L’avenir du régime égyptien : Quel impact sur le processus de paix au Proche-Orient ?

par Mohamed BOUHOUCH
mardi 1er février 2011

 Après la Tunisie c’est aujourd’hui au tour de l’Egypte de se soulever. Depuis le mercredi 26 janvier 2011 la jeunesse égyptienne est sortie de sa réserve, décidant ainsi de braver le destin et d’affronter avec courage et détermination les forces d’une administration dictatoriale qui l’étouffe depuis trente ans. Certes, l’institution militaire égyptienne ne sera pas aussi facile à abattre que le régime tunisien. Mais y a-t-il au monde une force capable de venir à bout et d’anéantir éternellement la volonté d’un peuple et de le priver de ses droits les plus élémentaires ?

 Les régimes institués par Sadate et son successeur Moubarak sont-ils réellement une continuité de cette révolution historique menée après l’abolition en juillet 1952 de la royauté par tout un peuple enthousiaste, engagé derrière le Grand Jamal Abdennacer ? Non ! Le peuple égyptien qui compte aujourd’hui plus de quatre vingt millions d’habitants a été frustré, muselé et soumis à la domination d’un régime militaire appuyé sur une administration collaborante corrompue. C’est là une vérité que personne ne peut plus nier. 

L’EGYPTE VIT AUJOURD’HUI UN TOURNANT HISTORIQUE.

 Il est certain que cette révolte égyptienne pour ne pas dire REVOLUTION constitue un point de non retour. Que les autorités parviennent ou non à rétablir l’ordre, les Egyptiens, toutes couches confondues, se projettent déjà sur l’avenir et rêvent à ce que sera le pays de l’après Moubarak. L’actuel président et son gouvernement, n’ont par conséquent, aucune chance de perdurer.

 L’Egypte a encore beaucoup de choses à faire sur les plans économique et social. Le chômage et la misère restent toujours dominants dans plusieurs régions du pays et même dans la capitale Le Caire. Pourtant l’élite égyptienne est parmi les plus développées du monde arabe sur le plan intellectuel. Le potentiel économique du pays (canal de Suez, tourisme, agriculture, industrie, une main d’œuvre abondante et pas chère, etc.…) est assez important pour permettre un décollage voire un développement à la japonaise.

  Plusieurs études et documents montrent malheureusement que plus de la moitié des habitants de ce pays du Nil vivent avec moins de deux dollars par jour. Néanmoins il convient de préciser que la colère des Egyptiens n’est pas motivée uniquement par les conditions précaires de leur vie quotidienne mais également et surtout par le rejet d’une politique gouvernementale stupidement inféodée dit-on aux USA. L’opinion de la jeunesse arabe est actuellement partagée entre des courants de gauche et de nationalisme pan arabique, hérités du Nassérisme et des idéologies islamistes nées des frustrations économiques et sociales d’une grande partie de la population marginalisée et exclue de la vie politique. D’où, pour les deux tendances, une certaine hostilité à l’égard des Etats-Unis, accusés d’être les protecteurs du régime actuel.

 Pour Washington l’Egypte est un Etat pivot pour la stabilité de la région. Mais contrairement à ce que Obama et Hillary Clinton nous laissent croire, il ne s’agit nullement aujourd’hui de faire des réformes ou d’octroyer quelques « libertés supplémentaires » pour sauver cet allié stratégique, mais d’opérer plutôt un changement intégral du régime et de la politique suivie jusqu’à présent sur le plan régional notamment.

 QUELLE PERSPECTIVE 

POUR LA REGION PROCHE-ORIENTALE ? 

 Depuis la visite de Sadate en Israël en 1978 et le traité signé à Washington le 26 mars 1979 entre les deux pays, l’Egypte est devenue une pièce maîtresse dans le processus de paix du Proche orient. La SORTIE du Caire de ce conflit régional a terriblement affaibli le camp arabe. Rappelons à ce sujet que le pays des Pyramides est resté plusieurs années exclu de la ligue des Etats arabes.

 La chute du régime Moubarak entraînerait indubitablement une volte face de l’Egypte quant à ses rapports avec Israël et l’Amérique. Selon la plupart des observateurs la nouvelle équipe dirigeante dénoncerait dès les premiers jours les traités et accorts passés avec l’Etat hébreu par l’ancien régime. La jeunesse arabe n’a en effet jamais pardonné aux dirigeants d’avoir trahi la cause palestinienne en établissant des rapports diplomatiques avec Israël. Ce dernier pays risque donc de perdre un allié important et se retrouver à nouveau pris en étau entre la Syrie, la nouvelle Egypte et le Hisboullah du Liban lequel n’est autre qu’un camp avancé de l’Iran des Mollahs. Quand on pense que les autres pays arabes de la région (Jordanie et pays du Golf risqueraient à leur tour de réviser leur attitude vis-à-vis d’Israël), quand on sait que l’Egypte a une frontière avec Gaza qui permettrait tous les genres de trafic (d’armes notamment), on n’hésiterait pas une seconde à dire que le gouvernement de Netannyahou se trouve désormais dans une situation bien délicate. 

 Les autorités de Tel Avive regretteraient-elles à l’avenir d’avoir trop tergiversé et exagéré dans leurs tractations pour la conclusion d’un accord définitif avec les Palestiniens à un moment où toutes les conditions leur étaient favorables ? Israël a-t-il loupé le coche ? Les Etats-Unis sont-ils encore en mesure de dominer la situation ? Seul l’avenir nous le dira.

 Le monde entier suivra avec intérêt et circonspection l’évolution de la situation dans cette région multi religieuse, connue depuis l’éternité pour être une zone de trouble et de perturbations incessantes. 


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