Gaz : l’Europe dans les griffes de Gazprom ?

par ÇaDérange
vendredi 14 avril 2006

La Russie, son président Vladimir Poutine, et son bras armé dans le domaine du gaz, Gazprom, poursuivent la mise en place de leur stratégie de contrôle du marché du gaz et de l’approvisionnement de l’Europe dans ce domaine. Jugez-en plutôt.

Reconnaissant que "qui tient la logistique tient le marché", Gazprom s’attache à tisser une toile de gazoducs lui appartenant ou contrôlés par lui à travers l’Europe. Le fleuron en est assurément le gazoduc en construction sous la Baltique pour amener du gaz russe vers l’Allemagne. Gazprom en contrôle 51%, le reste étant aux mains de sociétés allemandes. Par ailleurs, appliquant la politique d’échange "gaz contre gazoduc" qui vient de lui permettre de prendre le contrôle de la distribution gazière en Arménie (cf. message du 11avril), Gazprom essaie de prendre le contrôle des gazoducs qui traversent l’Ukraine et la Biélorussie. Vladimir Poutine vient de proposer à la Hongrie de devenir son "centre de distribution" en construisant une branche du gazoduc, dit Blue Stream, qui achemine du gaz russe en Turquie pour le compte de Gazprom et d’Eni. Proposition très bien accueillie par Budapest, qui a pu constater l’impuissance de Bruxelles sur les problèmes énergétiques, lors de la crise d’approvisionnement de cet hiver. Même approche auprès de la Tchéquie. Vladimir Poutine est allé en visite à Ankara, en Turquie, pour proposer que ce pays devienne un carrefour des routes gazières, de celle qui acheminera le gaz de la Caspienne vers la Méditerranée, et celle qui acheminerait le gaz russe du Nord vers la Méditerranée encore et les marchés de l’Europe du Sud et d’Israël. Gazprom, dans ce cas, construirait un deuxième Blue Stream parallèle au premier, et des capacités de stockage en Anatolie, voire dans le réseau de distribution turc. Vladimir Poutine est allé voir également un autre grand fournisseur de l’Europe en gaz, l’Algérie, pour lui proposer rien moins qu’une mini OPEP du gaz, pour réguler prix et production. Pour cela, une alliance gazière entre Gazprom et la Sonatrach, la société nationale algérienne, serait à l’ordre du jour.

On ne peut qu’être frappé de cette frenésie de contacts et de propositions diverses de la part de Vladimir Poutine et de Gazprom pour mettre la main sur la totalité du marché gazier européen et le contrôler. Il n’hésite pas à frapper à la porte de pays appartenant à l’Union européenne ou désireux d’y appartenir, ou encore de partenaires commerciaux importants, pour leur faire des propositions qui, de toute évidence, ne sont pas dans l’interêt de l’Europe des 25.

Que fait l’Europe, pendant ce temps ? Après la sortie de son livre blanc ou vert sur le sujet, tout à fait anodin, la réunion du Conseil européen des 23 et 24 mars derniers, qui devait examiner le dossier, semble bien avoir été un flop, chaque pays campant sur sa souveraineté dans ce domaine. Il est vrai qu’il était bien difficile de faire avancer un tel dossier avec des positions aussi radicalement différentes d’un pays à un autre.Deux idées seulement ont émergé de ce Conseil : créer un marché européen de l’énergie en coordonnant les politiques nationales, et parler d’une seule voix vis-à-vis de nos fournisseurs extérieurs, Russie, Norvège et Algérie.

A ce dernier voeu pieu, Poutine a déjà répondu, c’est lui qui entend parler d’une seule voix à l’Europe en détenant toutes les clés du problème. A bon entendeur, salut !!!


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