Les jeux dangereux d’Israël au Sud-Liban
par Ronny
mardi 14 novembre 2006
Les récents incidents militaires du Sud-Liban ne sont pas fortuits et posent la question des motivations de l’Etat d’Israël.
Or,
en peu de temps, la tension au Sud-Liban est remontée de plusieurs crans, tout
particulièrement en raison du non-respect de clauses du cessez-le-feu. Les
survols fréquents par l’aviation israélienne de ce secteur y contribuent largement,
d’autant plus que les chasseurs ne se sont pas limités à ce secteur, et ont poursuivi
jusqu’à Beyrouth, à plus de 120 km de la frontière israélo-libanaise. Difficile,
dans ce cas, d’invoquer un simple franchissement accidentel de l’espace aérien libanais.
Ces incidents sont fréquents, à ce qu’en disent le président Chirac et la ministre Michèle Alliot-Marie, qui se sont élevés tous deux contre ces intrusions[3]. Ils pourraient même conduire à un incident grave. Cela a failli être le cas voici très peu de temps[4]. Deux chasseurs israéliens ont manœuvré comme s’ils attaquaient une position de la Finul tenue par des Français. Les missiles antiaériens de cette position ont été armés, et les séquences de tir engagées avant d’être arrêtées à moins deux secondes, ce qui a fait dire qu’une « catastrophe a été évitée de justesse » à Michèle Alliot-Marie. En rapport avec ces évènements, l’ambassadeur d’Israël en France a été convoqué au Quai d’Orsay, où les autorités lui ont fait part de leur « grave préoccupation face à la poursuite des survols israéliens du territoire libanais »[4]. La dépêche de l’Associated Press précise aussi qu’il s’agit de la 14e violation observée de la résolution 1701 de l’ONU, et la deuxième attaque « simulée ». Ajoutons, pour clore ce tour d’horizon des faits, qu’Israël n’en est pas à sa première attaque contre la Finul. Fin juillet 2006, une attaque délibérée d’une position onusienne au Sud-Liban, à Khiam, avait eu lieu, malgré le drapeau onusien flottant sur le poste et les six appels de ses observateurs aux Israéliens. « Nous avons appelé les Israéliens à six reprises au cours des heures qui ont précédé le bombardement meurtrier pour leur dire : faites attention, nous sommes là, ne tirez plus », aurait dit un responsable de la Finul. Au total, 17 bombes ont été larguées sur cette position par l’aviation d’Israël[5], entraînant la mort de quatre observateurs de l’ONU et la condamnation ultérieure de cet Etat par les Nations unies.
Le fait que ces évènements ne soient pas fortuits[5] est certain et troublant. Autant il serait possible d’attribuer une activité de recherche de renseignements à des survols de reconnaissance de la zone frontalière, autant les attaques contre la Finul, le survol de Beyrouth, et les tirs de semonce contre les navires allemands en eaux internationales constituent « un jeu dangereux ».
Il faut dès lors se poser la question des motivations de l’Etat d’Israël. On peut en distinguer trois essentiellement. La première, évoquée par Bernard Getta sur les ondes nationales, suggère qu’Israël tenterait par ce moyen de faire pression sur la force internationale pour obtenir la libération de ses militaires détenus par le Hezbollah, et dont la libération est soulignée dans la résolution 1701. La seconde viserait à permettre aux dirigeants israëliens de conserver une aura, une crédibilité, en adressant un signe fort à leur opinion publique. Ces dirigeants sont effet malmenés et déconsidérés depuis le retrait du Sud-Liban et les différentes « affaires » les affectant (accusation de viol et de corruption contre Moshé Katzav et Ehud Olmert, respectivement). La troisième, plus machiavélique, viserait à créer un incident délibéré, donnant à l’aviation israélienne un motif d’attaquer en force les positions de l’ONU, afin de décourager leur maintien, et d’ouvrir la voie à un retour au Sud-Liban. Il serait faux de croire qu’Israël craindrait les réactions internationales qui pourraient découler d’un tel acte. N’oublions pas que le respect des institutions internationales, et particulièrement des résolutions de l’ONU, n’est pas un point fort de sa politique[6]. Israël a d’ailleurs été condamné plus de soixante-dix fois par les Nations unies[7] sans effet notable.
Dans
la situation internationale actuelle, et compte tenu de la situation générale
au Moyen-Orient, cela reviendrait à risquer une déflagration, et à jouer avec des
allumettes assis sur un tonneau de poudre. Mais Ben Gourion ne disait-il pas
: « Peu importe ce que disent les gentils, l’important, c’est ce que font les juifs »[8] ?
1 Libération 30/11/06
2 Libération 31/10/06
3 lemonde.fr 21/10/06
4 Dépêche Associated Press 9/10/06
5 Le Figaro 28/7/06
6
ONU - Résolutions du Conseil de
sécurité : http://www.un.org/french/documents/scres.htm
7 Politis 26/09/02
8 Gordon Thomas - Histoire secrète du Mossad -
Nouveau Monde éditions