Israël, 70 ans

par Buquoysky
vendredi 18 mai 2018

Aujourd’hui, après 70 ans, loin des formidables kibboutz qui ne représentent plus qu’un folklore muséal, l’avenir d’Israël pose question. Quel est l’avenir d’un peuple dont la culture est masquée par sa sécurité au détriment des autres ?

Un peuple meurtri, pourchassé, plein d'espoirs, s'est trouvé ou retrouvé, réapproprié une terre. Définir les termes exacts pour évoquer l'histoire d'Israël est un exercice d'équilibriste. Chaque mot rend des comptes et fait vaciller celui qui suit. Le massacre ignoble, la douleur provoquée par nos prédécesseurs ou certains d'entre eux en tant qu'européen semble nous condamner à devoir nous incliner devant l'horreur inconcevable perpétrée pour en porter le poids dans un silence imposé.

D'une certaine façon, avoir un avis sur le destin d'Israël nous est interdit, puisqu'en tant qu'européens nous représentons la responsabilité de son abîme historique au travers de parents que nous avons à peine connus. Nous ne pouvons pas comprendre donc nous ne pouvons pas juger . Comment se fait-il que vous ayez le regard porté sur nous alors que d'autres meurent et en plus grand nombre ailleurs dans le monde ? La réponse est aussi cruelle que simple. Si la cohésion entre européen et juifs a été extrêmement meurtrie par la passé, nous avons partagé et partageons encore une culture, une langue, une histoire des coutumes, une proximité qui nous lient. La politique actuelle d'Israël fait ainsi vaciller nos fondamentaux car, de près ou de loin nous nous identifions à cette culture, à ces européens qui ont migré au Moyen-Orient. Et ce reflet nous effraie car il semble pouvoir réveiller ce que nous ne voulions plus jamais voir chez nous même. Mais surtout, nul part dans le monde un peuple n'a eu aussi longtemps le contrôle d'un autre. Depuis la Shoah, nous n'avons pas souvenir d'une telle volonté de déshumaniser un peuple. Pire, nous n'avons pas souvenir qu’un peuple ait essayé d’enlever toute légitimité à l'existence et l’appartenance même d'un autre peuple.

Lors de l’apogée du fascisme dans l'enfer européen les juifs avaient été désignés et marqués par ce qui faisait leur unité, leur culture, leur religion : Juifs. Cette étoile, au-delà de la douleur, renforça cette cohésion, cette identité, jusqu'à la porter sur le drapeau de ce qui deviendra l'état providentiel des Juifs. Aujourd'hui on refuse aux palestiniens la notion même d'être ce qu'ils sont, de ce qu'ils étaient, de ce qu'ils seront. Comme s'ils n'étaient que des opportunistes, des animaux ou même des parasites dominés par une sombre influence qui leur empêche d'être maître de leur destin : eux-mêmes ou l’ombre d’eux-mêmes.

Aujourd’hui Israël a 70 ans. Et les passions se déchaînent et se déchirent.

Après l’intense aspect religieux du sujet, c’est aussi cette attente impossible que nous, européens, exigeons d’Israël qui attise nos émotions. Puisque ce peuple a subi l’horreur du seul et unique plan industriel d’extermination, pourquoi ne ferait-t-il pas figure d’exemplarité en matière de droits et de respect des minorités ?

Si nous ne pouvons exiger d’une personne ayant subi un trauma qu’elle soit le symbole de la compassion et de la sagesse, nous ne pouvons pas en attendre autant d’un peuple entier.

Cependant nous ne pouvons concevoir la politique diamétralement opposée que mène aujourd’hui Israël. Car la seule analyse de la tragédie subie qui semble être faite par les décideurs de ce pays, c’est qu’on ne peut supprimer physiquement tout un peuple car cela renforce son identité, qu’au contraire c’est son identité, sa cohésion et son histoire qu’il faut annihiler pour espérer le voir disparaître physiquement.

Aujourd’hui, après 70 ans, loin des formidables kibboutz qui ne représentent plus qu’un folklore muséal, l’avenir d’Israël pose question. Quel avenir pour un peuple qui s’enferme derrière des murs, qui s’isole des autres pays, n’accepte aucune critique et réprime dans le sang le droit d’un autre peuple à disposer de lui-même. Quel est l’avenir d’un pays qui dresse des barrière au lieu de construire des ponts ? Quel est l’avenir d’un peuple dont la culture est masquée par sa sécurité au détriment des autres ?

G.B.


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