L’Iran aura sa bombe

par Chem ASSAYAG
mercredi 14 février 2007

Ce n’est pas moi qui le dis, mais un rapport de L’Union européenne daté du 7 février, dévoilé par le Financial Times, et remis aux Etats membres avant la réunion des ministres européens des Affaires étrangères qui s’est tenue lundi dernier.

Dans le jeu de cache-cache auquel se livrent le gouvernement iranien et les chancelleries occidentales, il semble qu’une nouvelle étape ait été franchie ; en effet, en indiquant dans un document interne, rédigé par les services de Javier Solana, le chef de la diplomatie européenne, que l’Iran sera en mesure de développer suffisamment de matériel nucléaire - “At some stage we must expect that Iran will acquire the capacity to enrich uranium on the scale required for a weapons programme » soit "A un moment donné, nous devons nous attendre à ce que l’Iran acquière la capacité d’enrichir de l’uranium au niveau requis pour développer un programme d’armement" - pour la fabrication d’une bombe et qu’il sera difficile de l’éviter, les données du problème iranien deviennent très différentes. Ce rapport prend acte, d’une part, de l’échec des discussions avec les autorités de Téhéran, que ce soit via l’Onu ou via l’Agence internationale de l’énergie atomique, et de l’inutilité de seules sanctions économiques pourtant en cours de définition (voir par exemple le document du Conseil de l’Union européenne daté du 12 février 2007, page 8, qui prévoit le détail des sanctions ), et d’autre part indique que les retards du programme iranien sont purement techniques et ne sont liés en rien aux démarches de pression des chancelleries occidentales. Il s’agit là d’un revirement assez spectaculaire de la position européenne, qui jusqu’à présent semblait compter sur la seule négociation (voir l’affirmation de Solana le 4 octobre 2006 dans une communication au Parlement européen « Je suis convaincu que le dossier iranien ne peut être et ne sera résolu qu’à travers des négociations. Nous avons le bon cadre et les bonnes bases pour cela ») pour faire renoncer l’Iran à ses ambitions atomiques, et ceci d’autant plus que c’est M. Solana lui-même qui conduisait les discussions avec les Iraniens au nom de l’Union et de l’Onu.

Cette analyse rejoint celle faite par Dominique Lorentz, spécialiste des questions de prolifération, et interrogée par Sylvain Attal il y a quelques jours sur France 24, et qui est encore beaucoup plus catégorique sur la capacité nucléaire du régime des mollahs. La question n’est donc plus de savoir si l’Iran aura la bombe mais quand, et de s’y préparer.

En effet une bombe iranienne soulève plusieurs questions cruciales pour l’équilibre de la région - elles sont d’ailleurs traitées à la fin du document reproduit par le Financial Times - et au-delà de la planète : quel équilibre de la terreur peut s’instaurer dans cette zone du monde, sachant que les Iraniens soutiennent le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien ? Peut-on imaginer que les Iraniens utilisent réellement la bombe, notamment contre Israël ? Comment les dissuader de l’utiliser ? Par la force, la menace ou la négociation ? Comment contenir le danger de prolifération nucléaire ?

Face à de redoutables négociateurs, professionnels du double langage et des coups de bluff, espérons que la naïveté habituelle de certaines démocraties occidentales sera enfin remisée au placard.


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