L’échec de la Pax Americana : Comment contrer la doctrine impérialiste et les provocations de l’Oncle Sam

par jean-jacques rousseau
vendredi 14 mars 2014

Avec la crise en Ukraine se révèle un nouvel épisode d'une stratégie de long terme des États-Unis d'Amérique. La diplomatie de la Fédération de Russie clame haut et fort un cas d'ingérence des services de la puissance occidentale et des menées impérialistes visant à déstabiliser la région. Cela n'étonne plus guère, quelques journalistes autorisés essaient encore de nous persuader du contraire mais l'enthousiasme n'y est plus, il y a trop longtemps déjà que se dessine ce projet d'isolement et d'encerclement de la Russie. Les EUA prennent garde d'avancer à découvert pour éviter une confrontation directe. Ce mouvement se fait donc par l'intermédiaire de l'Alliance militaire OTAN qui pousse ses pions dociles et de l'Union européenne qui étale vers l'Est sa zone d'influence. Cette opération si bien coordonnée ne trompe plus le public, il peut y décerner la mise en œuvre d'une idéologie impérialiste plus ancienne que la « guerre froide » ou l'expansionnisme allemand à la recherche d'un Lebensraum. Il s'agit en réalité d'une vieille lubie, l'idéal utopique d'une « destinée manifeste » selon lequel une nation prévaut sur toutes les autres pour la domination du monde : héritage confus de l'Empire colonial britannique ou de l'Empire germanique de sinistre mémoire qui tenait ses titres et tirait son modèle de l'antique Empire romain.

Qu'il soit bien clair que notre intention n'est pas de jeter le discrédit sur la jeune nation étasunienne. Il n'est pas ici question de faire de l'anti-américanisme. Au contraire il faut saluer les nombreuses contributions sur les plans historique, culturel ou scientifique qui témoignent d'une générosité fraternelle et d'un génie humaniste. L'intervention des États-Unis dans les conflits mondiaux tels que la Première et Seconde Guerre Mondiale démontre un souci exemplaire de respect du cadre juridique du droit international et la manifestation d'un idéal de la paix mondiale dans la liberté et l'équité. Nous ferons donc cette distinction : entre une nation qui respecte l'esprit du droit international notamment le principe d'égalité souveraine des nations inscrit dans art. 2.1 de la Charte ONU [1] ; et une puissance saisie d'un délire de suprématie, d'une sorte d'hubris [2] ou présomption de supériorité qui s’avère dangereuse aussi bien pour elle-même que pour les autres et dont l'issue ne peut être que fatale.
Nous aurions bien voulu que cette pax américana soit réelle et profitable à tous ! Mais nous sommes loin de cette époque crédule quand le GI Joe était notre héro, Hollywood et Coca-cola les promesses d'un monde meilleur. Les masques tombent et la comédie n'a que trop duré. Nous savons désormais que si Empire il y a, il ne connaît nulle paix puisque le langage de la puissance c'est la provocation, c'est la terreur, c'est la guerre contre (et entre) tous ceux qui osent contrarier ce projet délirant. Mais le drame de l'Empire est de vaciller dans le vertige de sa propre hégémonie, d'opprimer les peuples par la tyrannie. Ainsi pour ne pas se retrouver écraser dans sa décadence vers l'obscurantisme féodal : il faut comprendre la doctrine impériale, ses méthodes et déjouer son système. Il en va de l'avenir de la civilisation et de la liberté des peuples.
Pour ces raisons, il paraît utile dans un premier temps d'identifier les points clés du discours impérialiste et comment il accompagne par une propagande suspecte les menées commerciales et militaires à l'encontre des peuples mal-préparés à en contrer les influences nocives. Dans un deuxième temps présenter les éléments d'une stratégie faisant obstacle et échec à l'agression impérialiste contre le droit des peuples, la coopération loyale entre eux et la paix.

Petite généalogie de l'impérialisme

« Généralement, la création d'un empire implique une ou plusieurs conquêtes militaires considérées dans les meilleurs des cas comme une unification et un destin (Haute et Basse Égypte, sept royaumes de Chine). […] Selon Moses Finley4, est empire tout « exercice durable par un État d'une autorité, d'un pouvoir, ou d'un contrôle sur un ou plusieurs États, communautés ou peuples. ». À cette conception très large s'oppose celle de Jean Tulard. pour lequel n'est empire que ce qui possède les cinq traits suivants :

L’Histoire de l'Empire romain est un cas d'école concernant la désorganisation de l'administration de l’État sous l'effet d'une politique expansionniste et des intérêts contradictoires d'une puissante oligarchie. La subversion de la République romaine marque l'avènement de la Rome impériale. De vastes territoires sont confiés à l'administration de quelques hommes soutenus par un Sénat corrompu. Les intérêts de l'Empire semblent alors se confondre avec les intérêts de quelques familles patriciennes. Jusqu'au moment critique où l'appauvrissement massif des citoyens dû à la concurrence d'une main-d’œuvre servile et les importations des provinces déstabilise l'équilibre budgétaire. Alors les familles enrichies refusant de se soumettre au devoir fiscal, s'installent loin des villes et des percepteurs de l’impôt dans de somptueuses villas rurales. Les ressources fiscales se tarissant alors que les dépenses civiles et militaires augmentent, l'Empire s'effondre dans l'incapacité de pourvoir à l'intérêt général des citoyens romains ou des peuples soumis. [4]
L’Église catholique [5] semble conserver la flamme de l'idéal impérialiste puisqu'en Noël de l'an 800 Carolus Magnus sera fait empereur romain avec le soutien du haut-clergé.
De l'an 962 à l'an 1806 le Saint Empire Romain Germanique [6] étendra sa domination sur l'Europe avec la prétention de sauvegarder la paix dans ses États, cependant sans jamais pouvoir mettre un terme à l'indépendance d'une France souveraine, ni freiner l'émergence du sentiment national en Europe.
Ce sont les tentatives de restauration impériale germanique (2nd et 3ieme Reich) qui ont causé les conflits mondiaux de la 1ere et 2nd Guerre mondiale. Conflits à l'issue desquels sera reconnue la responsabilité des forces impériales germaniques dans l'agression et la violation du droit des peuples.
Les conquêtes coloniales de l'Angleterre depuis le règne d’Élisabeth I lui font entrevoir la perspective d'un Empire maritime par le moyen d'une flotte militaire et commerciale sillonnant les mers autour du globe. Depuis la guerre d'indépendance des États-Unis d'Amérique et un large mouvement de décolonisation qui privera la Couronne du territoire Indien - son plus beau joyau - cette prétention sera revue à la baisse. Le système colonial britannique cédera alors la place à l'institution du CommonWealth. (Bien-être commun) favorisant les liens commerciaux [7] et les valeurs libérales [8].
La France elle-même n'est pas en reste dans l'aventure coloniale. Celle-ci se soldera tragiquement par deux guerres coloniales qui n'oseront pas dire leur nom en Indochine et en Algérie. L'initiative et le pouvoir de nuisance des milieux financiers coloniaux et de leurs amis à la Chambre des députés ou dans la Presse dans la responsabilité des opérations de pacification et l'élimination des obstacles politiques [9] sont guère douteux.
On se dit que ce bilan désastreux des différentes expériences impériales ait pu être utile et donner une leçon édifiante à la nation américaine. Ce d'autant plus qu'elle a eut à subir l'oppression puis une épouvantable répression de la puissance britannique dès les premiers jours de son indépendance. Il n'en parait rien. Au contraire les EUA après une brève période isolationniste n'ont eut de cesse de courir après cette prétention à l'hégémonie commerciale et consacrent l'essentiel du budget de la Fédération à entretenir une force militaire démesurée, pendant qu'une immense partie de son peuple connaît la misère et une féroce répression policière.
Comment est-on arrivé jusqu'à une telle aberration ?

La subversion intérieure

Il est curieux qu'un pays qui se vante d'abriter les meilleures universités au monde puisse consacrer ses facultés de raisonnement à des objectifs mercantiles ou agressifs sans prendre le recul d'une réflexion cohérente et véritablement utile. M. Barrack Obama reconnu comme brillant juriste de l'éminente université d'Havard énonce en tant que Président des États-Unis des contre-vérités si grossières dans ses déclarations [10] sur le droit international qu'on se demande s'il a vraiment étudié la jurisprudence ou obtenu ses diplômes autrement que par complaisance.


Ce paradoxe culturel laisse supposer une profonde distorsion de la société étasunienne : le chevauchement tectonique de deux mondes l'un spirituel et humaniste, l'autre calculateur et prisonnier de stratégies industrielles, politiques et militaires de court terme. Tout se passe comme si différents éléments aux intérêts irréductibles se partageaient en secret mais sans pitié le pouvoir sous le couvert d'une fiction juridique démocratique et républicaine. 
Ceci conduit à formuler une hypothèse globale du dysfonctionnement du système US depuis l’intérieur de son corpus doctrinaire et politique. Il s'agit de mettre en évidence la subversion d'une oligarchie corporatiste au sein de l'institution politique américaine comme préalable d'une stratégie de suprématie coloniale.
« WE the people » : ces trois premiers mots expriment l'imposture fondamentale d'une constitution rédigée par une poignée de propriétaires d'esclaves et de gros négociants. Cette fiction juridique de la représentation politique forme la clé de voûte d'une doctrine inspirée par les écrits du pasteur John Locke selon lequel le pouvoir doit être détenu par les propriétaires et les lois écrites ou le pouvoir judiciaire mandaté pour défendre leurs droits naturels.
« La raison pour laquelle les hommes entrent en société, c'est qu'ils veulent sauvegarder leur propriété ; la fin qu'ils se proposent lorsqu'ils choisissent et habilitent un pouvoir législatif, c'est de faire adopter des lois et établir des règles, qui servent de protection et de clôture à la propriété dans la société entière [...] » [11]
Ainsi dès l'origine ce système détourne habilement la souveraineté démocratique au profit d'une oligarchie. L'essentiel du pouvoir politique est alors consacré à la protection ses droits patrimoniaux.
Cette stratégie de prédation intérieure s'exercera d'abord contre les peuples natifs américains. La négation de leurs droits par la trahison des traités successifs et une guerre coloniale réduiront ces peuples à la misère et au bord de l'extinction. Ensuite de gros propriétaires fonciers chasseront les petits agriculteurs des terres fertiles pour constituer de vastes exploitations. A l'époque industrielle cette guerre pour la suprématie opposera l'oligarchie nordiste à l'aristocratie sudiste sur la question de l’esclavage. Dès lors on assiste au cours de « l'age doré » (gilded age) [12] à l'émergence d'une caste que l'on désignera sous le terme de « robber barons » [13] (barons voleurs). Ces puissants affairistes profitant des opportunités de la guerre civile, des innovations techniques et scientifiques prendront des positions de monopole [14] dans tous les secteurs économiques et s’installeront durablement aux positions clés du système politique. [15] On observe depuis cette époque la mainmise sur les organes de presse, les universités privées [16] et même sur les milieux syndicaux [17].
Cette réalité d'une prise du pouvoir et la confiscation de la légalité et des ressources par l'oligarchie ne nous étonnerait pas si nous n'avions été longtemps égarés dans notre jugement par ce mythe d'une démocratie idéale. Dans son ouvrage «  De la démocratie en Amérique » qui a profondément influencé l'opinion française, Alexis de Tocqueville se déclare étonné par «  l’égalité presque complète des conditions  » chez les Américains. [18] Rien de plus éloigné de la doctrine étasunienne que ce principe et cette pratique de l'égalité. L'élite n'y a pas lu les ouvrages de François Fénélon sur l'éducation du prince chrétien ou n'en a pu rien comprendre. « L'ambition et l'avarice des hommes sont les seules sources de leur malheur, les hommes veulent tout avoir, et ils se rendent malheureux par le désir du superflu ; s'ils voulaient vivre simplement et se contenter de satisfaire aux vrais besoins, on verrait partout l'abondance, la joie, la paix et l'union. » [19] L'idéal chrétien d'humble égalité, de compassion et de partage s'est trouvé dépassé par une conception - pourtant archaïque - basée sur la loi du talion, celle du plus fort dans une course à la respectabilité et la puissance sociale qui consacre l'inégalité absolue des conditions. A une majorité de miséreux le travail, le chômage ou la prison. A une minorité de riches le luxe, l'impunité et les honneurs de la Nation.
Mais ce qui ressort de cette subversion intérieure et de la trahison de l'idéal démocratique c'est que la notion d'intérêt commun ou du bien public a été complètement occultée par la croyance que l'intérêt particulier de quelques-uns suffisait à pourvoir l'intérêt général. [20] L’État comme régulateur est pris a contre-pied par la doctrine libérale du « Let him pass, let him go ». Ce « laisser faire, laisser passer » tend au contraire à une dérégulation favorable aux intérêts et profits de l'oligarchie [21]. La constitution de monopoles industriels et commerciaux, la hausse des prix et la baisse critique des salaires provoque non seulement la faillite des petits producteurs mais surtout un blocage de la circulation monétaire et du système économique tel qu'on obtient à la fin d'une partie de Monopoly.
Les crises économiques surgissent aux États-Unis sur un mode cyclique. L'histoire du Magicien d'Oz illustre la dépression entre 1883 et 1897 [22]

En 1890 par une loi anti-trust [23] le gouvernement tente de remédier à la question des monopoles. Du fait de ses insuffisances et son contournement par les « barons-voleurs » ; une autre loi anti-trust [24] est mise en œuvre en 1914. En 1929 la Grande Dépression, largement aggravé par la politique de « laisser-faire » de Herber Hoover, oblige les nouvelles autorités à prendre d'autres mesures drastiques [25]
Lorsque John Keynes rencontre Roosevelt l'entrevue se passe mal nous dit-on [26]. Si pour Keynes, imprégné d'une conception de Public service britannique, le nouveau président ne comprend rien à l'économie, il faut admettre que l'économiste n'a rien compris au système politique qui a porté Franklin Roosevelt à la présidence. Il n'a pas compris le rôle de commissaire-priseur d'une foire d'empoigne, le statu précaire de valet de chiens dangereux [27] du Président des États-Unis. Toute loi publique, toute réforme d'intérêt général doit offrit des lots coûteux, des concessions lucratives aux corporations et créanciers qui dominent les institutions.
Il en résulte que l'intérêt général n'est pas défendu correctement mais de manière toujours exceptionnelle et marginale en temps de crise ou de blocage des processus économiques. La règle qui détermine l'orientation des politiques nationales est la prévalence des intérêts privés. Les lois antitrust ne sont pas édictées pour restaurer une saine coopération économique mais garantir une concurrence acharnée où les puissants sont sûrs au final de l'emporter au besoin en les contournant grâce à des subtilités juridiques.

La subversion extérieure

L'aventure coloniale des États-Unis est initiée par des diplomates qui sont en réalité les représentants des intérêts de puissantes corporations représentées au Sénat. En 1844 « Caleb Cushing, un avocat du Massachusetts est envoyé par le président John Tyler sous les pressions des négociants américains préoccupés par la dominance britannique dans le commerce avec la Chine. » [28] C'est le point de départ des traités inégaux[[Traités inégaux US : Chine 1844 Traité de Wanghia, 1858 Traité de Tianjin, 1901 Protocole de paix Boxer Japon 1854 Convention de Kanagawa, 1858 Traités Ansei & Traité d'Amitié et de Commerce (Traité Harris) Corée 1882 Traité États-Unis-Corée de 1882]] conclus avec les nations orientales qui - sous la dénomination trompeuse de Traité d'Amitié et de Commerce - imposent des conditions inacceptables et ruineuses. Partout en Amérique latine ou en Extrême-orient les concessions portuaires et les routes maritimes seront protégées par une flotte militaire et les troupes de marine [29]. Cette force militaire interviendra sans délai pour contraindre les gouvernements récalcitrants au respect des traités et obligations internationales selon la formule consacrée par les juristes de l'Empire britannique.
Le général Smedley Butler [30], un des plus valeureux soldats des US marines, écrira à la fin de sa carrière : "J’ai effectué 33 ans et 4 mois de service actif, et durant cette période, j’ai passé la plupart de mon temps en tant que gros bras pour le monde des affaires, pour Wall Street, et pour les banquiers. En bref, j’étais un racketteur, un gangster au service du capitalisme. J’ai aidé à sécuriser le Mexique, plus particulièrement la ville de Tampico, au profit des groupes pétroliers américains en 1914. J’ai aidé à faire de Haïti et de Cuba un endroit convenable pour que les hommes de la National City Bank puissent y faire des profits. J’ai aidé au viol d’une demi-douzaine de républiques d’Amérique centrale au bénéfice de Wall Street. J’ai aidé à purifier le Nicaragua au profit de la banque américaine Brown Brothers de 1902 à 1912. J’ai apporté la lumière en République Dominicaine au profit des entreprises sucrières américaines en 1916. J’ai livré le Honduras aux entreprises fruitières américaines en 1903. En Chine, en 1927, j’ai aidé à ce que l’entreprise Standard Oil fasse ses affaires en paix. […] Quand je repense à tout ça, je pourrais donner à Al Capone quelques conseils. Le mieux qu’Al Capone pouvait faire, c’était de racketter trois quartiers. Moi, j’agissais sur trois continents." [31]
Après 1949 et la proclamation de la République populaire par Mao Tsé-toung, le principal sujet de débats houleux au Sénat US sera de savoir à qui incombe la responsabilité d'avoir perdu la Chine. Mais les temps ont changé, il faut donner à cette interventionnisme militaire qui provoque l'indignation à l'intérieur du pays et à l’Étranger une justification, un habillage rhétorique et des formes acceptables. Il conviendra par exemple de donner comme alibi aux opérations militaires la lutte contre le communisme ou celui de la liberté et la démocratie... Pendant que de l'autre coté une agence de renseignement – la Central Intelligence Agency - dotée d'un réseau tentaculaire (et de fonds d'origine douteuse [32]) mènera en coulisse une stratégie globale de déstabilisation [33] selon les priorités déterminées et communiquées à l'opinion par des comités d'experts ou Think Tank [34].
La Charte des Nations-Unies impose elle-même des obligations contraignantes en faveur de la paix par le règlement pacifique des différents, des règles de droit international qui contrecarrent les initiatives subversives ou belliqueuses des États-Unis. Il s'agira soit de les ignorer, soit de les priver d'effet concret et de conséquences, soit d'en déformer l'interprétation. Une autre méthode consiste à infiltrer les organismes internationaux pour en contrôler la direction et imposer aux pays membres des programmes conformes aux intérêts des corporations US. Le Fond monétaire international et la Banque mondiale ont ainsi été les principales cibles de cette opération subversive. Au cours des années 70 le FMI a abandonné ses principes humanistes [35], l'assistance et la coopération pour imposer aux pays de voie de développement des mesures d'ouverture commerciale et normes bancaires contraires à leur situation et à leurs besoins, mais en tous points favorables aux institutions financières de Wall-Street et au pillage méthodique des multinationales sous le prétexte d'investissements. La Banque Mondiale sous l'alibi de lutte contre la pauvreté a ainsi pu réaliser la plus grande escroquerie de l'Histoire avec l'adoption - sous contrainte - d'un programme ultralibéral [36] connu sous la désignation de Consensus de Washington.
Depuis le blocage des négociations de l'OMC les représentants des États-Unis ont repris un nouveau cycle de négociations commerciales ciblant des zones économiques plutôt que les États eux-mêmes. Ces nouveaux traités commerciaux régionaux se ressemblent. Non seulement ils visent à établir des zones de libre-échange dans laquelle les sociétés multinationales ne connaîtront plus de limite à leurs activités et transactions, mais en plus, par des règles d'union douanière, d'union monétaire, etc. l'objectif final est de réaliser une intégration politique. Or ces normes et objectifs sont clairement contraires à la Charte des Nations-Unis dont les principes de bases sont la souveraineté nationale et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes (des négociations dont on peut douter de la validité puisqu'elles se font entre des entités inter-régionales sans personnalité juridique formellement reconnue en droit international et échappent au contrôle national et démocratique). Cette volonté d'union politique et d'instaurer des règles économiques ou commerciales identiques à plusieurs nations d'une prétendue Zone ou Région est directement opposée au premier principe primordial des accords d'Helsinki : « [Les États participants] respectent aussi le droit de chacun d’entre eux de choisir et de développer librement son système politique, social, économique et culturel ainsi que celui de déterminer ses lois et ses règlements. » [37] Il s'agit d'un désaveu formel de l'Alliance atlantique de 1949 (Traité OTAN) dont l'art. 2 indique : « [Les parties] s'efforceront d'éliminer toute opposition dans leurs politiques économiques internationales et encourageront la collaboration économique entre chacune d'entre elles ou entre toutes. » [38]
Outre l'implication des services US dans l'institution d'une Union Européenne dont les statuts en font un objet non identifiable, un monstre juridique au regard de la Charte des Nations-Unies, l'actualité nous apprend tous les jours les conséquences désastreuses de leur ingérence dans les affaires intérieures de nombreux États. L’Afghanistan, l'Irak, la Libye, la Syrie, l'Ukraine : autant de pays ruinés ou en passe de l'être par cette stratégie de déstabilisation globale de l'Oncle Sam. Combien de villages paisibles volatilisés, meurtris sous un tapis de bombes, par des attentats mystérieux, ensanglantés par la lutte fratricide de gangs organisés par on ne sait qui ?  
Aujourd'hui le système médiatique nous présente un nouvel ennemi : il est russe.
« Dans le cadre d’une stratégie de reflux (roll back) de la puissance russe, menée depuis la fin de la Guerre froide, les puissances occidentales affichent une méfiance endémique à l’égard d’un État désespérément perçu comme l’héritier de l’axe (communiste) du mal. Cette stratégie « anti-russe » est attestée par les tentatives régulières de cooptation des anciennes républiques de l’URSS, au moyen d’innovations politiquement orientées telles que le « Partenariat oriental » (via l’UE) ou le « Partenariat pour la paix » (via l’OTAN) et, plus récemment, « l’accord d’association » de l’UE avec l’Ukraine. » [39]
Mme Victoria Nuland [40] sous-secrétaire d’État pour l’Europe et l’Eurasie, c'est a dire représentante des intérêts de l'oligarchie US, a été surprise dans une conversation téléphonique. La voie de fait d'ingérence dans les affaires intérieures de l'Ukraine est caractérisée. [41] On voit aussi s'agiter des Sénateurs US [42], dont MacCain partisan d'une intervention militaire [43], qui poussent aux provocations un gouvernement provisoire sans légitimité qui serait mieux inspiré de se contenter d'expédier les affaires courantes.

Stopper l'Oncle Sam

Il paraît évident que les agissements d'une mouvance impérialiste, dont le but est d’imposer les intérêts d'une oligarchie prétorienne sous le couvert des institutions et de beaux principes, menacent tous les peuples du monde. 
Les initiatives visant à contrer ces menées à caractère agressif ou hégémonique des ÉUA devraient être conduites dans le cadre du droit international. Les États soucieux du respect des principes fondamentaux du droit tels que d'égalité souveraine des États, de non-ingérence dans les affaires intérieures, de règlement pacifique des différents, etc. ont la responsabilité solidaire de s'opposer à chaque cas de violation manifeste.
Outre les moyens prévus par le droit international à l'encontre de l'ingérence et l'agression, il semble qu'un vaste ensemble de parades et initiatives à l'encontre de la menace impérialiste puisse être mis en œuvre selon la finalité de rétablir l'indépendance souveraine des États, la coopération et la bonne foi dans les relations internationales.
Nous avons tenté de mettre en évidence dans ce texte les points clés de la stratégie impérialiste des « barons-voleurs » de Washington et de leurs acolytes. Ces éléments concernant leurs principes et méthodes (d'autres encore n'ont pas été développés) offrent une base de réflexion préparatoire permettant d'élaborer un programme efficace de résistance et de contre-offensive. Ceci dans le respect des droits légitimes de la Nation et du Peuple des États-Unis.
Il est de l'intérêt des autorités souveraines d'agir en faveur de l'indépendance et de l'unité nationale et de mettre un terme à toute entreprise de déstabilisation intérieure. L'émergence d'une puissance oligarchique d'orientation mondialiste, dont les intérêts sont diamétralement opposés aux principes de l'utilité publique, de la paix sociale et du développement harmonieux de la société, présente un danger critique de rupture du contrat social qui ne doit pas etre sous-évalué. L'exigence rationnelle de défense de ces principes impose la mise en oeuvre de mesures efficaces conformes aux dispositions constitutionnelles propres concernant la sécurité nationale, sans perdre de vue l'utilité d'une coopération internationale sur ces questions.

Selon cette perspective :

  1. Sur le plan culturel il s'agit de réagir à l'infiltration de la pensée impérialiste dans les médias et le système éducatif par la promotion d'une contre-culture de haut niveau, par le moyen de conférences et travaux universitaires de qualité, de débats pluralistes, de voyages d'étude, d'ouverture aux productions culturelles indépendantes, du contrôle du niveau de dépendance des médias, etc. Un dispositif de quotas et mesures restrictives de diffusion des productions impérialistes peut être mis en place. Les mouvements civils en faveur du pluralisme des médias, de la promotion de l'amitié et la coopération entre les peuples seront soutenus. 

  2. Sur le plan diplomatique ce piège de la constitution d'unions politiques favorisant l'emprise des intérêts commerciaux et financiers de l'oligarchie et orientés selon une logique d'affrontement de puissances économiques et militaires doit être déjoué. Aucun traité ne peut être conclu, ni obtenir force juridique ou effet contraignant lorsque sont négociées lois et règlements ayant prévalence sur les dispositions légales ou réglementaires nationales. Ces traités abusifs ou "inégaux" n’entraînent aucune obligation internationale légitime pouvant servir de prétexte à des sanctions ou intervention militaire. Seuls sont légitimes les traités ou textes conclus conformément aux principes et actes reconnus du droit international et sur la base de la bonne foi et du règlement pacifique des différents. Afin d'améliorer les relations internationales, l'urgence s'impose de la réhabilitation et réforme des organisations de l'ONU noyautées et dévoyées par les agents de l'impérialisme politique, commercial, industriel et militaire.

  3. Sur le plan politique le principe de libre choix et de pluralisme doit être réhabilité. Le droit de chaque nation de choisir et de développer librement son système politique, social, économique et culturel ainsi que celui de déterminer ses lois et ses règlements n'est pas négociable. Chaque Nation est héritière d'une culture, détermine ses propres valeurs et perspectives en fonction de sa situation, des contraintes et circonstances particulières. La méconnaissance de ces réalités et la volonté d'imposer un système abstrait par le biais de traités ou d'une assistance conditionnelle nuit non seulement à l'émergence d'un modèle original et novateur, mais traduit aussi une volonté de déstabilisation politique.

  4. Sur le plan économique des initiatives décisives peuvent être adoptées pour saper les points d'appuis du système financier oligarchique et restaurer les principes d'utilité publique et de coopération. L'attitude non-coopérative et oppressive des institutions internationales depuis les accords de la Jamaïque peut être mise en échec par l'organisation d'une chambre de compensation pour les paiements internationaux. Un nouveau réseau d'échanges financiers et commerciaux sur la base de la libre adhésion et de la réciprocité ouvre la possibilité d'équilibrer les comptes nationaux et la solvabilité des États. A cette fin un critique du modèle monétariste et une réflexion sur le modèle du Bancor peut être poursuivie et aboutir à des résultats satisfaisants. En parallèle des comités pluralistes d'experts universitaires auront la responsabilité d'étudier au cas par cas la situation et offrir des préconisations en matière de lutte contre la corruption, de développement économique et social, des pays en difficulté qui en feront la demande.

  5. Sur le plan social aux valeurs de compétition et de concurrence doit être substitué l'application du principe d'égalité réelle des conditions sociales au regard de l'utilité commune. Il est souhaitable de proposer un projet de nouvelle société dans laquelle l'avarice, la spoliation, la thésaurisation patrimoniale et le luxe d'une minorité sont limités par la promotion d'une large protection sociale, la gratuité de l'éducation et d'autres projets de solidarité sociale. L'expropriation pour cause d'utilité publique et la redistribution sociale doit permettre l'évolution de l’État social vers le bien-être commun et le respect de l'environnement naturel.

  6. Sur le plan de la sécurité intérieure il semble souhaitable de durcir les conditions d'exercice des réseaux de l'oligarchie impérialiste. Un dispositif de mise sous surveillance attentive, l'obligation de déclaration et l'exclusion des emplois publics de leurs agents selon le régime et la qualification juridique en vigueur permetrait de limiter et neutraliser les entreprises de déstabilisation.

A cette "stratégie du chaos" - par la crise économique et la guerre - organisée par les agents de l'impérialisme US il est prudent d'envisager une alternative conforme au droit international et au progrès de l'humanité.


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