Loi du marché, planète en danger !

par François G
mardi 15 avril 2008

Le président de la banque mondiale fait appel aux gouvernements pour qu’ils interviennent, les prix alimentaires mettent en danger 100 millions de personnes. Des troubles politiques et sociaux menacent dans plusieurs pays à brève échéance. Certains d’entre eux connaissent déjà des révoltes.

On entend dire : « Le monde va vers une longue période d’émeutes ». Dominique Strauss-Kahn évoque « des conséquences terribles (...) ce genre de situation se finit parfois par une guerre ».

Alors comment en est-on arrivé à cette situation, qui l’a provoquée, existe-t-il des solutions immédiates et plus durables ?

Pourquoi s’inquiète-t-on seulement maintenant des populations exposées au risque de sous-alimentation ?

Les prix alimentaires ont terriblement augmenté. On nous dit que c’est la loi du marché : celle de la demande et des stocks disponibles.

A noter toutefois que les marchés financiers de Chicago, liés aux productions alimentaires, ont augmenté de 31% en une seule journée. Peut-on parler d’offre et de demande ou plutôt de résultats de spéculations (achat de production avant les semailles et vente après la récolte). Le prix du marché dicte sa loi dans ce domaine, n’est-ce pas là un échec de la politique mondiale et une preuve d’un affaiblissement des pouvoirs politiques ?

La demande croît assurément avec l’augmentation des revenus des populations des pays à forte croissance comme la Chine et l’Inde. Et les stocks seraient insuffisants pour satisfaire cette demande.

La production alimentaire mondiale s’est élevée en trente ans. Elle est passée de 2 300 calories quotidiennes par individu à 2 700 calories, passant ainsi de 90 % à 109 % des besoins fondamentaux en trente ans. Pas certain de l’insuffisance dans ce cas.

Le vrai problème aujourd’hui est la répartition de ces produits alimentaires dans le monde : 840 millions de personnes souffrent de malnutrition, 100 millions sont en danger. Ce problème de répartition est manifestement lié aux prix par importation des produits et pour leur production à l’interne du pays.

On entend ici ou là des propos, que je ne qualifierais pas, tendant à mettre en cause l’accroissement excessif de la population mondiale et donc de la natalité dans certaine partie du monde.

Les chiffres montrent, au contraire, un fléchissement du taux d’accroissement de la population mondiale [1950 (2,5 milliards) 2000 (6,5 milliards) soit fois 2,6 ; 2000 (6,5 milliards) 2050 (prévision de 9 à 10 milliards) soit fois1,5 maximum]. Alors ce serait la densité de population 31 h/km2 en Afrique, 60 en Europe : pas certains alors.

Toujours est-il que l’urgence est de répondre à l’attente de sécurité alimentaire dans tous les pays du monde. Sécurité alimentaire au sens de quantité et qualité de nourriture suffisante pour une vie saine et active.

Un réelle volonté politique mondiale doit se manifester pour y parvenir. Cette volonté politique devra poursuivre son œuvre pour aboutir à des productions agricoles durables dans les pays en développement. Il va être nécessaire de doubler la production mondiale dans les trente ans à venir ce qui n’est pas hors de portée compte tenu des disponibilités en terre et en eau (seulement 3 % des réserves renouvelables en eau sont utilisées en Afrique et 14 % en Asie).

A l’évidence, le « libéralisme » n’est pas intéressé par ce développement, aucun espoir de ce côté. En effet, cinq grandes compagnies mondiales détiennent 75 % du marché des semences. Semences dont les prix ont augmenté de 36 à 72 %, c’est bien plus rentable que la production alimentaire.

Des solutions sont à rechercher pour éviter que le rendement agricole des pays en développement ne se fasse pas au détriment des propriétaires les plus pauvres de la population. Des accompagnements sont à prévoir pour que la dépendance technologique associée n’entraîne des ventes de biens aux grands propriétaires générant un exode rural venant grossir les bidonvilles, le chômage et la pauvreté.

Ce qui nous préoccupe tous au Nord est un vrai drame pour le Sud. Ce qui peut aussi nous inquiéter est de se dire « Pourquoi réussirait-on maintenant ce que l’on n’est pas parvenu à réaliser auparavant ? » Les émeutes actuelles et celles à venir frapperont-elles les hauts responsables de ce monde pour qu’on veille à apporter une aide alimentaire immédiate, une aide au développement agricole durable, une aide pour augmenter les revenus d’exploitation des pays du Sud pour renforcer leur capacité d’importation.


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