Côte-d’Ivoire : ça sent la poudre
par davydave77
samedi 27 novembre 2010
La campagne du deuxième tour de l’élection présidentielle prévue pour le 28 novembre et présentée par la communauté nationale et internationale comme la dernière étape à franchir pour sortir définitivement la Côte d’Ivoire de la crise qu’elle traverse depuis 2002 se déroule dans un climat tendu faisant craindre le pire.
Il faut noter qu’à l’issue des résultats du premier tour, des heurts entre Bété et Baoulé dans les régions du centre-ouest et du sud-ouest ont été signalés par la presse. Selon les journaux proches de l’opposition les allogènes Baoulés soupçonnés d’avoir voté massivement pour le troisième candidat en lice, l’ancien président Konan Bédié du PDCI RDA lui-même baoulé ont subit des menaces et exactions de la part des autochtones Bété, ethnie à laquelle appartient le candidat de la mouvance présidentielle Laurent Gbagbo. Ces allégations ont été réfutées dans la presse proche du président sortant qui attribue ces attaques à une milice proche du RDR parti du candidat Alassane Ouattara.
L’appel quelques jours plus tard de Henri Konan Bédié à voter Alassane Ouattara, soutenu par Anaky Kobenan du MFA et Mabri Toikeuse de l’UDPCI qui avec le RDR forme la coalition du RHDP a accentué les tensions et donné une nouvelle tonalité au discours électoral devenu plus virulent et discourtois.
En réalité si l’appel des dirigeants du Rassemblement des Houphouetiste pour la Démocratie et la Paix(RHDP) à voter Alassane Ouattara désormais considéré comme le candidat la coalition est suivi par leurs militants respectifs, l’ancien premier ministre pourrait bénéficier des 28% de voix supplémentaires et devancer alors Laurent Gbagbo à ce deuxième tour. D’ailleurs le RHDP a été rejoint par Francis Wodié du PIT et Gnamien Konan deux autres candidats éliminés au premier tour. Un cas de figure inacceptable pour la majorité présidentielle de Laurent Gbagbo qui s’emploie en toute logique à faire échouer un tel schéma. Il faut rappeler qu’il y a quelques années Bédié et Ouattara ont été farouchement opposés. C’est donc un combat politique noble qui aurait se dérouler dans l’arène politique ivoirienne
Seulement, les premières minutes de cet ultime round offrent le constat suivant : les protagonistes se portent des coups bas, violents, acharnés et non autorisés par les règles de bonne conduite qu’ils se sont fixés sous le regard du Secrétaire Général de l’ONU et ; les contacts entre leurs supporters respectifs virent très souvent à l’affrontement.
Plus précisément, les partisans de Laurent Gbagbo n’hésitent pas au cours de leurs meetings ou dans les médias à traiter Alassane Ouattara, l’allier d’hier dans le cadre du Front Républicain opposé à Bédié, d’étranger, à lui attribuer la responsabilité du coup d’état de 1999 et la paternité de la guerre. Du coté du RHDP tout en réfutant ces accusations on rétorque que c’est plutôt Gbagbo qui a fomenter le coup d’état de 1999, on lui reproche d’avoir déversé des déchets toxiques à Abidjan et de ne pas être de bonne mœurs.
Voici le portrait de la situation que dresse la Convention de la Société Civile Ivoirienne (CSCI) :
•les tons agressifs et violents utilisés par les différents leaders politiques,
•les procès d’intentions et les accusations graves faits par chaque candidat à l’encontre de l’autre ;
•la radicalisation des positions des jeunesses des deux camps illustrée, entre autres faits, par la tentative d’incendie du siège du PDCI/RDA ;
•la diffusion de films, sms et rumeurs incitant à la haine et à la vengeance ;
•les menaces morales et physiques sur la liberté de vote dans les zones Centre Nord Ouest et gouvernementales ;
•les dérives de la presse proche des partis politiques ;
•le refus des états majors des deux camps d’envisager une défaite électorale ;
•le conditionnement des extrémistes des deux camps en vue d’affrontements éventuels.
A cela il faut ajouter les rumeurs de corruption qui courent sur le compte du président du président de la Commission Electorale Indépendante (CEI) et les accusations de partialité portée à l’encontre de l’armée régulière et des forces de l’ONUCI.
En clair, tous les ingrédients d’un cocktail, bien entendu explosif, sont réunis. Reste à savoir si la plupart des Ivoiriens fatigués par ces dix années de crises accepteront d’allumer cette étincelle qui mettra le feu aux poudres malgré les trois jours de prières et de jeûnes décrétés par l’ensemble des confessions religieuses du pays.