La couleuvre est dure à avaler

par Salem Sahli
mercredi 3 octobre 2007

Depuis quelques mois, l’étau se resserre autour de l’Iran. Des sanctions progressives sont désormais votées et revotées par le conseil de sécurité. Et il faudrait être aveugle pour ne pas voir ce qui se prépare. Il s’agit tout simplement de la réédition du scénario qui, en 2003, a conduit au bombardement puis à l’invasion de l’Irak avec les « brillants » résultats qu’on sait.

La machine semble bien lancée et les boutefeux intellectuels et médiatiques se livrent à d’intenses campagnes propagandistes, accompagnées de leurres et de mensonges, pour conditionner l’opinion mondiale, la préparer psychologiquement et lui faire accepter, au final, l’intervention armée. Des « spécialistes » et « experts » autoproclamés de l’Iran appellent de leurs vœux une action militaire contre la République islamique. Les communiqués et encarts publicitaires, très cher payés, sont quotidiennement publiés par les grands journaux américains, anglais et français. Ils sont pour la plupart signés Elie Wiesel, André Glucksmann, Frédéric Encel, etc., tous inconditionnels de la politique israélienne. Leur message est on ne peut plus explicite : « pas de négociation avec l’Iran mais la guerre ; l’Iran représente un danger absolu pour le monde libre ; ou encore l’Iran est un pays dangereux prêt à attaquer l’Occident à l’arme atomique ».

Le 16 septembre 2007, le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner (celui-là même qui fut un des rares Français à avoir plaidé pour une intervention américaine en Irak), emporté par une emphase très peu diplomatique, a dit que le monde devait se « préparer au pire », c’est-à-dire à la possibilité d’une guerre contre l’Iran. Cette sortie suit de deux semaines celle du président Sarkozy qui avait dit vouloir « échapper à une alternative catastrophique : la bombe iranienne ou le bombardement de l’Iran ».

Récemment, deux prestigieux quotidiens The Independent en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis The New-Yorker ont même dévoilé des plans d’attaque américano-israéliens sur l’Iran. Ces informations ont aussitôt été démenties par l’establishment américain, démenti qui sonne comme un aveu.

On croit rêver, nous vivons décidément dans un monde orwellien où le ridicule le dispute à l’hypocrisie. On voudrait à coups de campagnes propagandistes nous faire avaler que la menace nucléaire viendrait exclusivement de l’Iran qui a adhéré au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), qui ne possède pas d’armes nucléaires et qui reste sous le contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Elle ne vient surtout pas d’Israël qui n’a pas adhéré au TNP, qui possède le sixième arsenal nucléaire du monde braqué sur l’Iran et les pays arabes, et qui refuse tout contrôle de l’AIEA.

Non, la couleuvre est difficile à avaler, et au lieu de se perdre dans des élucubrations farfelues en agitant le spectre d’une bombe iranienne virtuelle, mieux vaudrait contrôler l’armement nucléaire israélien, qui lui est bien réel, et constitue un véritable facteur déstabilisant pour la région. Notons enfin, à la décharge de l’Iran, que ce pays n’a jamais agressé personne. Au contraire c’est bien l’Occident qui, par Irak interposé, lui a livré dans les années 80, une guerre meurtrière de huit ans. Mais l’Iran d’aujourd’hui n’a rien à voir avec celui des années 80. Le frapper, l’humilier ou l’affaiblir revient à ouvrir une véritable boîte de Pandore dont personne n’est actuellement à même de savoir ce qui en sortira. A-t-on vraiment pesé les conséquences de cette éventualité ?


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