L’abaissement français

par jlhuss
lundi 2 septembre 2013

Il y a la législation et puis le reste. A la suite de la note « suivisme  » de nombreux commentaires, très souvent judicieux, ont largement évoqué l’opportunité d’un débat devant la représentation nationale autour d’une éventuelle intervention de nos forces armées dans le « bourbier » Syrien. Sans revenir sur le fond, incontestablement le Président de la République, le gouvernement ne sont absolument pas obligés de demander l’aval du parlement avant une telle décision, ce qui se passe en Angleterre et aux États Unis devrait inciter l’exécutif à s’exonérer d’une simple règle formelle : Obama n’était pas obligé de convoquer un débat et un vote au congrès ; il le fait.

On pourrait d’autant plus envisager une telle attitude chez nous quand on se rappelle les éructations du PS depuis toujours contre le « pouvoir absolu » du Président de la République versus Vème République. On ira du « coup d’Etat permanent » au récent « Moi Président » sous-entendu « Normal ». Pourtant la question qui se pose aujourd’hui est la suivante : « le parlement français sera-t-il le seul à ne pas voter sur cet éventuel engagement en Syrie » ?

L’exécutif a bien convoqué une session extraordinaire du Parlement mercredi 4 septembre, mais il s’agira d’un débat sans vote. Adversaire acharné d'un vote, le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a même été jusqu'à dénoncer sur Radio J « l’esprit munichois de la droite », ce qui a donné de belles armes à l'UMP pour polémiquer. Selon lui, « chaque pays a ses propres règles. La Constitution en France prévoit que dans le cas où une intervention militaire a lieu, le Parlement est consulté ». Sur Europe-1, le ministre de l'intérieur Manuel Valls a lui martelé : « On ne change pas la Constitution en fonction des humeurs des uns et des autres, ou des événements dans le monde. L'esprit et la lettre de la Constitution doivent être respectés. »

En dépit des apparences, beaucoup de socialistes sont gênés et même troublés par cette absence de discussion collective. Evoquant la récente intervention au Mali, Arnaud Leroy, proche d’Arnaud Montebourg , déclare : « On n’est pas du tout dans le même cas que le Mali. Il n’y a pas le même degré d’urgence, la même opposition au niveau international, l’opération n’est pas du tout de la même envergure. Et quel est l’objectif ? Quelle est la base juridique ? Quels seront les effets collatéraux par rapport au Liban, à Israël, à la Turquie ? » […] « On ne peut plus se permettre de retomber dans les travers de la République de 1958. Je suis un parlementaire français, je ne veux pas dépendre d’un vote du Congrès américain, Je veux avoir la possibilité de donner mon avis. » Même certains partisans sans réserve d’une intervention militaire défendent l’idée d’un vote des parlementaires. Ainsi Patricia Adam : « la Constitution n’oblige pas à un vote, mais ne l’interdit pas non plus » […] « nous ne sommes plus dans une situation d’urgence, donc il faut prendre le temps de la consultation. Il ne sert à rien de voter dès mercredi, ni de prendre de décisions définitives d’ailleurs, avant que les Américains ne se prononcent ».

Il est clair que si le Congrès Américain vote contre l’engagement en Syrie, la France n’ira pas seule. Il est donc assez troublant que notre position soit d’ores et déjà arrêtée sans débat ni vote et finalement suspendue à un vote des parlementaires américains. On n’aura jamais fait plus dans le suivisme absolu et aveugle. Il aura fallu attendre un socialiste à la tête de l’État pour connaître un tel abaissement : une souveraineté confiée à des parlementaires étrangers ; in fine c’est bien de cela dont il s’agit.

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