Les morts sont les seuls à ne pas mentir. Quelques vérités inédites sur la Guerre civile ukrainienne
par Laurent Courtois
vendredi 2 mars 2018
Inlassablement décriés par les acteurs de la dérussification de l'Ukraine et les partisans de la guerre à outrance, les accords de Minsk bien qu'imparfaits ont sauvé la vie de 18.000 à 50.000 personnes. Seule leur mise en place effective, n'attendant que le bon vouloir de la France et de l'Allemagne permettra de mettre fin à la guerre civile qui déchire le pays depuis quatre ans.
Depuis Bientôt un an, la presse mainstream commence ou termine ses articles sur l'Ukraine par cette formule laconique incarnant le journalisme copié-collé et prémâché : « dans un conflit qui a fait plus de 10.000 morts ». Cette formule succède à celle ayant eu cours toute l'année précédente « dans un conflit qui a fait près de 10.000 morts ». Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à lire le dernier article en date du Figaro, qui se termine par « Au moins 10.000 personnes ont été tuées dans les combats en trois ans » ! Il serait peut-être temps que le Figaro, intègre que la guerre civile ukrainienne en est à sa cinquième année et qu'elle a fait plus de 10.303 victimes. Cette kyrielle journalistique montre à quel point les victimes sont secondaires pour les auteurs des articles. Le principal étant pour eux de servir une vile propagande visant à cacher la réalité de faits : en Ukraine on tue sur des critères ethniques.
Tous les mensonges furent bons pour cacher cette vérité. Les victimes furent tour à tour des terroristes, puis des soldats envoyés par le Kremlin et pour finir des envahisseurs russes. Malgré ce flot de contre-vérités, visant à cacher aux yeux des européens qu'ils soutiennent en Ukraine ce qu'ils condamnent partout ailleurs, les chiffres, les statistiques sont là, tenaces et cruels et délivrent une vérité toute différente. Une telle remarque peut aussi s'appliquer à la Syrie, où par exemple la France soutient, finance et arme, les même islamistes qu'elle combat sur son propre territoire...
Courbe du nombres de victimes cumulées de la guerre civile ukrainienne.
(compilation des chiffres mensuels du HCDH).
La guerre civile ukrainienne a connu quatre phases, toutes une à une tenues sous silence par la presse occidentale. Tour à tour aveugle à la création d'Einsatzgruppen bandériste au printemps 2014, au génocide de l'été, aux violations du cessez-le-feu de l'année 2015, elle focalise actuellement sa cécité sur la dernière chance d'application des accords de Minsk, prenant le risque de plonger le pays dans 5 ans de chaos supplémentaires.
Les prémices du drame : 13 avril – 7 juin 2014.
Le 13 avril, Oleksandr Tourtchynov Président par intérim de l'Ukraine déclenche l'Opération Anti-Terroriste (ATO). Néanmoins jusqu'à l'élection de Pietr Poroshenko, aucun massacre important n'eut lieu. Malgré cela, le mois de mai 2014, fit presque autant de victimes que le second semestre 2017.
Les mois d'avril et mai furent mis à profit par la junte de Kiev pour former les bataillons de volontaires de la Garde Nationale (Donbass, Dnipro, Aïdar, Azov, etc) qui seront à l'Ukraine Post-Maïdan ce que furent les Einsatzgruppen à l'Allemagne hitlérienne. A la fin du printemps les futurs acteurs du drame recrutés parmi les plus extrémistes et les plus violents des bandéristes étaient prêts à accomplir leurs basses besognes. Ils n'attendaient plus qu'un feu vert que le « monde libre » n'allait pas tarder à leur donner.
7 mars 2014, Pietr Porochenko entre ses deux « parrains » français, François Hollande et Bernard Henry Levy sur les marches du perron de l’Élysée.
La guerre totale : 7 juin – 9 septembre 2014.
Dès le début du mois juin, Kiev met en place une opération militaire à grande échelle, visant à isoler et assiéger les villes de Donetsk et Lougansk. Les bataillons russophobes de la Garde Nationale sont lâchés sur le Donbass. Le bilan est terrible, durant chaque mois de l'été 2014, il y a eu en moyenne autant de morts que durant les deux dernières années du conflit (3.303 morts durant l'été 2014 - 1.204 morts de novembre 2015 à novembre 2017).
Durant la « quinzaine sanglante). » de l'été 2014, 957 personnes perdirent la vie dans l'est ukrainien. Le HCDH toujours avide de statistiques, ne précise pas combien de ces morts étaient des civils innocents victimes de la révolution de la dignité. Pourtant c'est durant ces deux semaines que les civils furent les plus touchés, Donetsk et Lougansk furent bombardées, livrant au monde les images d'enfants, de mères de familles et personnes âgées, tués, massacrés, atrocement mutilés.
Graphique du nombre de morts cumulés lors de la guerre civile ukrainienne.
(compilation des chiffres mensuels du HCDH).
Des violations du cessez-le-feu n'ayant comme seul but, la diabolisation médiatique de la Russie : 5 septembre 2014 – Novembre 2015.
Les deux premiers constats qu'amènent l'étude du nombre de morts mensuels dans l'est de l'Ukraine sont l'impact de Minsk et l'absence d'effet de Minsk2. Signés le 5 septembre 2014, les accords de Minsk1 ont eu comme effet immédiat en créant une ligne de front statique de faire chuter le nombre de victimes par 3, et ce bien que les combats continuèrent durant toute l'année 2015. Les accords de Minsk2, ne changèrent rien, tout comme les cessez-feu précédents, ils n'eurent comme fonction que de sauver la mise à une armée ukrainienne moribonde au bord de l'écroulement à Debaltsevo.
Subitement fin novembre, le nombre victimes chuta considérablement (80%) sans raison apparente. Mais que s'est-il donc passé en Ukraine, pour que les accords de Minsk se soient si soudainement appliqués ? La réponse à cette question est : RIEN, la clef du mystère est donc à chercher sur la scène géopolitique mondiale. C'est tout simplement, l'intervention armée de la Russie en Syrie qui a rendu obsolète l'utilisation de la guerre civile ukrainienne comme caisse de résonance. On arrive donc au triste constat que 5.900 ukrainiens ont perdu la vie, juste pour essayer de convaincre le monde que la Russie est un pays dangereux et pour promouvoir une nouvelle guerre froide. Le déplacement de l'objectif de la propagande russophobe vers la Syrie durant l'hiver, fit au printemps une « victime » collatérale : Arseni Iatsenouk. L'Occident ne voyant plus l' utilité de maintenir au pouvoir un premier ministre bandériste plus généocidaire que compétant, choisit de le remplacer par le moins belliqueux Volodymyr Hroïsman. Aujourd'hui entré dans l'ombre et citoyen canadien, son rôle central dans la mort de plus de 9.000 ukrainiens ne devra jamais être oublié.
Un terrorisme d'état succédant à une guerre ne disant pas son nom : Novembre 2015 à aujourd'hui.
À partir de décembre 2015, la guerre civile ukrainienne entre dans sa quatrième phase. Devenue une caisse de résonance secondaire pour les occidentaux, elle reste néanmoins le principal moyen de chantage pour la junte de Kiev. Les accords de Minsk commençant à jouer leur rôle, le nombre de morts diminua par vingt. Néanmoins Kiev se livre toujours à un terrorisme d'état, en maintenant sur la zone de l'ATO, des unités de la garde nationale à dominante bandériste. Chaque années ces unités pour fêter l'anniversaire de leur création se lancent dans des massacres sordides. Le mois d'avril 2016 a vu une surmortalité de 300 %. Ce triste constat se renouvelle en 2017, où les mois les plus meurtriers, furent ceux d'avril et mai.
Durant le second semestre de l'année 2016, les violations du cessez-le-feu et le nombre de victimes augmentèrent pour tenter d'influencer la campagne électorale américaine. Le comble de cette gesticulation sanglante est atteint au lendemain de l'investiture de Donald Trump. Ce dernier boudant Porochenko, fin janvier le Donbass s’enflamma de nouveau. En 24 heures, 2.300 violations du cessez-le-feu eurent lieu et entraînèrent 23 morts. En tout 27 vies furent perdues pour obtenir un simple coup de téléphone.
Selon un rapport de l'ONU, le nombre de victimes civiles (375, dont 68 morts) a doublé durant le premier semestre 2017. 31 des 68 morts furent le fait, de bombardements de zones résidentielles. Aucun autre chiffre ne saurait mieux incarner la dimension terroriste de la junte de Kiev.
Si on regarde les causes de mortalité des civils, pour la période du 15 février au 15 mai de cette année, 67 civils ont perdu la vie, dont 27 en DNR, 7 en LNR et 33 en territoire sous contrôle gouvernemental.
Sur ces 33 décès, la majorité a été causée par des mines et seulement le tiers par les bombardements.
Les forces de Kiev sont donc responsables de la mort de cinq fois plus de civils que les forces rebelles.
L'étude de la mortalité lors de la Guerre Civile Ukrainienne montre que la Russie par sa fermeté diplomatique a permis de faire chuter de 95% le nombre de victimes en Ukraine. Il ne tient qu'aux USA, à l'Allemagne et à la France de faire pression sur Kiev pour permettre l'application quasi totale du cessez-le-feu. La première des mesures à prendre pour mettre fin au terrorisme d'état dans l'Ukraine de l'est est l'interdiction de l'affectation des bataillons à dominance bandériste (Azov, aïdar, Donbass, etc..) de la Zone de l'ATO.
L'année 2015 a montré le cynisme des occidentaux et le peu de valeur qu'ils accordent à la vie des ukrainiens, dont la mort fut orchestrée dans une propagande sordide, pour promouvoir une nouvelle guerre froide.
L'intervention Russe en Syrie, a eu comme corollaire, en rendant leur sacrifice inutile, de sauver la vie à plusieurs milliers d'ukrainiens (environs 3.000).
L'application des accords de Minsk dépend essentiellement du bon vouloir des occidentaux. Dans ce contexte, quel sera l'avenir du pays ?
Le prochain article essayera de répondre à cette question.