Coronavirus : En Turquie, pas de répit pour l’opposition
par PETINOS
samedi 18 avril 2020
Lundi 13 avril, le Parlement turc adoptait une loi visant à permettre la libération de dizaines de milliers de détenus.
La volonté du président turc qui a le Parlement du pays à sa botte, Parlement qui ne fait plus que de la figuration (il ne s’agit, cependant, pas du seul Parlement à avoir donné les pleins pouvoirs à l’exécutif durant ces dernières semaines), est encore passée.
Comme au lendemain du coup d’État manqué, du 15 juillet 2016, lorsque le néo-sultan d’Ankara décidait de libérer des milliers de détenus de droit commun pour faire place aux détenus politiques – opposants, journalistes, juges, défenseurs des droits, représentants des minorités, etc, ainsi, aujourd’hui, l’islamo-nationaliste Erdogan maintient en prison tous ses opposants libérant encore des détenus de droit commun.
Lundi dernier, la loi visant à libérer des dizaines de milliers de détenus a donc été approuvée par 279 voix contre 51. Comme le déplore Andrew Gardner, un représentant d’Amnesty International : « De nombreuses personnes qui sont en prison parce qu’elles ont fait usage de leurs droits - et qui n’ont commis aucun crime - sont exclues (de la mesure de libération) parce que le gouvernement choisit d’utiliser ses lois antiterroristes très flexibles, excessivement larges et vagues ».
L’épidémie due au coronavirus est bien évidemment à l’origine de cette loi ; elle partait sur un constat alarmant, car la Turquie approche les 2000 morts et le traitement du confinement de la population a été chaotique, obligeant même le ministre de l’Intérieur à présenter sa démission, refusée par le président-autocrate.
La loi concerne plusieurs catégories de détenus, dont les personnes âgées, en mauvaise santé et les femmes enceintes. Elle exclut les meurtriers, les auteurs de crimes sexuels, les trafiquants de drogue, les opposants politiques et les journalistes (les deux dernières catégories considérées comme terroristes).
Parmi les personnalités condamnées à rester derrière les barreaux figurent notamment l’homme d’affaires et philanthrope Osman Kavala et le politicien kurde Selahattin Demirtas, qui souffre pourtant de difficultés respiratoires selon son avocat.
Les prisons turques accueillent, cependant, une nouvelle population : les « terroristes » qui osent stigmatiser les manquements de l’État turc dans la lutte contre la pandémie et ceux qui osent dire que la maladie se développe de manière exponentielle dans le pays !!!
Le culte de la personnalité développé autour de la personne d’Erdogan ne tolère aucune critique : le leader charismatique est intouchable et son jouet – la Turquie – ne peuvent souffrir d’aucune contestation possible, sous peine de disparaître dans les trappes des prisons turques, comme dans le dessin animé Le roi et l’oiseau, lorsque le roi faisait disparaître dans les trappes du palais/forteresse, tout opposant ou susceptible de l’être…