Canada : la participation au bouclier antimissile semble acquise
par argumenteur
lundi 16 janvier 2006
Il semble que quel que soit le résultat des élections fédérales canadiennes le 23 janvier prochain, le Canada deviendra partie prenante au bouclier antimissile continental.
Dans son état actuel, le programme américain de bouclier antimissile est plutôt un système d’armement visant les satellites en orbite basse autour de la Terre, et pourrait entraîner une surenchère de tels systèmes par d’autres pays, selon une lettre adressée le 6 décembre 2004 à Paul Martin, le Premier ministre sortant du Canada, par des hauts responsables de l’organisme américain “Union of concerned scientists”. Selon cette lettre, les Américains prévoient même installer de tels systèmes dans l’espace, une militarisation de l’espace en somme. Ceci serait de nature à envenimer les relations des États-Unis avec la Chine, qui vient de lancer ses premiers satellites. Et la Russie préparait, en 2004 déjà, des systèmes visant à contrer les systèmes de défense antimissiles, ce qui justifie peut-être la poursuite du programme de bouclier antimissile par les Américains.
Selon un article paru le 27 novembre 2004 dans le Ottawa Citizen, Paul Martin avait déjà, à cette époque, donné son aval à la participation du Canada au programme américain de bouclier antimissile. Selon un article du Ottawa Citizen daté du 23 septembre 2004, le ministre de la défense du Canada, Bill Graham, a affirmé que le Canada s’opposerait fermement à la militarisation de l’espace, mais qu’il estimait que le Canada devait participer au programme de bouclier antimissile pour protéger sa souveraineté. À l’époque du Premier ministre libéral pacifiste Pierre-Elliott Trudeau, on disait de lui qu’il abusait du parapluie nucléaire américain. Maintenant, on dirait que le Canada n’a plus le choix de contribuer à son successeur, le programme de bouclier antimissile continental.
Signe avant-coureur, les dépenses du ministère de la défense du Canada, sous le gouvernement libéral sortant, qui s’élevaient à 10,6 milliards en 1994-1995 et à 10,1 milliards en 1999-2000, ont explosé : 14,3 milliards en 2004-2005, selon un article du journal La Presse du 14 janvier 2006. Selon le site du ministère de la défense nationale du Canada : "Le budget 2005 constitue le plus important investissement effectué dans les Forces canadiennes depuis 20 ans.” Ce budget alloue “près de 13 millions de dollars en nouveaux fonds pendant une période de 5 ans”.
Aujourd’hui, en Afghanistan, un attentat suicide a coûté la vie à un diplomate canadien de haut rang, Glyn Berry, et trois autres Canadiens ont été sérieusement blessés. On craint encore pour la vie de deux d’entre eux. Le mois prochain, les effectifs des troupes canadiennes en Afghanistan passeront de 650 à 2000.
Maintenant, passons aux programmes des partis politiques en lice pour former le prochain gouvernement canadien le 23 janvier prochain. L’énoncé de politique du 19 mars 2005 du Parti conservateur du Canada mentionne que “Le Parti conservateur appuie la participation du Canada à la négociation de tout système nord-américain de défense antimissile, sous réserve que toute entente serve les intérêts du Canada.” Le programme du Parti libéral du Canada mentionne : “Le gouvernement libéral s’engage à défendre le Canada, à faire sa part afin de protéger la partie septentrionale du continent nord-américain, et à préserver la souveraineté du Canada, notamment dans l’Arctique.” En ce qui a trait au bouclier antimissile continental, cela veut peut-être dire la même chose que ce que les conservateurs promettent.
La décision de participer au bouclier antimissile aurait elle déjà été prise en catimini par le gouvernement libéral ? D’après un article publié par l’Institut Polaris, certains indices le laissent croire, comme la modification du traité de l’OTAN pour permettre au commandement unifié “U.S.-Canadian North american aerospace defence command” la transmission aux centres de commandement du bouclier antimissile d’informations sur les lancements de missiles.
Les deux autres principaux partis politiques, le Nouveau parti démocratique et le Bloc québécois, s’opposent tous deux à la participation canadienne au bouclier antimissile et à la militarisation de l’espace. Après l’élection du prochain gouvernement, conservateur ou libéral, ces deux tiers partis pourraient former une coalition pour défendre ces causes communes. Cependant, il semble que quel que soit le résultat du scrutin le 23 janvier prochain, le Canada deviendra partie prenante du bouclier antimissile continental.
Le coût de la participation du Canada au programme de bouclier antimissile continental n’est pas publié. Ce coût pourrait-il mettre en péril les promesses électorales déjà annoncées ? Il m’est difficile de le prévoir sans information.