Dilemme. C’est le mot le plus d’actualité dans les ministères des affaires étrangères de l’Union. Dilemme face au Hamas : comment rester ferme face à une organisation qui, malgré l’onction du suffrage universel,
reste une organisation terroriste aux yeux des Etats-Unis, de l’Union
et d’Israël, sans « punir » le peuple palestinien ? Dilemme face au pouvoir biélorusse :
comment sanctionner un pouvoir dictatorial, maffieux et tricheur, et
renforcer les courageuses forces démocratiques, sans « punir » un peuple
qui vit dans des conditions d’un autre âge ? Dilemme face aux défis nucléaires iraniens
: comment adopter une stratégie qui concilie le réalisme, les exigences
américaines, la position « prudente » des Russes et des Chinois ? Dilemme
? Lisons les dictionnaires : « n. m. C’est l’obligation de choisir (voir
alternative)
entre deux partis contradictoires, mais qui tous les deux présentent
des inconvénients. Ex : S’il déménage, il perd tous ses amis ; s’il ne
déménage pas, il ne trouvera pas de travail. Certaines tragédies
(de Corneille en particulier) reposent sur un dilemme ». Comment sort-on
d’un dilemme ? En faisant des choix cornéliens, c’est un truisme de le
dire. Mais la « puissance douce », comme dit Jean Quatremer
avec indulgence, que constitue l’Union n’est guère capable de faire des
choix de courage. Elle s’use à donner du temps au temps, en oubliant
que s’il guérit parfois, le temps pourrit souvent... Elle se veut
« raisonnable » en oubliant que la faiblesse peut être une forme de
déraison... Elle oublie surtout que « gouverner, c’est choisir », donc
sortir des dilemmes.
Au
Hamas, l‘Union fait des chèques (en passant par l’Onu), quitte à se
faire accuser de « financer le terrorisme ». Face au « dernier dictateur
d’Europe », l’Union divisée s’en tient à des menaces verbales, à des
condamnations formelles, et à des déclarations chaleureuses mais peu
efficaces en faveur des « démocrates ». Face à l’Iran,
son attentisme est tel qu’on se demande si secrètement elle n’espère
pas qu’Israël lance une opération coups de poing sur les installations
iraniennes... Quitte à condamner a posteriori ce type d’action, bien sûr...
Il ne s’agit évidemment pas ici de condamner « l’Europe de Vénus » pour
exhorter à la constitution d’une « Europe de Mars ». Mais l‘Europe « douce
et molle » ne joue pas le rôle qu’elle devrait jouer. Une crise qui naît
des structures et des hommes. Pas d’union politique et pas de vrai
leader... Un jour, cela peut se payer très cher. Tragique, redirait
Corneille, expert en dilemmes...
Daniel Riot est journaliste