Pinochet inculpé pour assassinat et tortures à la Villa Grimaldi

par François Vescia
lundi 30 octobre 2006

Y aurait-il une morale dans l’histoire ? Les nouvelles d’Amérique latine incitent à le croire et redonnent leur dignité aux populations longtemps bafouées. Rappelez-vous, cela a commencé un ... 11 septembre.

Des avions soigneusement coordonnés avaient bombardé ce matin-là plusieurs immeubles, dont le plus prestigieux de cette ville d’Amérique. Ce jour-là, l’orchestrateur de ces violences et des milliers de morts de ces journées avait le soutien actif du gouvernement américain et de la CIA. Ses maîtres d’œuvre, Henry Kissinger et Richard Nixon, avaient plongé pour quinze ans le pays dans l’obscurité, la souffrance et la dictature. Le président bombardé dans le palais présidentiel avait pour nom Salvador Allende, élu trois années auparavant au suffrage universel.
Le terroriste sortait des écoles militaires encadrées par les Etats-Unis et s’appelait Augusto Pinochet. C’était le 11 septembre 1973. Il n’y avait pas eu de minute de silence pour les victimes innocentes de ce coup d’Etat.

Des rescapés de l’Algérie française avaient ensuite contribué à la mise en place du plan Condor, campagne d’assassinats coordonnée par les polices secrètes des dictatures du Chili, de l’Argentine, de la Bolivie, du Brésil, du Paraguay et de l’Uruguay au milieu des années 1970.

Dans la banlieue de Santiago, tout près d’un couvent de religieuses, l’armée de l’air emmenait de force les opposants de 1974 à 1978 à la Villa Grimaldi. Certains y restèrent des mois, parfois des années, sans que leurs familles n’en sachent rien. Des tortures, les cachots venaient à bout de certains. Ceux-là avaient quelque chose que leurs bourreaux ne pouvaient leur ravir, il s’agissait d’information, de dignité, de force morale, d’engagement auprès des plus faibles, de leur courage (témoignage de Gladis Diaz, survivante).

Après la chute de la dictature, les associations d’anciens prisonniers se sont mobilisées, ces dernières années, pour en faire un lieu de mémoire, mais aussi lieu de vie qui accueille les familles, les amoureux et les voisins.

La Villa Grimaldi, par laquelle sont passées 3000 personnes, dont la nouvelle présidente du Chili, Michelle Bachelet, et sa mère, est devenue un lieu de visite, le "parc de la paix et de la villa Grimaldi". Un mur présente avec beaucoup de sobriété le nom de 229 opposants identifiés qui ne sont pas ressortis vivants de ce quartier si tranquille adossé à la cordillère des Andes.

Des céramiques au sol indiquent la place des anciennes salles de torture et proclament : "Nunca mas en Chile, se repita la tortura", Plus jamais au Chili ne se répétera la torture.

De son côté, la justice du Chili, après celles d’Espagne et de Grande-Bretagne, et au terme de beaucoup de tergiversations, a vaincu petit à petit tous les obstacles que le dictateur avait placés pour garantir son impunité. Après huit années de procédures sont revenues à la surface comme un boomerang ses actions militaro-terroristes.

Vendredi 27 octobre 2006, le juge chilien Alejandro Solis a mis en cause Pinochet, impliqué dans 36 cas de disparitions, 23 cas de torture et un assassinat à la Villa Grimaldi.

Ironie du sort, une nouvelle loi étatsunienne conçue pour poursuivre les terroristes a permis de faire ouvrir les comptes bancaires du vieux dictateur, et d’apporter la preuve de ses détournements d’argent. Il s’agit du Patriot Act, passé en force par l’administration Bush après un certain... 11 septembre (2001).

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