Chine et super-ordinateurs

par Olivier CHAZOULE
vendredi 19 novembre 2010

Larry Summers, Directeur du Conseil Economique National de la Maison Blanche vient de déclarer à un colloque organisé par le Wall Street Journal que les décennies à venir seront dominées par la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis. Il a ajouté que le sort du 21eme siècle sera aussi déterminé par la manière dont le reste du monde s’ajustera au développement exponentiel de la Chine.
 
Depuis 1989 et la chute du mur de Berlin le monde bipolaire USA-URSS était devenu brièvement multipolaire. Très vite cependant, il est apparu que les Etats-Unis ont assumé la domination de la planète, devenant selon le mot d’Hubert Védrine alors ministre français des affaires étrangères une Hyper-Puissance.
 
Ronald Reagan en demandant à Michael Gorbatchev de faire tomer le Mur de Berlin, puis Georges Bush senior en réclamant un nouvel ordre économique et politique mondial et enfin Bill Clinton en donnant à l’Amérique 8 ans de croissance, de chômage inexistant, d’excédent budgétaire et d’absence de guerre, ont confirmé ce concept d’Hyper-Puissance de l’Amérique.
 
Les événements tragiques du 11 septembre 2001 ont bouleversé le monde. Ils ont aussi provoqué une interrogation sur la puissance réelle de l’Amérique et sa vulnérabilité supposée, alors qu’en fait chaque pays au monde est aussi vulnérable aux attaques terroristes que les Etats-Unis, sinon plus.
 
Le déséquilibre mondial est venu d’ailleurs et pour d’autres raisons. On a entendu à satiété le mot de Napoléon Bonaparte : Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera.
 
La Nouvelle est tombée il y a quelques années : La Chine s’est réveillée.
 
Sous trois formes :
 
La Chine est discrète. Elle n’annonce ni ne dévoile ses intentions, encore moins ses réalisations. Ce n’est qu’au moment de la mise en œuvre des services, produits et technologies que ses concurrents apprennent les nouvelles qui sont toujours distillées de manière neutre et humble. Ce que les Anglo-Saxons appellent des Understatments  
 
La Chine va vite. Elle pense vite, décide vite, conçoit vite, construit vite, lance vite, achète vite (matières premières en Afrique par exemple) et vend vite
 
Enfin, la Chine est sur tous les fronts.
 
Les illustrations sont nombreuses (certaines avaient été données dans ces colonnes le 23 aout dernier dans La Chine un colosse aux pieds en béton, du même auteur).
 
La liste s’est très vite allongée, dans les secteurs stratégiques de l’économie, de la finance et de la haute technologie.
 
La première tendance est illustrée par les déclarations feutrées des dirigeants chinois indiquant vouloir globaliser (étendre internationalement) les banques chinoises pour rivaliser avec les géantes américaines et européennes.
L’effet sera triple : Bénéfice pour la Chine elle-même, contrôle bancaire de la région asiatique et compétition directe avec les rivaux occidentaux.
 
Selon M. Min Zhu, conseiller spécial auprès du FMI, la Chine qui compte pour 8% de la production industrielle mondiale à haute valeur ajoutée, atteindra les 33% en dix ans et
les pays émergents menés par la Chine représenteront 60% de la croissance mondiale dans 6 ans.
 
Mais le plus surprenant et le plus marquant des récents mouvements de la Chine a été dans le domaine des super computers. Il y a quelques semaines La Chine vient de révéler l’existence de son nouveau super computer 40% plus rapide que les plus rapides des computers américains qui tenaient jusqu’ici le haut du pavé : il s’agit du Tianhe-1A une machine révélée à Tianjin en Chine le mois dernier. Cet ordinateur exécute plus d’un milliard de milliards de calculs à la seconde et distance largement ses concurrents étrangers.

Ce sont les experts américains qui ont constaté sur place la validité de cette supériorité et ont déclaré qu’il faudrait plusieurs années, voire plusieurs décennies pour que les Américains puissent rattraper leur retard.
 
Supers computers signifient haute technologie, voyage dans l’espace civil et militaire, aéronautique, machinerie et de nombreuses applications, y compris militaires terrestres et sous-marines.
 
Immédiatement les Japonais on réagi en lançant dans l’urgence (Fujitsu) un programme informatique pour rattraper les Chinois, les Américains ont fait de même.
 
Pour ajouter à cette ambiance de compétition tendue, la Chine vient de limiter les investissements immobiliers des étrangers en Chine.
Autant spéculer entre soi.
C’est une mesure régulièrement adoptée par tous les pays du monde pour des périodes limitées.
Là encore, en faisant de même, la Chine tient à montrer au monde sa souveraineté.
 
Ainsi la liste est longue des percées technologiques, économies et politiques de la Chine. Elle ne les dévoile qu’au compte-goutte.
 
Pour ne pas humilier ses rivaux peut-être.
 
Ou peut-être pour qu’ils s’aperçoivent trop tard de leur retard.
 
Certes, la Chine ne domine pas le Monde, mais désormais le Monde ne domine pas la Chine.
 
Olivier Chazoule

Lire l'article complet, et les commentaires