Maroc : interrogations sur le rôle de la presse indépendante après l’incarcération du journaliste Ali Anouzla

par Mohamed Takadoum
jeudi 17 octobre 2013

L’incarcération d’Ali Anouzla directeur du journal Lakome interpelle à plus d’un titre. Est ce qu’on avait vraiment besoin de ce tollé international qui va « des préoccupations » du département d’Etat à la condamnation des ONG internationales dont Amnesty International et HRW notamment ? Le département d’état toujours en donneur de leçons avance que « Nous conseillons vivement aux autorités marocaines de traiter l’affaire de M. Anouzla de manière équitable et transparente, conformément à la loi marocaine et aux obligations internationales et procédures régulières du Maroc ».

Pour Amnesty international « La perspective de voir Ali Anouzla faire face à un procès inéquitable sur des charges de terrorisme, est extrêmement préoccupante et devrait avoir un effet paralysant sur la libre expression au Maroc ». Pour sa part, Human Rights Watch a appelé les autorités marocaines à libérer le journaliste « à moins d'avoir la preuve que l'article mis en cause constituait une incitation à la violence imminente. » « Ali Anouzla comme d’autres journalistes dans le monde, estime que son travail consiste à informer et rapporter ce que Al-Qaïda et ses affiliés disent et font », a déclaré le directeur par intérim de l’ONG au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, Joe Stork.

Dans le pays par contre, de grandes formations politiques, l’Istiqlal le RNI, le Mouvement Populaire le MDS au lieu de garder une certaine neutralité dans cette affaire et préserver la présomption d’innocence n’ont pas hésité à enfoncer le journaliste incriminé parlant même de « 5éme colonne ».

Au-delà de ces réactions, il faut préciser que l’époque d’incarcération des journalistes, sauf s’ils commettent des délits de droit commun est révolue. Pour ma part, même si je ne suis pas d’accord avec la ligne éditoriale de M Anouzla et son site Lakome, je pense que les lourdes charges portées contre lui ne peuvent avoir seulement comme fait déclenchant la mise en ligne du lien de la vidéo de propagande d’AQMI. Faire une publicité indirecte pour Al Qaida, cette nébuleuse terroriste en publiant le lien est certes une erreur flagrante mais de là à rendre l’auteur des faits complice de terrorisme, une sorte de traitre est difficile à admettre. Il ne s’agit pas pour moi d’interférer dans l’instruction en cours qui est susceptible de conduire à non-lieu qui ferait honneur à la justice marocaine à mon avis mais d’exprimer un point de vue largement partagé.

La vraie question qui se pose à mon avis avec ces journalistes dits indépendants comme M Anouzla c’est qu’ils remplissent leur mission de journalistes quand ils dénoncent les injustices, les passes droits, la corruption, le laxisme et en général les défaillances dans la gestion du pays. Mais quand ils s’érigent en portes paroles des séparatistes et des ennemies de notre intégrité territoriale qui veulent saucissonner le pays comme l’ont déjà fait les colonisateurs français et espagnols, quand ils font dans l’insulte gratuite, quand ils versent dans la calomnie, quand ils attaquent de manière éhontée le système monarchique qui reste quoi qu’on en dise le garant de notre unité et est l’objet de l’unanimité des marocains, ils ne font pas honneur à leur profession. Ils ne font pas aussi honneur à leur profession aussi quand ils passent sous silence les avancées notables de notre pays, faisant croire à leurs lecteurs que rien ne marche dans ce pays , le montrant au bord de l’abime pour pousser sa jeunesse au désespoir et préparer éventuellement des interventions étrangères

Faut-il pour autant leur faire des procès, je pense personnellement que non. Il faut corriger les dérives de ces plumes par la plume en montrant notamment qu’ils nagent à contre-courant, que le pays avance malgré ses faibles ressources. Ce que j’essaie modestement de faire sur ce site et ailleurs. Qui peut nier que Mohammed VI a transformé le Maroc en un vaste chantier, parcourant quotidiennement le pays de long en large, initiant des projets de développement, en assurant personnellement le suivi et l’exécution : infrastructures, énergies renouvelables assainissement et réhabilitations urbaines et a mené dès le début de son règne la lutte contre la corruption et le trafic de drogue.

Le pays a recouvré ses capacités d’investissement perdu dans les années 80 et 90. Le PIB a plus que doublé en 10 ans. Plus de deux millions de marocains ont été tiré du seuil de pauvreté Ayant le PIB par habitant le plus bas du Maghreb, il a le SMIG le plus haut et ses cadres sont les mieux payés. Le taux d’analphabétisme qui était de plus de 50% au moment de l’accession de Mohamed VI au trône est passé à 30% pour être ramené à 20% en 2016 et être éradiqué dans les années 2020. La Lutte contre la pauvreté et la consécration des droits de la femme avec le nouveau code de la famille « Moudawana ». Cette réforme voulue et imposée par le Roi aurait pu être beaucoup plus audacieuse sans les réticences de certains milieux conservateurs notamment islamistes.

La réconciliation des marocains avec leur passé récent avec l’Instance Equité et Réconciliation. La couverture médicale est en phase d’être réalisée pour tous. A l’accession au trône du roi, le pays comptait 300 km d’autoroute, 1400 km actuellement couvrent les principales villes du pays et 1800 km en 2015 en desservant le pays du nord au sud, d’est en ouest. Les plans d’électrification et d’adduction en eau potable sont passés de 50% à plus de 90% actuellement. Ces chiffres sont facilement vérifiables sur le net. Le pays est doté d’un cape et d’une vision 2020 et de plans sectoriels en cours de réalisation dans les infrastructures, l’industrie, l’agriculture, l’énergie avec le plan solaire et le tourisme.

Sur le plan politique, les réformes constitutionnelles initiés par le Roi qui étaient regardés avec scepticisme et présentées de manière caricaturale comme des « réformes en trompe l’œil » sont des avancées notables sur le chemin de la démocratisation du pays. J’ai eu largement le temps de le démontrer dans d’autres articles sur ce site. Aucune trace de ces réalisations dans les écris de ces journalistes dit indépendants.

Un large chemin est encore à parcourir car des insuffisances subsistent. Je ne vais pas en faire un état exhaustif mais citer les plus importantes à mon sens et qui concernent, la justice, l’enseignement, la corruption mais surtout les maux dont souffre le monde politique, incapable notamment d’être en phase avec les dispositions avancées de la nouvelle constitution. Car la résorption de ces insuffisances conditionne à mon sens l’atténuation ou la disparition de toutes les autres, notamment les précarités dont souffrent de larges couches de la population du pays.

Montrer et expliciter les insuffisances et les maux qui gangrènent le monde politique et la société marocaine mais aussi pointer et mettre en exergue les avancées du pays. C’est le crédo d’un journaliste dit indépendant ou un journaliste tout cours. Ni Candide de Voltaire « Tout est bien dans le meilleur des monde » d’une certaine presse qui utilise un langage ou écris de bois intolérable et qui applaudit à tous vents, ni ceux qui désespèrent de ce pays.

NB : cet article publié sur mon blogue a été repris sur le site d’information marocain lemag.ma.


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