans toutes les strates sociales, une forme d’amertume, un sentiment d’être toujours passé à côté en 36 ans de règne de Biya. Un gâchis sans précédent.

Aimé Mathurin Moussy


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