La politique de l’autruche
par olivier cabanel
mardi 28 juin 2011
Après avoir longtemps affirmé qu’un accident nucléaire majeur n’était pas possible en France, on s’interroge en haut lieu : « Et si l’inimaginable arrivait ? »
Aujourd’hui on sait que c’est surtout une erreur humaine qui a été à l’origine de la catastrophe. lien
Le 22 mai dernier, on a appris que Rosatom, l’agence russe du nucléaire, avait communiqué une étude confidentielle au Président Russe, étude rendue publique grâce a l’ONG norvégienne Bellona.
Suite aux stress tests effectués il y a peu, l’agence russe à recensé 31 failles sérieuses dues à des déficiences de contrôle, d’entretien, et de réparation, prouvant l’extrême vulnérabilité des 11 centrales nationales.
La plupart des réacteurs ne sont pas prévus pour s’arrêter automatiquement en cas de séisme, et les risques sismiques n’ont pas été pris en comptes pour ces centrales.
D’autre part, les bâtiments montrent « des signes d’affaissement et d’inclinaison progressifs ».
Evoquant les circuits de refroidissements qui sont qualifiés de « déficients » (défauts de soudure, délabrement des matériaux), le rapport affirme que les réacteurs russes pourraient être sujets à des explosions similaires à celles de Fukushima. lien
Depuis Fukushima, on sait que le Japon, considéré pourtant comme parmi les meilleurs dans ce domaine, n’était pas à l’abri d’une catastrophe.
En France, quelques jours après l’accident de Fukushima, Nicolas Sarközy était allé vanter notre technologie, sous entendant clairement qu’elle était supérieure à celle des Japonais. lien
Pourtant l’EPR, dernier fleuron de notre « haute technologie » en cours de construction en Finlande à vu son prix de départ (3,3 milliards d’euros) plus que doubler, et son inauguration reculer année après année.
D’autre part, des documents confidentiels internes à EDF, ont démontré que la conception de l’EPR implique un sérieux risque d’accident majeur, (lien) et que la centrale pourrait être sujette à un emballement dont les conséquences seraient incontrôlables, et donc extrêmement dangereuses. lien
Le 5 mai 2011, Jacques Repussard, directeur général de l’IRSN à déclaré que la France devait se préparer à des accidents nucléaires complètement inimaginables.
« Ce qui nous menace le plus, ce n’est pas un accident « standard (…) personne ne peut garantir qu’il n’y aura jamais d’accident nucléaire en France » a-t-il ajouté. lien
Pourtant en 1986 M. Rosen directeur de la sureté nucléaire de l’AIEA (agence internationale de l’énergie atomique) avait déclaré sans rougir après la catastrophe de Tchernobyl « même s’il y avait un accident de ce type tous les ans, je considèrerais le nucléaire comme une source d’énergie intéressante » lien
Qu’en penseraient les 985 000 morts suite à cette catastrophe ? lien
Récemment, des informations ont filtré sur des évènements « non prévus » dans la centrale nucléaire de Paluel dans laquelle les fuites s’ajoutent au fuites, faisant monter une inquiétude grandissante chez le personnel de la centrale. lien
Ce n’est pas hélas un cas isolé, puisque la centrale de Penly connait ce genre de problème, comme on peut le voir sur ce lien.
Pourtant l’ASN (autorité de sureté nucléaire) concluait que n’y décelait pas de « difficultés particulières » ajoutant que « le domaine de la surveillance des équipements sous pression a fait l’objet d’une attention particulière ».
Depuis quelques jours, aux USA, qui se considèrent eux aussi comme parmi les meilleurs techniciens en matière nucléaire, deux centrales sont entourées par les eaux du Missouri, et la crue ne cesse de monter, menaçant les barrières fragiles de sac de sable, et le « boudin » de caoutchouc mis en place en toute hâte pour éviter le pire. lien
L’autre centrale, celle de Cooper, est à son tour menacée par la montée des eaux. lien
D’autre part, des fuites de tritium ont été constatées dans 48 des 65 sites nucléaires américains. lien
Mais que ce soit en Russie, au Japon, aux USA en France, où ailleurs, ce qui rapproche aussi les pays nucléarisés, c’est l’opacité, la politique du secret, et la volonté de ne pas informer les citoyens des dangers qu’ils courent.
Au Japon, ce n’est que 3 mois après que l’on a appris enfin que les 3 réacteurs etaient entrés en fusion quelques heures après le séisme. lien
En Russie, lors de la catastrophe de Tchernobyl, l’évacuation des habitants de Pripyat a été trop tardive. lien
Aux USA, le président Obama a décidé le black-out sur la situation des 2 centrales encerclées par les eaux. lien
En France on se souvient de la légende sur la radioactivité de Tchernobyl qui s’était arrêtée à la frontière, (lien) et des nombreux accidents nucléaires dans le Monde, dont la population n’a été informée que tardivement, voire pas du tout. lien
Au Blayais, cette centrale nucléaire prise dans la tempête de 1999, les bordelais n’ont appris que beaucoup plus tard qu’Alain Juppé, maire de la ville à ce moment, avait envisagé de faire évacuer Bordeaux.
La centrale nucléaire encerclée par les eaux, s’était trouvé à deux doigts d’une catastrophe majeure. lien
Au-delà du silence médiatique, c’est aussi la désinformation qui règne en maître.
Le 27 juin, sur l’antenne d’une radio périphérique, un journaliste annonçait benoitement que les problèmes de Fukushima étaient pratiquement réglés, que les 100 000 tonnes d’eau radioactive avaient été dépolluées, alors qu’en réalité, la procédure venant à peine de commencer, ne peut traiter que 1200 tonnes d’eau par jour, et qu’en conséquence, il faudrait attendre au moins 3 mois pour que cette eau soit totalement évacuée, sachant que sa radioactivité ne serait diminuée théoriquement que de 1000 à 10000 fois. lien
Comme l’exploitant doit injecter 500 tonnes d'eau chaque jour, ce seront 45 000 tonnes d’eau radioactive qui seront à dépolluer dans 3 mois.
On est au cœur du mythe de Sisyphe. lien
La dernière tentative de dépollution l’eau du 16 juin (lien) avait du s’arrêter au bout de 5 heures, suite à la trop forte radioactivité. lien
Rebelotte, ce même 27 juin, 90 minutes à peine après le démarrage de la décontamination, la procédure était de nouveau arrêtée. lien
Par contre, aucun média officiel n’a évoqué la série d’explosions en chaine qui se sont produites le 26 juin à 20h, heure locale et que l’on peut constater sur cette vidéo. lien
Combien de temps faudra-t-il attendre pour qu’une autorité internationale prenne les choses en main ?
On le sait le corium est en train de ronger les 7 mètres de béton qui se trouvent sous les réacteurs, et lorsqu’il atteindra la nappe phréatique située 15 mètres en dessous, les 600 tonnes de combustible nucléaire (lien) seront dispersées dans l’atmosphère, et dans l’océan.
Pendant que la pollution radioactive de Fukushima s’étend chaque jour un peu plus à l’ensemble de la planète, des pays de plus en plus nombreux tournent le dos à cette énergie désuète, chère et dangereuse.
Selon l’institut de sondage Gallup, réalisé dans 24 pays nucléarisés, la majorité des citoyens est contre l’énergie nucléaire.
Il reste quand même 42% de japonais à continuer à privilégier le nucléaire. lien
Seulement 3 pays y restent favorable, l’Inde à 61%, la Pologne à 57%, et les Etats Unis à 52%.
Pour ces derniers, il est probable que les évènements en cours à Fort Calhoun et à Cooper, ainsi que les fuites récemment constatées dans 48 centrales nucléaires pourraient bien inverser l’opinion.
De plus, le rapport du Docteur Mark Sircus apporte des nouvelles alarmantes concernant des millions de bambins des côtes ouest de l’Amérique, du Canada, de l’Alaska, d’Hawaï et d’au moins la moitié du Japon.
(En effet, à Kauai, une ile de l’archipel d’Hawaï, une station de détection radioactive a enregistrée le 22 juin à 8h du matin une alerte radioactive qui a duré 3 minutes. lien)
Selon le Dr Sircus, lequel a travaillé avec une équipe de scientifiques et de médecins, des millions de bébés souffrent déjà de symptômes qui semblent être les premiers signes de la maladie des rayons.
Il va encore plus loin déclarant « j’ai peur de devoir être brutalement honnête et d’être le porteur de nouvelles vraiment terribles. L’information qui ressort au sujet des concentrations de particules chaudes près de Fukushima, à Tokyo et maintenant à Seattle nous dit que non seulement les populations devraient s’inquiéter, mais que leurs gouvernements auraient du émettre des ordres d’évacuation il y a des mois. » lien
Pendant ce temps, les médias traditionnels en font des tonnes sur la fraude au bac, et sur la vague de chaleur.
Comme dit parfois mon vieil ami africain : « à la fin de la partie, le pion, tout comme le roi, retournent dans leur boite ».
L’image illustrant l’article provient de « espacepartout.blogspot.com »