L’Allemagne est tout sauf un modèle !

par Laurent Herblay
samedi 31 décembre 2016

Comme d’autres, cela fait longtemps que je dénonce les illusions du modèle Allemand dont certains veulent s’inspirer, comme le candidat que les Républicains se sont donnés. Coup sur coup, deux nouvelles sont venues nous en rappeler les limites : un salarié sur 4 y a un bas salaire (contre un sur dix en France) et un rapport sur la pauvreté y aurait été censuré par le gouvernement.

 

Allemagne à plusieurs vitesses dans Europe à plusieurs vitesses
 
C’est en partie le contrecoup des lois Schröder tant vantées par les ultralibéraux, et qui ont largement inspiré les choix économiques de Hollande, tant pour la baisse de la fiscalité sur le travail au seul bénéfice des entreprises que pour la déconstruction du droit du travail. Déjà, il faut rappeler que la compétitivité du pays à l’entrée dans l’euro a été défendue par une baisse de 20% des bas salaires de 2000 à 2010 (contre une baisse de 2,5% pour le salaire moyen) avec des millions de mini-jobs à temps partiel payés quelques centaines d’euros par mois. Résultat, la pauvreté ne cesse de progresser, touchant plus de 15% de la population, plus encore que dans notre pays par exemple.
 
Et c’est justement le rapport publié tous les quatre ans sur la pauvreté qui a créé la polémique outre-Rhin, après ce qui a été vu comme une tentative de censure du gouvernement. La presse Allemande a fait le parallèle entre les 16 millions de pauvres qui ne possèdent rien, et l’augmentation de 30% du nombre de millionnaires. Et les chercheurs ont aussi étudié le lien entre l’exercice du vote, la pauvreté et l’influence sur les politiques publiques : ils concluent que tous les partis se désintéressent des pauvres, qui votent moins et que « les décisions prises favorisent les plus aisés  ». C’est la suppression de cette partie-là qui a provoqué un scandale, un quotidien parlant d’effacement des pauvres.
 
Une autre étude montre que quand 22,5% des salariés ont un bas salaire en Allemagne, ce n’est le cas que de 8,8% des salariés en France (9,4% en Italie ou 2,6% en Suède). Est considéré comme un bas salaire un salaire inférieur à deux tiers du salaire médian (15,7 euros en Allemagne, contre 14,9 en France). L’absence de SMIC a donc clairement un effet profondément dépressif sur les salaires. On constate aussi que Berlin se cale sur le mode de fonctionnement anglo-saxon, avant un taux de bas salaires proche de ceux de Londres, Bucarest ou Varsovie. Mais il faut aussi noter que le salaire médian n’est que de 2 euros en Roumanie et 1,7 euros en Bulgarie, rendant dangereuse la course à la compétitivité.
 

 

Bref, l’Allemagne n’est un modèle que de déclassement social pour un pays qui se vantait d’être un pays de classes moyennes. Pire encore, son succès tient aussi à une démographie en décalage (20% de naissances de moins qu’en France avec 25% d’habitants de plus) et plus encore des excédents commerciaux, facilités par l’euro, et dont la non reproductibilité démontre le caractère économiquement prédateur.
 

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