La victoire de D. J. Trump ou l’éventualité du « Cygne Noir »

par Renaud Bouchard
samedi 29 octobre 2016

Malko se sentit mieux tout à coup. Le vent tournait . SAS – Amok à Bali (1970)
 

La possibilité comme la probabilité d'une élection de Donald John Trump à la présidence des Etats-Unis d'Amérique sont devenues tangibles, n'en déplaise aux zélateurs de la sénatrice H. Clinton. Le FBI réouvre l'affaire des courriels d'Hillary Clinton, Talon d'Achille de la candidate démocrate.

Pour tous ceux qui auraient un tant soit peu suivi les péripéties de la course à l'élection présidentielle américaine, on se rappellera qu'au mois de mars 2015, peu avant son entrée en campagne, la sénatrice démocrate Hillary Rodham Clinton avait été accusée d'avoir utilisé exclusivement une messagerie privée au lieu d'un compte gouvernemental durant les quatre années où elle dirigeait la diplomatie américaine, exposant de la sorte avec une probabilité certaine des informations confidentielles à un piratage informatique.

 

I-Anomalies

La divulgation de la nature comme du contenu de ces milliers de messages échangés sur ce serveur privé ayant révélé de graves manquements imputables à la sénatice Clinton dans la conduite hasardeuse d'affaires diplomatiques au dénouement dramatique (mort de l'ambassadeur des Etats-Unis Chris Stevens en Libye survenue à Benghazi en septembre 2012), on aurait pu légitimement penser que ces faits qui relèvent d'une incrimination fédérale majeure auraient à tout le moins invalidé ou empêché la candidature de son auteur. Il n'en a curieusement rien été de telle sorte que les soupçons les plus graves ont surgi quant à l'existence plus qu'avérée d'une collusion de « l'establishment » et du « deep state » - « l'Etat-profond » - démocrates, désireux de protéger et de promouvoir à tout prix leur candidate.

Le 5 juillet 2016, de manière surprenante et tirant prétexte de la conduite d'une « longue enquête », le FBI créait en effet l'événement en recommandant par la voix de son directeur M .James Comey de ne pas poursuivre Hillary Clinton dans cette affaire. « Aucune poursuite ne s'impose » avait alors déclaré le directeur du FBI, même si l'ancienne secrétaire d'Etat avait fait preuve selon lui d'une négligence extrême, de sorte que sa recommandation ayant été promptement suivie par le département de la Justice, les soupçons d'une main invisible guidée par l'Administration Obama bien complaisante envers la candidate démocrate avaient fini par susciter une vive réaction plus que compréhensible de la part du candidat et adversaire républicain Donald Trump.

II-Coup de théâtre

Si la suite est connue, la campagne électorale ayant été ponctuée de coups de pique et d'accusations visant à dénigrer chacun des candidats jusqu'à la tenue de débats dont l'issue avait semble-t-il tourné en défaveur de D. Trump si l'on en croit les sondages effectués, un coup de théâtre vient pourtant de se produire à quelques jours de la date fatidique du 8 novembre, jour de la consultation électorale nationale.

On apprend en effet que dans une lettre rendue publique par des élus républicains du Congrès, le vendredi 28 octobre 2016, le directeur du FBI James Comey leur annonce que ses équipes vont réouvrir le dossier précédemment classé de la messagerie privée d'Hillary Clinton.

« Dans le cadre d'une affaire distincte, le FBI a pris connaissance de l'existence d'emails semblant pertinents pour l'enquête », écrit en effet James Comey dans sa lettre adressée aux présidents de plusieurs commissions parlementaires dont le Renseignement et la Justice, lesquels l'ont alors rendue publique.

« Je vous écris pour vous informer que l'équipe enquêtrice m'en a informé hier et que j'ai donné mon accord pour que le FBI prenne les mesures d'enquête appropriées afin de permettre aux enquêteurs d'examiner ces emails et de déterminer s'ils contiennent des informations classifiées, et pour déterminer leur importance dans notre enquête », déclare à cet effet James Comey.

« Bien que le FBI ne puisse déterminer si ces informations seront ou non significatives et que je ne puisse prédire combien de temps il nous faudra pour venir à bout de ce travail supplémentaire, j'estime – écrit encore le directeur du bureau de police fédérale -,qu'il est important de tenir vos commissions au courant de notre travail, eu égard à mes déclarations passées ».

III-Le vent serait-il en train de tourner ?

Si l'on peut légitimement supposer qu'il y a eu du tirage à l'intérieur du FBI dont certains agents et administrateurs ont très mal pris la manœuvre d'enterrement du « dossier Clinton » au point de mettre leur directeur devant le choix de « rattraper le coup », sauf à prendre le risque d'être mis devant le fait accompli d'une publication à laquelle il n'aurait pas pu sérieusement s'opposer et qui se serait finalement révélée désastreuse, il n'en demeure pas moins que pour le grand public et donc pour l'électorat américain -particulièrement l'électorat républicain pro-Trump -, les jeux sont loin d'être faits et les cartes en passe d'être rebattues à quelques jours de l'élection.

La volte-face du FBI ne doit pas être prise à la légère, ce que traduit bien un connaisseur de ce type de révélation politique en la personne de Carl Bernstein -investigateur du fameux Watergate déclencheur de la procédure de destitution de R. Nixon- qui a déclaré en substance que le FBI n'aurait pas réouvert l'enquête sans raison valable : « And it is unthinkable that the Director of the FBI would take this action lightly, that he would put this letter forth to the Congress of the United States saying there is more information out there about classified e-mails and call it to the attention of congress unless it was something requiring serious investigation. »

http://www.realclearpolitics.com/video/2016/10/28/bernstein_fbi_would_not_reopen_case_unless_new_evidence_was_a_real_bombshell.html

La situation de la candidate Clinton est en effet devenue critique, à tout le moins sérieusement ébranlée si l'on en juge le temps qu'elle a mis à répliquer, alors que saisissant au vol toute l'importance de ce coup de théâtre inespéré survenu dans le processus électoral, Donald Trump a pour sa part immédiatement réagi lors du meeting qu'il tenait dans le New Hampshire. L'occasion était trop belle en effet pour ne pas pointer l'importance de la corruption comme de la criminalisation des actes de son adversaire. « La corruption d'Hillary Clinton atteint une ampleur jamais vue auparavant, a déclaré M.Trump. Nous ne pouvons pas la laisser emporter ses manigances criminelles dans le Bureau ovale. »

Le vent semble donc tourner et il n'est pas impossible que l'élection de Donald Trump comme 45ème président des Etats-Unis d'Amérique puisse se révéler alors comme la survenance d'un de ces événements qualifiés de « Cygne Noir », raisonnements ou conjectures construits à partir d'un ensemble d'informations incomplètes ou volontairement limitées, écartées ou ignorées parce que dérangeantes (l'hypothèse d'une défaite d'Hillary Clinton, récusée par tous les media français, par exemple), qui conduit à aboutir à des certitudes erronées que vient démentir la survenance de faits réels.

IV-Finale

On se souvient du film de Christopher Nolan (2006) intitulé Le Prestige, construit sur la rivalité de deux prestidigitateurs-magiciens, et dont la signification du titre provient de l'une des trois étapes que comporte un tour de magie.

La première étape, appelée « promesse », est celle durant laquelle le prestidigitateur-magicien montre au public quelque chose qui semble ordinaire mais qui ne l'est pas.

La deuxième étape, dite du « tour », est celle de l'exécution proprement dite du tour de magie durant lequel le prestidigitateur-magicien rend l'acte ordinaire extraordinaire.

Le « prestige », titre du film donc, constitue l'étape finale de l'illusion, cette partie du tour de magie où l'imprévu se produit avec - peut-être -, la défaite d'Hillary Clinton et la victoire de Donald Trump, ce « Cygne Noir » que personne n'aura alors voulu voir alors qu'Hillary Clinton présentait dès le début, avec ses agissements, un Talon d'Achille évident.

 

Sources et éléments :

http://www.lemonde.fr/elections-americaines/article/2016/10/28/aux-etats-unis-le-fbi-va-examiner-de-nouveaux-courriels-d-hillary-clinton_5022250_829254.html

Follw the money, l'étrange Mr Comey :

http://www.breitbart.com/2016-presidential-race/2016/09/10/exposed-fbi-director-james-comeys-clinton-foundation-connection/

http://www.breitbart.com/big-government/2016/10/28/fbi-donald-trump-new-hampshire-donald-trump-hillary-clinton-rainy-day-rally/

Nassim Nicholas Taleb, Le cygne noir : La puissance de l'imprévisible [« The Black Swan:The Impact of the highly improbable »], Les Belles Lettres, 2010, 496 p. (ISBN 978-2251443959)

 


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