Poutine a gagné la guerre de la communication

par NICOPOL
vendredi 3 juin 2022

"Poutine a perdu la guerre de la communication" : voilà quelle était la ligne éditoriale triomphaliste des médias occidentaux depuis le début du conflit en Ukraine. Une "humiliation" militaire face à l'héroïque armée de défense ukrainienne, c'est entendu ; un "effondrement" économique et monétaire sous les sanctions des USA et de l'UE, cela va de soi ; mais ce qui mettait le plus en joie les fervents supporters de la cause atlantiste et mondialiste, c'était bien la défaite de la Russie dans la "guerre cognitive" menée par l'Occident (pour reprendre le concept de l'OTAN). Une défaite de Poutine ? Mais aujourd'hui, en est-on vraiment sûr ?

Tout d'abord, une précision qui a de l'importance : dire que la Russie a "perdu la bataille" de la communication n'était pas faux ; mais ce n'était vrai que très localement, et très provisoirement.

Provisoirement, on va le voir dans cet article.

Localement, car en dehors des pays occidentaux, dans lesquels la campagne de presse anti-russe a atteint des sommets d'unanimité et de véhémence, le ton est resté beaucoup plus modéré et équilibré dans le reste du monde : si condamnation il y a eu de l'entrée de troupes russes régulières sur le territoire ukrainien, les analystes des pays d'Amérique Latine, d'Afrique ou d'Asie (et même du Vatican !) n'ont pas oublié de rappeler que l' "opération spéciale" du Kremlin était avant tout une "réaction" à la politique de provocation permanente des Etats-Unis et des pays de l'Union Européenne depuis la chute de l'URSS ("Mais pourquoi les Russes ont-ils installé leur pays au mileu des bases de l'OTAN ?", telle est la fameuse blague remise au goût du jour par les prétentions de l'Ukraine et, désormais, de la Suède et de la Finlande). 

De façon incidente, rappelons aussi qu'en Occident la "guerre de la communication" n'a tout simplement pas eu lieu, puisque, dès le déclenchement des hostilités, la Commission Européenne a préventivement interdit les organes de communication (Russian Today, Sputnik...) qui auraient pu exposer la "vision russe" de ce qui se passait. La "communication" russe a donc été purement et simplement censurée par une autorité technocratique non-élue et, qui plus est, non-partie prenante dans le conflit - ce qui est, à ma connaissance, du jamais vu en terme de "propagande de guerre".

Quoi qu'il en soit, et en gardant en tête les réserves ci-dessus, on peut dire que l'argumentaire de la presse corporate occidentale à propos de cette défaite supposée de la Russie dans le champ médiatique tournait en gros autour des 3 affirmations suivantes :

  1. Sur le terrain, l'armée russe se ridiculise
  2. Les troupes russes pratiquent une politique systématique d' "atrocités" justifiant la condamnation morale unanime et sans réserve de la "communauté internationale"
  3. En Russie même, la population rejette le "régime" de Poutine et aspire à rejoindre le camp occidental et ses belles valeurs de "démocratie" et de "liberté"

Or, sur chacune de ces 3 affirmations péremptoires, on peut dire aujourd'hui que le vent a nettement tourné.

Sur le front des opérations militaires

En ce qui concerne la couverture de la situation militaire, la ligne éditoriale des médias corporate occidentaux est en train de connaître un revirement spectaculaire et assez clownesque, puisqu'après des mois de communiqués triomphants sur le "fiasco" de l'opération russe, on apprend tout à coup qu'en fait non, Poutine est à deux doigts de vaincre dans le Donbass ce qui reste de l'armée ukrainienne ! Résultat : de plus en plus d'Occidentaux (à commencer par le "vieux sage" Kissinger) appellent à un "cesser-le-feu", à "négocier la paix" avec Poutine, quitte à forcer l'Ukraine à "faire des concessions territoriales"...

Pour s'en convaincre, il suffit de lire les gros titres de plus en plus embarrassés du New-York Time ou du Washington Post. Je me contenterai quant à moi, pour le plaisir, de traduire l'historique des éditoriaux du Daily Telegraph depuis 3 mois (merci à Chanteclerc d'avoir partagé sous mon précédent article le lien vers cette liste tout à fait désopilante) :

Je crois que cette liste n'appelle pas plus de commentaire...

Sur le front des "atrocités"

Alors là, on en a eu pour notre argent : "une campagne systématique et coordonnée de violence sexuelle", le viol "utilisé par la Russie comme une arme dans son arsenal" pour "lancer une campagne de terreur", des esclaves sexuels soumis à des "tournantes en gang-bang" dans des caves sordides, des" crimes sexuels commis de façon non-naturelle", des "viols de grands-mères", des "mutilations sexuelles d'enfant", un petit garçon de 11 ans "violé devant sa propre mère attachée sur une chaise", des enfants violés "tout en leur faisant manger des chiens errants auparavant nourris avec des cadavres de soldats russes" (non non, ce n'est pas une blague, ça nous a vraiment été présenté comme une "news" parfaitement sérieuse)...

Toutes ces histoires abominables sont rapidement devenues virales sur le Web, souvent reprises par des organes de presse officiels sans aucune pincette ni précaution... Avec à chaque fois la même conclusion : "les Russes ne sont que des animaux" (je vous renvoie à mon article précédent sur cette figure archétypale du "Slave sous-humain" ou de l' "Untermensch" tout juste bon à être réduit en esclavage ou génocider pour faire de la place aux "races supérieures" nordiques et anglo-saxonnes).

Le petit soucis, c'est que, lorque des journalistes et des ONG ont voulu investiguer ces crimes barbares, retrouver les victimes, interroger des témoins... rien, quedalle, nada, нечего. Alors ils sont allés se renseigner auprès de la source officielle ukrainienne qui alimentaient ainsi les correspondants occidentaux en anecdotes croustillantes, une certaine Lyudmyla Denisova, "Médiatrice ukrainienne des Droits de l'Homme" et "Commissaire des Droits de l'Homme" auprès du Parlement ukrainien. Mais il s'est avéré, après vérification, que cette sympathique bureaucrate n'avait pas le début du commencement d'une preuve pour soutenir les allégations choquantes qu'elles "rapportaient" régulièrement à la presse occidentale...

Résultat : la chère Lyudmyla a été purement et simplement virée de son poste par le Parlement ukrainien !

Oui, parfaitement : le Parlement ukrainien, peu susceptible de sympathie à la cause poutinienne, a viré son propre Commissaire aux Droits de l'Homme devant l'étalage de ses fake news systématiques. Ses exagérations, ses affabulations, ses mensonges mythomaniaques, ont été jugés in fine contre-productifs et desservant la "cause" ukrainienne ! C'est ce qu'on appelle un retournement de situation spectaculaire : la "victoire" communicationnelle supposée de l'Occident autour des "atrocités" russes n'était qu'une farce reposant sur du vent, et tout est en train de s'effondrer joyeusement...  

L'impact en termes de relations publiques est absolument désastreux et dévastateur pour le camp atlantiste. Et l'effet d'une telle nouvelle sur l'opinion internationale est catastrophique : "Comment ? Pour ça AUSSI, ils nous mentaient depuis le début" ? Le résultat c'est que plus personne, à part Joe Biden et quelques éditocrates hallucinés, ne croira désormais l'information relayée par les Occidentaux. Cela ne veut pas dire qu'on croira davantage l'information provenant du camp russe ; mais on fera comme tout bon pyrrhoniste : devant l'impossibilité de savoir vraiment ce qui se passe là-bas, on suspendra gentiment son jugement en attendant que la poussière retombe... Et rien que ça, c'est une défaite cuissante des Occidentaux dans la guerre de communication.

Alors biiiiiiieeeeeen entendu, je ne suis pas naïf ni idéaliste : des atrocités, il y en a peut-être, et même probablement eu de la part de certains soldats russes. La guerre est une horreur, elle révèle parfois ce qu'il y a de meilleur en l'homme mais le plus souvent ce qu'il y a de pire. Les soldats qui, par vice ou sous la pression des évènements, se sont rendus coupables d'exactions, devront être jugés et condamnés dans les règles par la justice militaire. Mais alors, qu'on ne nous fasse pas croire qu'en face les soldats ukrainiens sont tous des Saints ou des Preux chevaliers (sans même parler des néonazis des Bataillons Azov). Et qu'on se rappelle que des "atrocités", toutes les armées du monde en ont commise en opération, à commencer par les Américains au Vietnam, en Irak ou en Afghanistan, et bien entendu la France, en Algérie ou en Afrique. Dire cela est d'une parfaite (et triste) évidence, et l'utiliser comme "arme de communication" comme si ce n'était l'apanage que d'un seul camp, et toujours le même, est bien entendu ridicule (et donc, désormais, contre-productif).

Sur le front des aspirations de la population russe

Là aussi, on peut dire que c'est la Bérézina pour le camp pro-occidental. L'actualité récente n'est en effet pas tendre avec ceux qui essayent encore de nous faire croire que la jeunesse du monde entier ne rève que d'une chose, "vivre à l'américaine" ou "à l'européenne".

Aux Etats-Unis, une horrible tuerie de masse dans une école primaire au Texas vient de faire 21 morts, dont 19 enfants. 19 enfants ! Mon dieu... Depuis le début de l'année, c'est la 214ième "fusillade de masse" aux Etats-Unis. 214ième !! "Depuis le début de l'année, 214 tueries de masse ont eu lieu aux États-Unis, selon des données publiées vendredi par Gun Violence Archive", rapporte ainsi BFM TV : "au total, plus de 17.300 personnes ont été tuées durant cette période". 17 300 personnes ! Et c'est BFM TV qui le dit, pas Russian Today, Thierry Meyssan ou Lyudmyla Denisova (lol) !

A peine le temps d'écrire ceci et on en est déjà à 215 avec une nouvelle tuerie dans un hôpital de l'Oklahoma qui laisse 5 morts sur le carreau. 215 tueries en 5 mois, ça fait presque 1,5 par jour ! Et c'est ça le "rêve américain" qu'on pense encore pouvoir vendre au reste du monde ? La violence sociale, raciale, l'obésité, la queue aux soupes populaires, les vieux qu'on laisse crever dans leurs merdes dans les EHPAD, le wokisme, la promotion de la transexualité dans les écoles, les hommes "transgenres" qui gagnent des compétitions sportives féminines... Et les Occidentaux s'imaginent encore qu'en Amérique latine, en Afrique noire, dans les pays arabes, en Asie hindouiste, bouddhiste, ou confucianiste, et a fortiori en Russie orthodoxe, tout ça fait envie ? 

Quant à la France... Le désastre absolu de la finale de la Champion League au Stade de France samedi soir dernier constitue un camouflet, un ridicule sans fond pour le pouvoir macroniste, l'exposition médiatique au monde entier de la violence endémique des "quartiers populaires", de l'incapacité des forces de l'ordre à protéger la population et les touristes contre le détroussage en règles par des "racailles de cité" hurlant leur "haine" de la France, et surtout le mensonge permanent de nos autorités, insupportable, de plus en plus grotesque. Darmanin parlaient ainsi de "30 à 40 000 spectateurs anglais sans billets", la FFF et l'UEFA viennent de donner quant à elles le chiffre de 2 800 "faux billets scannés" (et encore, explique Le Parisien, "parmi ces 2800 faux billets, peuvent figurer des vrais billets ayant été mal activés"). Un véritable mensonge d'Etat par lequel Macron et sa clique, que ce soit pour des raisons idéologiques ou bassement électoralistes, assument préférer un incident diplomatique avec la Grande-Bretagne et se couvrir de ridicule dans le monde entier plutôt que d'admettre qu'il y a un vrai problème d'immigration et de rejet de la France dans les cités... Mais un mensonge qui ne trompe plus personne et montre bien que "le Roi est nu", et que la Macronie n'est plus désormais qu'un vulgaire Village Potemkine.

Le camouflet est encore plus cinglant pour Macron lorsqu'on se rappelle du succès de la dernière coupe du monde en Russie, au cours de laquelle les Russes ont pu démontrer au monde entier qu'ils étaient parfaitement civilisés, accueillants, ouverts sur le monde, mais aussi parfaitement capables d'être sérieux et professionnels dans ce qu'ils entreprennent ("une vitrine pour Poutine", se lamentait la presse occidentale à l'époque). Des Russes qui peuvent bien rire de Macron aujourd'hui en lui rappelant que chez eux "la finale aurait été parfaitement organisée"..

Au-delà ce cette actualité tragi-comique, que promet-on comme réjouissances aux populations occidentales pour les prochaines années ? Inflation galopante et baisse dramatique du pouvoir d'achat, explosion du prix du gaz, de l'essence, de l'électricité, augmentation de la violence et des "incivilités", effondrement du niveau scolaire, fermeture en cascade des services d'urgence, des maternités, de ce qu'il reste de services publics en dehors des centres urbains... "Vous ne posséderez plus rien", "vous ne voyagerez plus", "vous ne pourrez plus vous chauffer l'hiver", "vous mangerez des insectes", voilà le beau projet que les élites de Davos nous ont conconcté pour les prochaines décennies.

Vous pensez que ça fait rêver la population russe tout ça, lorsqu'elle voit à la télé ou lit dans les journaux et sur les réseaux sociaux ce qui se passe chez nous ? Elle qui vit dans un pays unis, en paix, sécurisé, rétabli économiquement après la désastreuse parenthèse de Boris Elstine et de ses "Chicago Boys" ("vous êtes ruinés, mais vous êtes LIBRES !)... Elle qui soutient son dirigeant à plus de 80% (de quoi faire palir de jalousie Macron et Biden)... Seriously ? Alors oui, la bataille de la communication, sur le terrain "civilisationnel", on peut dire que l'Occident l'a bel et bien perdu, et sans doute définitivement....

Et sur AgoraVox ?

Terminons par une petite pirouette : mon récent article "Guerre en Ukraine : pour le Salut du Peuple russe (et de la France)" est resté une semaine en "#1 des Tendances", a recueilli plus de 1 200 réactions et bénéficie d'une moyenne d'avis de 4 étoiles sur 5. Cet article, qui proposait très modestement d'exposer la "vision russe" de la situation, a donc suscité un très vif et long débat, avec une majorité de lecteurs et de commentateurs (je parle en nombre d'Agoravoxiens, pas de messages postés, vu l'important trollage des anti-Poutine) pour considérer cet article non pas forcément comme parfaitement convainquant, mais au moins comme digne d'être pris en considération dans l'appréciation des évènements.

Le camp que je me suis senti obligé de défendre au travers de cet article et des débats animés qui s'en sont suivis aurait certes subit une "défaite cognitive" si ledit article avait sucité l'opprobe générale de la communauté des lecteurs d'Agoravox, ou bien avait sombré rapidement dans l'anonymat et l'indifférence d'un bas de page à 10 commentaires, ou bien, encore pire, n'avait même pas franchi l'étape de la modération. Mais ce n'est bien sûr pas du tout ce qui s'est passé, et je peux donc triomphalement (et de manière un peu taquine) conclure ma démonstration en affirmant que même sur AgoraVox, Poutine a gagné la guerre de la communication" !

 


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