L’Iran propose une conférence des ministres de l’Énergie de l’Organisation chinoise

par Bertrand C. Bellaigue
vendredi 16 juin 2006

Paris, 15 juin (BCB). Au cours du sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), qui se tenait jeudi 15 juin sous les auspices de la Chine, le président iranien , Mahmoud Ahmadinejad , qui en était l’hôte controversé, a proposé aux pays membres présents de « renforcer la coopération énergétique et d’organiser en Iran une conférence des ministres de l’Énergie de l’OCS », rapporte l’agence russe Novosti .

En pleine crise nucléaire, dans laquelle Moscou et Pékin d’un côté, les Etats Unis de l’autre, et, parallèlement, l’Europe unie, jouent un rôle important, la venue de M. Ahmadinejad na pas manqué d’attirer l’attention internationale.

Sa présence à la conférence de Shanghai a fait l’objet des critiques du secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld. Ce dernier, selon l’AFP, a trouvé "étrange de vouloir amener au sein d’une organisation qui se dit contre le terrorisme... un des pays les plus engagés dans le terrorisme : l’Iran".

Et pourtant "l’Iran semble avoir proposé des mesures concrètes et apaisantes en matière de coopération énergétique, de prospection, d’extraction et d’exploitation conjointe de ressources".

Compte tenu de sa situation géopolitique, l’Iran serait prêt à développer ses échanges de vues avec «  l’Organisation de coopération de Shanghai » , « en vue de rétablir la paix, la stabilité et la sécurité dans la région », a souligné le porte-parole de la délégation iranienne.

L’Agence Novosti indique par ailleurs que le président iranien a proposé aux pays membres de l’OCS de coopérer dans le domaine des transports et des investissements, et de créer une zone de libre-échange, et qu’il s’est prononcé en faveur de l’élaboration d’une politique coordonnée en matière de lutte contre le terrorisme.

Mais il est particulièrement significatif de constater que l’Iran, se déclarant prêt à des conversations sur le thème énergétique - et donc nucléaire - se tourne maintenant vers l’Est, vers un organisme dont le siège est en République de Chine populaire, pour rendre publics ses projets d’initiative.

L’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) compte six pays membres, qui sont la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan.

Les présidents des cinq Etats fondateurs (Russie, Chine, Kazakhstan, Kirghizstan, et Tadjikistan) et celui de l’Ouzbékistan doivent être rejoints à Shanghai, outre par le président iranien, par les chefs d’Etat du Pakistan et de la Mongolie, qui ont un statut d’observateur. Autre pays observateur, l’Inde, qui sera représentée par son ministre du pétrole ; le président afghan Hamid Karzai a été invité.

Membre de l’ASEAN, la Birmanie, dont le poids géopolitique s’est accru en raison de la découverte de nouveaux gisements d’hydrocarbures et de gaz naturel, qui feront sa richesse, n’assiste pas à cette conférence. Pourtant, passant outre sa détestable réputation de dictature militaire, elle s’était rapprochée spectaculairement de la Russie et de la Chine, qui seront ses principaux clients.

L’agence Chine Nouvelle a décrit l’OCS comme « une organisation régionale de coopération multilatérale, créée sur la base d’un mécanisme de concertations entre les chefs d’Etat des "cinq pays réunis à Shanghai". Elle prône en effet une nouvelle vision de la sécurité, un nouveau modèle de coopération régionale, et un nouveau type de rapports entre les Etats. Les pays membres ont renforcé leur confiance et leur coopération sur le plan militaire, et intensifié leur collaboration substantiellement dans la lutte contre le terrorisme, le séparatisme et l’extrémisme, parvenant ainsi à un consensus sur un soutien mutuel en vue de prévenir et de résoudre pacifiquement les conflits d’ordre international. »

Au moment où l’on constate l’essor important de l’économie de la République populaire de Chine, ses besoins croissants en ressources énergétiques, et son rapprochement avec Moscou, l’Organisation de coopération de Shanghai, fondée il y a dix ans « pour lutter contre le terrorisme, l’extrémisme religieux et le séparatisme » semble avoir pris du poids dans le domaine géostratégique, notamment en raison de l’importance des gisements de pétrole d’Asie centrale.
"L’OCS se développe et s’étend constamment, attirant l’attention de la communauté internationale", a ainsi estimé un vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Li Hui.

Il est en effet possible que ce qu’on a décrit comme « la crise nucléaire iranienne » évolue dans le sens de l’apaisement, ou en tout cas d’une remise à plat, entre les Etats-Unis, l’Europe, la Russie et la Chine, du développement nucléaire d’un pays du Proche-Orient signataire du Traité de non-prolifération.

Selon l’Agence Novosti, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Hamid Reza Assefi, a déclaré mercredi, veille de l’ouverture du sommet de OCS à Shanghai, que l’Iran avait l’espoir d’accueillir des négociations sur le problème nucléaire iranien entre Téhéran et les pays européens. Le lieu de cette rencontre n’a pas été précisé.

Selon Hamid Rezza Assefi, le gouvernement iranien est en train d’étudier le paquet de propositions des Six. Après avoir analysé attentivement tous les points du paquet, l’Iran annoncera sa position. Hamid Reza Assefi n’a pas révélé les détails des initiatives des Six.

"Les propositions européennes concernant le nucléaire ne comportent pas de mesures répressives et ne fixent pas le délai au terme duquel l’Iran doit donner sa réponse à ces propositions", a-t-il fait remarquer.

Le paquet de propositions visant à convaincre l’Iran de suspendre les travaux d’enrichissement de l’uranium a été approuvé le 1er juin à Vienne par les ministres des Affaires étrangères de Russie, des Etats-Unis, de Chine, de Grande-Bretagne, d’Allemagne et de France.


Lire l'article complet, et les commentaires