États-Unis : la « journée sans immigrés »

par Caroline R.
mercredi 3 mai 2006

Après une série de manifestations, fin mars, où des centaines de milliers de personnes ont défilé dans plus de 130 villes américaines, la journée du 1er mai 2006 devait être le point d’orgue de cette mobilisation hispanique contre le projet de loi restreignant l’immigration aux États-Unis. Ce projet, voté en décembre 2005 par la Chambre des représentants, criminalise l’immigration clandestine, qui jusqu’alors était considérée comme une simple infraction.

En ce jour baptisé le jour sans immigrés, tous les Hispaniques, sans-papiers ou non, étaient invités à boycotter le travail, l’école, et à ne rien consommer. L’idée était de faire sentir l’importance des immigrés dans l’activité économique américaine.

La communauté hispanique, première minorité aux États-Unis avec plus de 41 millions de personnes, soit 14% de la population, possède un pouvoir d’achat global de près de 800 milliards de dollars, et représente 8% de l’électorat. Forte de cette constatation, elle entendait faire pression sur le Congrès pour obtenir une réforme de l’immigration et la régularisation des douze millions de sans-papiers installés dans le pays.

Le bilan de cette journée est contrasté. Si le succès des manifestations est incontestable, les conséquences du boycott sont plus difficiles à mesurer.
Sur la côte Ouest, où se concentre l’immigration clandestine, plus d’un demi-million de personnes ont défilé. Ils étaient près de 250 000 à Los Angeles à scander Si se puede (oui c’est possible) et Aujourd’hui nous défilons, demain nous votons. A l’Est, des marches ont également eu lieu. A Chicago, ils étaient plus de 400 000, tandis qu’à New York, plusieurs chaînes humaines ont été organisées, et ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes.

Au niveau économique, les débrayages ont été plus sensibles dans les secteurs tributaires de la main-d’oeuvre des immigrants, tels que le bâtiment ou le commerce. Ainsi, de nombreux petits commerces sont restés fermés dans des villes comme Chicago ou Los Angeles, et le port commercial de Los Angeles, deuxième port américain, a tourné au ralenti en raison du mouvement bien suivi chez les routiers.

Sur les 12 millions d’Hispaniques clandestins sur le sol américain, 6,2 millions sont mexicains. Pour cette raison, le mouvement de manifestation a été suivi au Mexique. Ainsi, des dizaines de milliers de Mexicains ont manifesté leur solidarité avec les sans-papiers aux États-Unis. Des manifestants ont bloqué pacifiquement le pont international de Matamoros, à la frontière avec le Texas. D’autres actes similaires ont eu lieu dans d’autres villes limitrophes, telles que Tijuana ou Nuevo Laredo. Une demi-douzaine de gouverneurs, ainsi que l’Église catholique, avaient appuyé l’idée d’un boycottage des produits et établissements appartenant aux États-Unis.

Si la société mexicaine s’exalte, les dirigeants s’interrogent, eux, sur les effets à long terme de cette vague de protestation.

Aux États-Unis, le président George Bush a rejeté le boycottage et a réitéré son soutien à une réforme étendue de l’immigration, tout comme le gouverneur républicain de la Californie, Arnold Schwarzenegger. Le Sénat de l’Etat de Californie, à majorité démocrate, a, quant à lui, adopté une résolution pour appuyer l’initiative de la communauté hispanique.


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