Ouganda : un projet de loi pourrait rendre les homosexuels passibles de la peine de mort
par Giuseppe di Bella di Santa Sofia
mardi 13 novembre 2012
L'homosexualité est considérée comme un sujet tabou en Ouganda, comme dans de nombreux pays africains. La population LGBT y est estimée à 500 000 personnes. Elle est victime de nombreuses violences, parfois extrêmes, et de menaces de la part des autorités policières.
Rebecca Kadaga, présidente du Parlement ougandais, vient d’annoncer qu’un projet de loi de 2009 qui rendrait passibles les homosexuels de la peine de mort serait voté dans les semaines qui viennent. La loi pourrait entrer en vigueur et être appliquée avant la fin de l’année. En Ouganda, il est déjà illégal pour des homosexuels d'avoir des relations sexuelles. La sentence maximale pour avoir eu de telles relations est la prison à vie, selon le code pénal de 1950.
Cette loi va étendre la criminalisation de l'homosexualité et créer deux catégories : l'homosexualité aggravée et le délit d'homosexualité.
L'homosexualité aggravée est caractérisée par des actes homosexuels commis par des parents, des personnalités, des personnes HIV positives, des pédophiles ou des récidivistes. Si ceux-ci sont jugés, ils seront passible de la peine de mort. Le délit d'homosexualité inclut des actes sexuels entre personnes du même genre, ou une relation entre deux personnes du même sexe, ces délits seront passibles d'une peine de prison à perpétuité.
En outre, une sanction de 3 années d’emprisonnement est prévue pour toute personne qui ne rapporterait pas à la connaissance de la police des faits d'homosexualité dans les 24 heures. Toute personne impliquée dans la défense des droits des gays et des lesbiennes risquera une peine de 7 années d'emprisonnement.
Cette proposition de loi avait suscité un tollé général, au niveau de la communauté internationale, en 2009, et avait été temporairement reportée. De nombreux pays avaient menacé de mettre fin aux aides financières accordées à l’Ouganda. Le 4 février 2010, le président des États-Unis, Barack Obama, avait qualifié ce projet de loi d'« odieux », en précisant : « il est impensable de viser des homosexuels et des lesbiennes pour ce qu'ils sont. »
Rebecca Kadaga a déclaré qu'il s'agit d'un « cadeau de Noël pour le peuple ougandais » car, selon elle, « les homosexuels représentent une menace. » Elle a également invité tous les pays africains à suivre l’exemple.
Le mois dernier, lors de son discours devant la 127ème assemblée de l’Union interparlementaire qui se déroulait au Canada, la présidente du Parlement ougandais avait déclaré : « Je vais demander au président de la commission des affaires juridiques et parlementaires de porter le rapport sur le projet de loi contre l'homosexualité, afin que nous puissions l'examiner », provocant l’indignation du ministre canadien des Affaires étrangères. Elle avait répondu : « Si l'homosexualité est une valeur pour la population canadienne, elle ne devrait pas chercher à forcer l'Ouganda à partager son point de vue. Nous ne sommes pas une colonie ou un protectorat du Canada. » A son retour dans son pays, elle a déclaré que les délégués de plusieurs autres Etats étaient satisfaits de sa déclaration, mais avaient peur d’aborder le sujet ou de la soutenir officiellement. « Je ne savais pas que je parlais pour le monde entier, l'Afrique, le monde arabe, l’Amérique latine et plusieurs pays occidentaux. De nombreux délégués m'ont dit qu'ils n'avaient pas le courage de répondre aux attaques du ministre canadien des Affaires étrangères et que j’avais parlé pour eux » a-t-elle prétendu, tout en ajoutant : « Je n'accepterai pas d'être intimidée ou dirigée par un gouvernement dans le monde. Si le prix de l'aide est d'accepter l'homosexualité, on peut rejeter l'aide. »
A l'heure où les personnes LGBT se réjouissent de l'ouverture au mariage et de l'adoption pour les couples de même sexe, prévue pour 2013 en France, elles devraient également porter un regard au-delà des frontières de l'hexagone. C’est également un sujet qui mérite une large mobilisation de leur part.