Le crépuscule des « Oil Majors »

par Clark Kent
mardi 24 mai 2016

Face à la chute des prix du pétrole et de leurs profits, les grandes compagnies pétrolières investissent dans les "énergies renouvelables" et l' "énergie propre", en mettant l'accent sur les combustibles fossiles. Une course contre la montre.

Le flirt platonique entamé entre les grandes compagnies pétrolières transnationales et les énergies renouvelables semble s’orienter vers des relations un peu plus "adultes", quoiqu'encore timides.

Des rapports récents indiquent que Shell, le groupe pétrolier anglo-néerlandais, compte investir 1,7 milliards de dollars pour la création d'une nouvelle structure dans l'entreprise visant spécifiquement à développer les énergies renouvelables et les énergies à faible impact carbone.

Cette information intervient juste après l'annonce faite par Total, un autre géant du pétrole, qui a décidé d’intensifier ses investissements dans » l'énergie propre », et vient de racheter Saft, un important fabricant de batteries, 1 milliard de dollars. Total a aussi acquis la majorité des parts de SunPower, un des leaders de l’énergie solaire.

Même ExxonMobil qui avait mis en doute le bien-fondé de la théorie du réchauffement climatique, a annoncé récemment son intention de mener des études sur la technologie des piles à combustible afin de réaliser la récupération et le stockage du dioxyde de carbone et éliminer les émissions de gaz à effet de serre des installations électriques.

A première vue, il s’agit de bonnes nouvelles dans la lutte contre le changement climatique dont les causes sont en grande partie liées aux émissions provenant de combustibles fossiles, en particulier du pétrole et la combustion du charbon.

Or, à y regarder de plus près, les investissements des géants du pétrole dans les énergies renouvelables sont encore très faibles par rapport à leurs budgets globaux, sans commune mesure avec leurs dépenses concernant leurs activités liées aux combustibles fossiles. Il faut se garder de trop d’enthousiasme, car on sait que dans le passé, les grandes compagnies pétrolières ont fait des annonces très médiatisées sur les investissements énergétiques de remplacement, pour plus tard se soustraire sans scrupules à leurs engagements.

Jusqu’ici, les compagnies pétrolières n’ont pas réussi à s’adapter à un système énergétique mondial de plus en plus fragmenté. Mises à mal par la baisse des prix du pétrole et par les nouvelles réglementations liées aux changements climatiques, elles ont subi une forte baisse de leurs actifs financiers.

La plus touchée a été BP qui a annoncé une perte de 6,5 milliards dollars en 2015, comparativement à un bénéfice de 3,8 milliards de dollars l'année précédente.

Opérer dans un marché du pétrole qui est de plus en plus chaotique et déstructuré n’est pas chose facile. Autrefois toutes-puissantes sur le marché de l’énergie, les grandes compagnies pétrolières ont perdu progressivement la production elle-même et des parts de marché pour la redistribution, fonctions qui ont été transférés à des structures étatiques, membres pour la plupart de l'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP).

Ces dernières années, l'OPEP elle-même a commencé à se fissurer, et les accords concernant les niveaux de production sont devenus obsolètes. Parmi les pays membres, l'Arabie saoudite et l'Iran sont des ennemis acharnés. La Libye est en état de guerre civile. Le Venezuela doit faire face à un chaos politique. Au Nigéria, des groupes rebelles attaquent les installations pétrolières. En Irak, Isis organise le marché noir du pétrole avec la Turquie et Israël

Pendant ce temps, les producteurs non-OPEP - les États-Unis et le Canada - ont aggravé la surabondance mondiale de pétrole - causée principalement par un ralentissement économique mondial – en pompant des millions de barils de pétrole de gisements de schiste et par fracturation.

La seule solution de survie pour les grandes compagnies pétrolières semble être d’investir dans de nouvelles technologies, y compris les énergies renouvelables. Les grands groupes prennent de timides initiatives dans ce sens, mais les engagements sont trop faibles, et il se pourrait bien qu’il soit déjà trop tard.

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Source : Climate News Network.


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