Les raisons économiques de la révolte libyenne
par Amine
jeudi 12 mai 2011
Afin de comprendre un conflit, il est primordial de comprendre ses causes. Dans le cas du conflit libyen, une des causes qui a poussé la jeunesse dans la rue est strictement économique. La Libye est un pays relativement riche qui base plus de 95% des recettes courantes de son peuple sur le pétrole qu’il exporte.
La Libye a une histoire singulière qui a créé un fossé socio-économique important au sein de la société. Tout d’abord, l’embargo onusien contre la Libye (1992 – 1999) – lié à la responsabilité de cette dernière dans l’attaque contre l’avion qui a explosé au-dessus de Lockerbie en Écosse en 1988 et dans l’attaque contre l’avion qui a explosé au-dessus du Niger en 1989 - a contribué aux spéculations qui ont conduit à une inflation monstre. S’il n’a pas directement touché l’exportation du pétrole libyen, conduit par les spéculations, l’embargo imposé par l’ONU, a créé une inflation de 200% des produits de consommation de base, ce qui a mené à un ralentissement de l’économie libyenne et, à forteriori, à un effondrement du Dinar. Cette crise économique a eu une incidence importante sur le milieu de l’emploi amenant entre 10% et 20% de la population à perdre son emploi (avant l’embargo, 8% de chômage, après l’embargo, entre 20% et 30%). Cette situation critique s’est traduite par un développement des secteurs informels et, ultérieurement, à un mécontentement populaire. Cette combinaison (sans-emplois, pauvreté et secteurs informels) est propice à la naissance de groupuscules islamistes. C’est ainsi que s’explique l’émergence de groupes comme le Groupe Islamique Combattant en Libye.
Si l’embargo onusien ne visait pas la manne pétrolière libyenne directement, il a néanmoins mené à une baisse conséquente de la quantité de brut produit. Une clause y mentionnait l’interdiction de vente à la Libye de tout matériel lié à la production pétrolière. Ce qui a mené à une détérioration, à moyen terme, du matériel utilisé et subséquemment à une baisse de la production. Ainsi, en 1970, la Libye produisait plus 3,3 millions de barils par jours, alors qu’en 2007, elle n’en produisait plus que 1,7 millions. Le tout était combiné à une situation internationale délicate. Les deux chocs pétroliers de 1967 et 1980 – nés de la guerre de Six-Jours et de la guerre irano-irakienne – ont contribué à une augmentation substantielle des prix du baril de pétrole, ce qui a permit à d’autres acteurs, comme le Mexique, d’entrer en jeu. Ça s’est, en d’autres termes, traduit par une diversification de l’offre. Par ailleurs, le prix élevé du baril de pétrole a forcé les pays importateurs à développer d’avantage de technologies réduisant leur consommation. Ce qui signifie une baisse de la demande. En simple terme économique, une augmentation de l’offre, conjuguée à une diminution de la demande, signifie nécessairement une baisse drastique des prix. Ainsi, la Libye a dû vivre avec une réduction des prix du baril.
De ce bouillonnement politique, économique et social est née une nouvelle classe sociale : Les nouveaux-riches. Ainsi, certaines personnes haut placées, parfois proches du pouvoir, utilisaient leur influences afin de s’enrichir grâce au marché informel florissant. Ces derniers ont créés une certaine inégalité sociale et ont contribué à développer un sentiment d’injustice. Ce qui renforcea à la grogne populaire. Pour finir, il serait important de noter que si la Libye, contrairement à d’autres pays africains, a les moyens de ses ambitions et qu'elle possède un taux d’alphabétisation de 91,7% (par rapport à 6% d’alphabétisation en 1950), il n'en demeure pas moins qu'elle constitue un marché peu réceptif à cause des problèmes institutionnels et structurels auxquels elle fait face. Ainsi, le marché du travail, comme mentionné plus haut, subit depuis les années 80 des pressions énormes. La jeunesse est la première à en subir les conséquences exige aujourd'hui des réformes économiques.