Iran : renaissance d’une nation ?

par Yves GILLIS
lundi 26 mars 2007

L’Iran se limite-t-il à l’image qu’en donnent aujourd’hui les dérapages de son président, Ahmadinedjad, la violence de la révolution islamique de 79, ou le régime répressif des dernières années du Shah d’Iran ?

Arrêt sur image : c’était en 1971, dans les ruines mythiques de Persépolis ; Mohammed Réza Palhévi organisait des célébrations somptuaires pour saluer les vingt-cinq siècles d’existence de son pays.

Vingt-cinq siècles d’une civilisation que les inévitables aléas de l’Histoire ne sont pas parvenus à anéantir.

Parmi les éléments les plus marquants : le personnage fondateur de Zarathoustra, prophète d’une religion aux multiples divinités, le mazdéisme, qu’il modifiera tant et si bien qu’elle aboutira à un quasi-monothéisme

Et puis la vocation impériale de l’Iran, maintes fois combattue, maintes fois réaffirmée : dès le VIe siècle avant Jésus-Christ et pendant treize siècles, sa domination s’étend jusqu’à la Turquie et la Libye à l’ouest, jusqu’à l’Indus à l’est.

634 : c’est le début de la conquête arabe ; certes, les Iraniens se convertiront à l’Islam, mais ils choisiront la dissidence : face aux sunnites triomphants, l’Iran est le seul Etat chiite et 90% des musulmans chiites sont iraniens !

Et si l’Iranien adopte l’alphabet arabe, la langue, elle, reste le persan.

Plusieurs siècles et quelques invasions plus tard, rien n’a pu atténuer ce fort sentiment d’orgueil national, résultat d’une politique de centralisation qui date de la période impériale et qui a su fédérer une mosaïque de populations des plus hétérogènes.

Un Etat fort qui met en œuvre, dès 1850, un programme d’éducation, construit des routes, le télégraphe, un système postal.

Un Etat doté d’une constitution en 1905, d’un Parlement en 1906. Et c’est la mobilisation populaire qui fera échouer alors le projet des Russes et des Anglais de mettre le pays sous tutelle.

En 1921, un nationaliste, Reza Khan, prend le pouvoir et s’installe sur le trône ; il poursuivra la modernisation du pays tant au niveau matériel qu’institutionnel.

Une œuvre reprise, en 1941, par son fils, Mohamed Reza Pahlévi, dernier Shah d’Iran ; mais ses dérives totalitaires et repressives et sa politique d’occidentalisation à outrance le rendent très impopulaire et ouvrent la voie, en 1979, à l’Ayatollah Khomeini qui déclenche la révolution islamique,et instaure une véritable théocratie parlementaire.

Un parcours historique que l’universitaire Henry Corbin résume ainsi : "De tous les pays devenus terre d’Islam, l’Iran apparaît comme le seul qui ait conservé présente à sa conscience l’histoire de son passé".

En d’autres termes, derrière les provocations et les menaces du président iranien, ce passé pourrait expliquer la volonté de l’Iran d’être reconnu comme une puissance régionale, leader du monde musulman.

Outre qu’elle protègerait le pays encerclé par la présence militaire des Etats-Unis, la bombe atomique serait le moyen de s’asseoir à la table des Grands ; et les menaces envers Israël, une provocation destinée à unir les musulmans dans leur diversité ; une technique qui fonctionne si l’on en croit le récent sondage effectué par la BBC et qui révèle l’image positive de l’Iran chiite dans les populations sunnites, réunies dans un élan de fierté musulmane.


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