Chine : pourquoi le peuple est-il en pleine révolte ?

par Laurent Masure
lundi 5 décembre 2022

La politique zéro Covid de Pékin conduit le pays dans une vague de troubles. Le secrétaire général du PCC est mis à mal. Ces décisions pour faire face à l'épidémie de Covid sont controversée. La colère gronde dans la rue mais quelle sera la réponse du régime ?

Manifestations, révoltes, protestations collectives sont appelées en Chine des "incidents de masse". En Europe, le terme "révolte" serait-il plus adapté à ce type de protestation ?

En toile de fond, le ras-le-bol populaire après près de trois ans de stricte politique zéro-Covid. Confinements à répétition et testing quotidien des habitants font partie désormais de la vie des chinois.

Le Parti-Etat semble acculé par le tsunami des contestations qui déferlent depuis quelques semaines. Le jeudi 24 novembre, un incendie a ravagé une tour résidentielle à Urumqui capitale de la région Ouïghours de Xinjiang. Les restrictions sanitaires sont accusées d'avoir empêché le travail des secours. Ces arguments ont bien évidemment été balayés par gouvernement. Officiellement, 10 personnes ont perdu la vie. Selon les ONG sur place, plusieurs dizaines de personnes ont péri dans cet incendie. Les victimes sont essentiellement des Ouïghours.

La politique zéro Covid de la Chine qui assure un confinement total va jusqu'à fermer les issues de secours des bâtiments dits "contaminés".

Les Chinois (en majorité) ont très peu d'empathie vis-à-vis des Ouïghours. Ceux-ci subissent, dans l'indifférence la plus totale, un génocide depuis 2017. Cette fois, c'est toute la classe moyenne chinoise, qui habite dans des immeubles semblables, qui s'est identifiée à ces familles prises au piège.

La Chine assiste là à un soulèvement rarissime. La police essaye de décourager les rassemblements à Pékin. À Hong Kong, des manifestants prodémocrarcie de l'Université chinoise se sont réunis pour un hommage à ce triste événement. À Hangzhou, ville située à 170 Kilomètres au sud-ouest de Shanghai, les forces de l'ordre étaient visibles pour contrôler les manifestants.

"Les protestataires sont rares en Chine, par manque de mécanisme de coordination" explique Yasheng Huang, professeur d'économie au MIT : il n'y a ni religion, ni association, ni même technologie pour remplir cette fonction.

C'est le plus noir cauchemar du régime chinois qui semble en passe de se réaliser. La population n'a qu'un seul but : mettre un terme à ces confinements insupportables dont personne ne voit la fin. 

L'empereur Xi Jimping a obtenu un troisième mandat de secrétaire général du PCC. Cependant, il n'assouplit pas les règles en vigueur. Mais la cadence des tests ne diminuent pas et d'immenses "centres de quarantaine" continuent d'être construits partout, même dans les espaces paysagers. Voilà peut-être la raison pour laquelle de nombreux campus commencent à se révolter et scander des slogans inouïs en Chine. Des mots comme "État de droits", liberté, démocratie, etc. sillonnent les rues. 

Mais que faire face à cette réalité ? Xi Jinping est face à un dilemme. Soit il continue à réprimer la jeunesse. Il plongera de la sorte la Chine dans un cercle vicieux répression-révolte ; soit il adoucit les mesures afin de calmer son peuple. Mais celui-ci est très peu immunisé et très peu vacciné. A l'heure où le virus a repris sa propagation dans le pays, tout relâchement pourrait entraîner jusqu'à 1,5 million de décès, selon les experts. Une nouvelle catastrophe sanitaite de nature à ébranler autant le régime.

Source : Courrier internationnal N°1674, L'OBS N°3034

 


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