L’annulation de la dette du tiers-monde toujours d’actualité
par Phileas
jeudi 8 mars 2007
En janvier dernier, à Nairobi au Kenya, s’est déroulée la septième édition du Forum social mondial. Espace de construction d’alternatives à la globalisation néolibérale, les enjeux liés à ce FSM étaient aussi nombreux qu’importants. Pour la première fois en Afrique, il s’agissait avant tout d’élargir l’enracinement du mouvement altermondialiste sur le continent le plus touché par les politiques néolibérales.
Depuis des décennies, il est question dans beaucoup de rencontres occidentales (G8, Davos) de l’effacement de la dette du tiers-monde sans que celui-ci n’ait eu lieu de façon efficace. La situation financière des pays surendettés, surtout en Afrique, est devenue intenable et est la proie de récupérations islamistes et dictatoriales de toute nature dès lors que le tissu social et économique d’un pays se trouve broyé par une globalisation néolibérale qui fait la part belle aux pays asiatiques
Dans un temps où des pays-continents pèsent de plus en plus sur les enjeux économiques à venir, il me semble que l’Europe et en premier lieu la France devraient reprendre l’initiative de défendre un certain nombre de pays au lieu d’y entretenir des guérillas claniques qui aboutissent toujours aux désordres et aux constitutions de nouvelles alliances politiques douteuses.
Depuis trente ans, la France, demande à ses partenaires occidentaux d’assurer un cours stable et rémunérateur pour les matières premières minérales et agricoles qui sont les ressources principales du tiers-monde. Mais les Etats-Unis et la Grande-Bretagne se sont toujours opposés à une véritable organisation des marchés. Quand un pays ne peut plus faire face à ses échéances, le Fonds monétaire international (FMI) est sollicité. Il envoie des experts qui mettent sur la table un programme de redressement financier, inspiré du libéralisme pur et dur du XIXe. Ce programme tient en trois points :
1/ Baisse sensible du pouvoir d’achat des salaires dont le montant ne suit que de très loin la hausse vertigineuse des prix.
2/ Baisse des deux tiers des importations : On ne garde que les achats d’énergie et d’alimentation. Dans les pays africains privés d’industrie, on ne trouve plus alors que les produits facturés d’usage courant. On constate une pénurie des matières premières, des produits semi-finis, de biens d’équipement et de pièces de rechange, ce qui aboutit à cette absurdité de rendre impossibles les exportations qui procureraient des devises.
3/ Baisse du déficit budgétaire : Dans les pays où la pauvreté est la plus grande, on supprime les subventions de l’Etat qui permettent aux plus pauvres d’acheter la nourriture de base au-dessous du prix de revient - ce qui entraîne une forte hausse du coût de la vie ; dans les pays les plus avancés, on doit renoncer à tous les travaux d’équipements qui rendraient possible le progrès.
Les conséquences premières sont évidentes : le chômage et la misère s’accroissent et, dans certains cas, réapparaît la famine. Partout grondent le mécontentement et la colère.
La conséquence seconde est politique. S’il est vrai que nous assistons, de la part des islamistes et de leurs alliés du proche et du Moyen-Orient, à une formidable tentation de déstabilisation de l’Occident, nous leur donnons une prise inattendue : nous renforçons les chances des mouvements subversifs qui trouveront chez certains pays du Golfe argent et armes.
Nous avons une raison plus égoïste de prendre une initiative. Vous êtes-vous demandé pourquoi nos banques occidentales continuent à prêter de l’argent à des pays qu’elles savent déjà insolvables ? Tout simplement parce que, si leur carence est proclamée, les établissements financiers devraient porter au passif de leurs bilans des « provisions pour créances irrécouvrables ». Leurs clients découvriraient alors que les banques sont incapables de rembourser l’argent des dépôts qu’ils ont reçus. Et ce serait une panique financière comme il n’y en a jamais eu dans l’histoire.
Tous les financiers qui ont une activité internationale vous diront que le surendettement du tiers-monde est un problème aussi préoccupant que les problèmes écologiques qui demanderont des mutations industrielles rapides. Avec une préoccupation supplémentaire, si on continue de ne rien faire pour les pays en voie de développement, plusieurs d’entre eux seront tentés par les sirènes islamistes.