L’intervention militaire en Irak est une nouvelle faute des Etats-Unis

par Laurent Herblay
lundi 11 août 2014

Devant la guerre civile qui déchire de manière horrible l’Irak, les Etats-Unis ont déclenché des frappes militaires contre les forces islamistes. Même s’il est impossible de ne pas être sensible au sort des irakiens persécutés pour leur foi ou leur choix politique, une telle intevention est une nouvelle faute.

Une troisième faute
 
Bien évidemment, les partisans d’une intervention ne manqueront d’ironiser sur ces souverainistes qui se réclament du Général de Gaulle et seraient si frileux. Mais je ne suis pas un pacifiste irréductible. Je pense qu’en 1938 ou en 1939, devant les avancées de l’Allemagne nazie, il aurait fallu respecter nos engagements et prendre les armes, ce qui aurait sans doute éviter la piteuse défaite de 1940. Mais pour la troisième fois en Irak, les Etats-Unis interviennent militairement et il s’agit à nouveau d’une grave faute. Bien sûr, il faut apporter du soutien aux réfugiés qui sont en Turquie et l’action de la France dans ce domaine est positive, mais c’est une erreur de soutenir les interventions des Etats-Unis.
 
En effet, il me semble que Washington intervient en dehors de tout cadre international, en fonction de son bon vouloir. Les Etats-Unis continuent à agir comme s’ils étaient les maîtres du monde, qui n’auraient pas à se soumettre aux règles internationales qu’ils imposent pourtant aux autres pays. Comme on le voit en Irak, ceci est complètement contre-productif. La situation dans ce pays que les Etats-Unis ont envahi en 1991 et en 2003 (sans la moindre raison valable la deuxième fois) est sans doute en partie la conséquence directe de ces agressions. Quelle meilleure publicité pour les islamistes que ces frappes qui les permettent ensuite de présenter les autorités du pays comme les poupées de Washington !
 
La chienlit au carré

Bien sûr, on peut se dire qu’il est préférable d’apporter son soutien au gouvernement actuel irakien par rapport aux islamistes qui n’hésitent pas à martyriser leurs propres compatriotes au nom de leur religion. Et je suis d’accord pour dire que l’on ne peut pas être complètement neutre. Mais entre une neutralité absolue et une prise de partie aussi claire, il y a de la marge, et je crois que la situation de ce pays, comme celle de la Libye, démontrent que les interventions occidentales sont totalement contre-productives. Elles ne font que renforcer les extrémistes qui peuvent alors se présenter comme les défenseurs de leur pays contre un Etat alors compromis avec l’Oncle Sam, dont il est difficile de ne pas voir les arrières pensées.

Comment ne pas voir que la guerre civile irakienne et la montée des islamistes dans ce pays est le produit direct des interventions étasuniennes ? Le délabrement politique de l’Irak comme de la Libye démontre que ce n’est pas tout d’intervenir pour renverser un dictateur, ces interventions arbitraires affaiblissent les pays et créent un terreau extrêmement favorable pour les plus extrémistes. D’où le paradoxe d’une situation qui est encore plus mauvaise qu’elle ne l’était sous le dictateur renversé. D’où la crainte qui est la mienne que les bombardements étasuniennes, s’ils affaiblissent à court terme les islamistes, ne finissent au contraire par les renforcer à moyen terme en étant une publicité formidable pour eux.
 
Si la France a raison d’apporter un soutien humanitaire aux victimes de cette terrible guerre civile irakienne, en revanche, nous devrions dénoncer fortement les interventions intempestives de Washington, d’autant plus extraordinaires que Barack Obama s’était opposé à la guerre de 2003.

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