Qu’en est-il du SIDA en Afrique ?

par actu
lundi 15 juin 2009

Le SIDA fait encore et toujours des ravages...

 En quelques années, l’infection par le VIH et le SIDA est devenue une des causes majeures de décès à travers le monde, et constitue aujourd’hui, dans de nombreux pays, la première cause de mortalité des jeunes adultes.

 Cette évolution rapide pose la question de l’impact démographique du SIDA déjà à l’heure actuelle et encore plus à moyen et long terme. 

 En France, il est assez facile de connaître l’impact démographique de l’épidémie et de prévoir son évolution à moyen terme car on dispose d’un bon enregistrement des cas de SIDA

 Mais la situation est radicalement différente en Afrique, le continent actuellement le plus touché par l’épidémie. Du fait du faible engagement de L’ETAT civilde l’enregistrement défectueux des causes de décès et du caractère très parcellaire d’étude de santé, on ne dispose que de très peu d’éléments pour évaluer l’impact démographique du SIDA.

Le VIH jusqu’à maintenant :

Comment définir cette maladie ?

Le SIDA c’est un syndrome d’immunodéficience acquise, qui est le stade ultime de l’infection, causée par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui réduit progressivement la capacité de l’organisme à se protéger contre les infections .

 Un sujet infecté par le VIH peut sembler et se sentir en bonne santé pendant une période pouvant aller jusqu’à 10 ans et plus, avant de voir apparaître les premiers signes du SIDA. Cependant le VIH affaiblit progressivement le système immunitaire de l’organisme qui perd peu à peu sa capacité de résistance aux infections telles que la pneumonie, la diarrhée, les tumeurs et autres maladies. Dans l’incapacité de se défendre, la plupart des personnes infectées meurent dans les 3 années suivant l’apparition des 1ères manifestations du SIDA.

 Le SIDA est essentiellement une maladie à transmission sexuelle. La majorité des infections par VIH ont été transmises par des rapports sexuels non protégés avec une personne déjà contaminée. La transmission du VIH peut également se produire par l’intermédiaire du sang, de produits sanguins déjà infectés, ou par l’usage de seringues contaminées. Il peut aussi être transmis d’une mère infectée à son bébé, avant la naissance, pendant l’accouchement, ou par l’allaitement.

 Quelles sont les causes de transmission du SIDA en Afrique :

  D’abord, il y a un manque cruel de prévention lié à la faiblesse des pouvoirs publics mais aussi de l’importance des cultures et religions qui sont majoritairement hostiles au port du préservatif (même si la religion musulmane ne l’interdit pas). Les populations et surtout celles rurales ignorent le mode de contamination du virus, ainsi que l’importance du préservatif pour éviter la contamination. Et ajouté à cela, il est très difficile de se procurer des préservatifs, la distribution n’est ni nationale ni du ressort des pouvoirs publics mais surtout d’ONG (Organisation Non Gouvernementale).

La population est aussi très attachée aux coutumes et traditions. Par exemple il y a certaines règles traditionnelles qui permettent aux veuves d’avoir accès à la terre, malgré le décès de leur mari (alors que la procédure normale exige qu’elle perde tous leurs biens). C’est la règle du LEVIRAT, coutume qui oblige le frère du mari décédé, à épouser sa belle-sœur, pour qu’elle conserve ses terres.

 Cependant, beaucoup d’initiatives tendent à vouloir supprimer cette pratique, ce qui conduit la veuve qui ne possède plus rien, pour survivre, à se prostituer et ainsi cela facilite l’expansion du SIDA.

On peut donc dire que, tout comme le début de la découverte du SIDA en Occident , la principale cause des contaminations est due à un manque d’information, à des théories culturelles ou religieuses qui sont en contradiction avec les principes de protection, et on peut ajouter dans le cas de l’Afrique un taux d’analphabètes qui accroît d’autant plus la probabilité à ignorer le mode de contamination  du virus.

De plus, la pauvreté accroît la vulnérabilité au virus du SIDA. L’apparition et la progression de la malade sont retardées chez les sujets porteurs bien nourris. Les familles n’ayant pas une alimentation suffisante sont plus exposées car la malnutrition est étroitement liée au mauvais état de santé qui rend à son tour, un sujet plus vulnérable et peut raccourcir la période d’incubation du virus, les symptômes apparaîtront plus tôt. La situation est encore pire, car ce sont eux qui n’ont ni les moyens de se soigner ni d’acheter des médicaments.Enfin, celui qui souffre chaque jours pour survivre, aura moins d’attention à une maladie qui peut le tuer dans 10 ans, puisque ce qui le préoccupe d’abord c’est essayer de tenir au quotidien.

Les Chiffres actuels de l’épidémie :

34 à 46 millions de personnes dans le monde sont porteuses du virus du SIDA. Pour la seule année de 2003, plus de 3 millions de malades sont morts. Cette même année, l’Afrique dont la population ne représente que11% de la population mondiale, abritait les 2/3 (66,6%) de tous les patients atteints du virus dans le monde. (chifre ONUSIDA)

Aujourd’hui 1 africain sur 12 est porteur du virus et/ ou malade. L’impact de la maladie ne se mesure pas qu’en nombre de morts. Les conséquences sociales sont également majeures.

Le SIDA réduit à néant les efforts faits pour permettre l’émancipation des femmes ainsi que les maigres avancées en termes d’éducation ...

 Aussi l’impact de la prise en charge sanitaire des populations est considérable. Aujourd’hui 80% des malades hospitalisés dans les hôpitaux publics sont séropositifs. La progression démographique de l’Afrique est stoppée. La mortalité périnatale a regrimpé en flèche. L’espérance de vie a chuté à 49 ans dans les pays d’Afrique Australe alors qu’elle est de 78 ans dans les pays occidentaux.

Dans l’ensemble du monde, les personnes âgées entre 20 et 40 ans sont les plus touchées. C’est à dire que les forces vives, moteurs économiques des pays africains sont manquantes. 10 millions des jeunes entre 15 et 24 ans sont atteints du SIDA et 3 millions des - de 15 ans.

Quelles sont les Incidence sur les indicateurs économiques et sur la croissance ?

La croissance économique d’un pays est habituellement corrélée à l’espérance de vie. On considère que 0,5% de croissance économique est gagné pour cinq ans d’espérance de vie supplémentaires. Avec une espérance de vie de 49 ans, la croissance économique de l’Afrique se trouve gravement hypothéquée. Les dépenses en infrastructures, en personnel et en formation que nécessite le SIDA réduisent considérablement le développement économique du pays déjà bien mal parti.

Il est très difficile de chiffrer précisément les conséquences économiques d’une maladie donnée sur le développement d’une région. Le SIDA coûterait entre 11,7% et 35,1% du PIB annuel selon ONUSIDA.

Le SIDA, bien qu’on ne puisse le chiffrer véritablement a et aura un impact considérable sur l’agriculture, la production industrielle, la sécurité alimentaire et des conséquences sociales : ◊ Destruction des familles et des structures sociales, des millions d’orphelins livrés à eux même, (il est prévu 41 millionsd’orphelins en Afrique d’ici à 2010). Pour les plus pessimistes, les économies africaines vont « imploser sous l’effet du SIDA »

 Concernant l’agriculture, le SIDA déstabilise les systèmes agricoles et affecte la situation nutritionnelle et la sécurité alimentaire des familles rurales. Lorsque des adultes tombent malades et meurent, leur famille doit faire face à une baisse de productivité et perd des connaissances sur les méthodes d’exploitations. La FAO (Food And Organization of the United Nations), a estimé que dans les 25 pays africains les plus touchés, le SIDA a provoqué la mort de 7 millions de travailleurs depuis 1985. Il pourrait en tuer 16 autres millions au cours des vingt prochaines années. 

Les familles auront de la main d’œuvre en moins, des frais médicaux et des frais d’obsèques qui pourront facilement les ruiner.

Les Incidence Macro-économique :

Toutes les différentes approches macro-économiques donnent une vision dramatique des conséquences du virus ;

- L’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé) a publié en 2000 une estimation selon laquelle un pays comptant plus de 20% de séropositifs dans sa population, subit une baisse annuelle de son PIB de 1%.

- Selon l’ONUSIDA (Programme commun des Nation sur le VIH/SIDA), la baisse est estimée à 2,6%

- La Banque Mondiale prévoit que le PIB de l’Afrique du Sud, sera en 2010, 17% plus bas qu’il l’aurait été sans le SIDA.

- Certains auteurs pensent que l’épidémie n’est qu’à son début et que le pire reste à venir : (désagrégation des structures familiales, travail des enfants, abandon des politiques d’éducation.)

Cela est grave aussi au niveau Micro-économique :

 Et notamment dans cinq domaines pour l’entreprise :

*la main d’œuvre

*la clientèle

*le coût capitalistique (il est difficile de remplacer la main d’œuvre qualifiée)

*l’image de marque de la société

*l’environnement du marché dans lequel il opère.

L’Impact sur la main d’œuvre :

   En Afrique sub-saharienne, 4 pays verront une diminution de leur main d’œuvre de plus de 30% en 2020 par rapport à ce qu’elle aurait été sans l’épidémie.

14 pays auront une diminution entre 10% et 30%. En Afrique australe, la main d’œuvre la plus touchée est celle des ouvriers non ou peu qualifiés. Bien que le réservoir de main d’œuvre non qualifiée semble inépuisable, la conjonction de la misère, d’une absence de formation et d’une forte prévalence de séropositivitérend l’avenir du marché de la main d’œuvre plutôt sombre, défavorable au développement des entreprises et de leur marché.

A contrario, les coûts sont d’autant plus importants que la main d’œuvre touchée est qualifiée. Au début, les plus touchées sont ceux qui ont les moyens de voyager et d’entretenir plusieurs liaisons sexuelles. Il s’agit des classes économiquement dirigeantes. Au fur et à mesure que l’épidémie progresse, le niveau social et la qualification des malades tendent à se réguler et les pauvres et les moins formés deviennent les plus nombreux pour des raisons démographiques évidentes.

Les entreprises pourraient alors être tentées de n’employer que les ouvriers dont la séronégativité est prouvée. Cette discrimination est illégale mais dans un marché du travail où le chômage est la règle, des garde-fous devraient être mise en place augmentant encore le coût du travail.

Quel est l’ impact démographique :

Une pyramide des âges sectionnée :

L’épidémie frappe principalement les jeunes : Un grand nombre sont contaminés dès leur adolescence ou au début de leur vie d’adulte. Les jeunes filles sont, par rapport aux garçons, infectées plus tôt et en plus grand nombre, principalement dû au fait qu’elles entretiennent des relations sexuelles non protégées avec des partenaires plus âgés.

 Selon l’UNICEF, une jeune femme sur trois âgée de 15 à 24 ans est atteinte par le SIDA au Botswana, contre un jeune homme sur sept. Localement les chiffres peuvent être encore plus terrifiants.

A Carletoville, en Afrique du Sud, six femmes sur dix entre 20 et 25 ans ont le SIDA.

Ce sont donc des jeunes adultes qu’emporte l’épidémie : contaminés majoritairement au cours de la vingtaine, les malades du SIDA décèdent effectivement une dizaine d’années plus tard environ, c’est à dire la période la plus productive de la vie, celle aussi où ils ont la charge de leur famille, parents, enfants.

 Selon l’ONUSIDA, le VIH pourrait emporter 1/3 au moins des jeunes hommes et femmes dans les pays ou il sévit le plus durement (Ethiopie, Ouganda...), jusqu’à 2/3 dans certains endroits. Or de tels taux de mortalité chez les jeunes adultes relèvent « du jamais vu dans l’histoire, même après des millénaires d’épidémies, de guerres et de famines » Dans vingt ans, au Botswana, il y aura ainsi plus de sexagénaires et de septénaires que d’adultes dans la quarantaine et la cinquantaine, annonce le Bureau de recensement Américain.

La natalité notamment, devrait considérablement diminuer ces prochaines années du fait du décès prématuré d’un grand nombre de femmes. Une étude réalisée au Zimbabwe a démontré que la probabilité pour une jeune fille de quinze ans de mourir avant la fin de sa période de reproduction avait quadruplé passant de 11% en 1990 à plus de 40% en 2000. Selon le Bureau de recensement Américain, on prévoit en 2020, au Botswana, que le SIDA sera responsable d’une diminution de 50% du nombre de naissances.

On estime, en outre, qu’1/3 des nourrissons nés de femmes séropositives sont eux même infectés. Or, selon l’OMS dans les pays les plus touchés, 20 à 45% des femmes enceintes sont séropositives. Le taux dépasse 50% de certaines zones du Zimbabwe. On enregistre une hausse de 25% du nombre de décès chez les enfants dans certains pays.

L’ONUSIDA projette que pour 2010, la mortalité infantile en Afrique du Sud sera 60% supérieure à ce qu’elle aurait été en l’absence de maladie.

C’est déjà près d’un demi-siècle d’avancée que le SIDA est en passe d’anéantir, tout en matière de mortalité infantile que d’espérance de vie. En un peu moins de 20 ans, cette dernière est ainsi passée de 65 à 39 ans au Zimbabwe. Au Malawi, elle n’est plus aujourd’hui que de 37 ans.

Le secteur de l’éducation

Selon les syndicats de l’éducation, le corps enseignant est l’un des plus touché par l’épidémie du SIDA. Le pourcentage dans ce secteur est le plus élevé. On va jusqu’à prédire le risque d’une extermination de la profession en Afrique au cours des dix prochaines années. Selon l’Organisation Internationale de l’Education, 35 à 40% des instituteurs et professeurs du secondaire au Botswana sont infectés par le VIH (idem pour l’Afrique du Sud), (Raison culturelle, abus d’autorité morale...)

Concernant les étudiants, 26% des femmes et 12% des d’étudiants hommes sont infectés en AFS (Afrique du Sud). C’est terrifiant, car ce sont ceux qui ont reçu une éducation supérieure depuis la fin de l’Apartheid, capable de diffuser de nouveaux idéaux, et qui mourront. Beaucoup d’autres abandonnent l’école pour s’occuper des malades de leur entourage, ce qui condamne leur avenir à de petits métiers, de la prostitution ou de la mendicité pour survivre.

Finalement, l’affaiblissement des économies fait en sorte qu’il est de moins en moins possible de financer l’infrastructure éducative et de maintenir le système d’enseignement.

Pour conclure

Il y a dix ans, il n’y avait pas de traitement contre le VIH/sida. Un test positif de dépistage du VIH signifiait une mort certaine et imminente. Aujourd’hui en revanche, les traitements à base d’antirétroviraux capables d’attaquer le virus à l’origine du sida peuvent transformer une condamnation à mort en une condition plus chronique, permettant aux patients de vivre plus longuement et en meilleure santé. Sur le plan technique, la thérapeutique antirétrovirale est réalisable partout dans le monde, le prix des médicaments ayant nettement baissé.

Le représentant du secrétaire général de l’ONU à la conférence sur le sida n’est pas allé par quatre chemins pour dire que les pays développés utilisent des centaines de dollars pour lutter contre le terrorisme et ne se soucient pas du Sida et laissent ainsi les pays pauvres avec ce grand mal qui tend à prendre le dessus. . Ce qui aggrave cette maladie du siècle, c’est que le malade ne détient toujours pas les moyens pour lui permettre de faire face à ce mal.

Les malades du Sud sont obligés de supporter les mauvaises humeurs des firmes pharmaceutiques du Nord qui ne font pas de cadeau à ceux qui sont dans le besoin. 

Il y a tout de même un signe positif en Afrique du Sud où les taux de contamination ont chuté grâce notamment à des campagnes de prévention massives.

La situation en Ouganda est aussi révélatrice de l’action des différentes ONG puisqu’entre 1999 et 2003,l’utilisation des préservatifs chez les femmes de 15 à 24 ans a presque doublé (+ 44%).

19 pays africains ont créé des conseils ou des commissions nationales sur le SIDA, 40 pays ont achevé leur plan stratégique.

 

D.Perrotin

 

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