Quand Fabius redécouvre les vertus du droit international
par Lorenque
mardi 10 septembre 2013
L’issue « potentiellement positive », selon la qualification donnée par Obama à l’initiative de la diplomatie russe, semble rencontrer un intérêt partagé par de nombreux pays impliqués directement ou indirectement dans l’affaire syrienne. La réaction du ministre français des affaires étrangères mérite commentaires.
Par la voix de Laurent Fabius, ministre français des affaires étrangères, la France accueille avec « intérêt et précaution » l’initiative russe, mais pose trois conditions :
1. l’adoption par l’ONU d’une résolution condamnant le massacre du 21 août « commis par le régime de Bachar Al-Assad ».
2. le démantèlement des armes chimiques du régime Bachar Al-Assad.
3. la saisine du Tribunal Pénal International (TPI) pour établir et punir les responsables du massacre.
En voilà, une bonne nouvelle ! La France redécouvre les vertus du droit international après avoir été tentée de rejoindre la rhétorique nord-américaine exprimée sans complexe par Madeleine Albrigt dans les années 90 : « Multilateral if possible, unilateral if necessary » (notre intervention sera "multilatérale si possible, unilatérale si nécessaire"). Cette rhétorique me rappelle une blague que nous évoquons dans notre couple : « Il y a un bon moyen d‘éviter tout conflit entre nous : on va dire que quand on est d’accord, c’est toi qui as raison. Et quand on n’est pas d’accord, c’est moi qui ai raison. »
Le droit international sous responsabilité unique de l’ONU est enfin repris comme référence ultime pour décider des éventuelles sanctions et surtout pour mettre en œuvres des solutions (médiation, interposition) pour régler les conflits internationaux.
Reste le léger problème de la « dénonciation unilatérale » du régime de Bachar Al-Assad comme responsable du massacre. Alors que ce dernier nie toute responsabilité. Personne n’est bien sûr obligé de le croire, mais le droit international, c’est du droit et en droit la présomption d’innocence s’impose pendant le temps de l’instruction et jusqu’au jugement du tribunal.
Reste un autre léger problème : les Etats-Unis ne reconnaissent pas l’autorité du TPI. (cf . leur refus d’accepter le jugement du TPI en 1980 condamnant les Etats-Unis pour leur soutien aux agressions des Contras contre le Nicaragua.)
Quant aux rodomontades du ministre de la défense, Le Drian, qui estime que la pression internationale, notamment des Etats-Unis et de la France, sur le régime syrien « a marché », on peut y adhérer ou préférer croire que la pression des opinions publiques, en France et aux Etats-Unis notamment, ont fortement encourager à prêter une oreille intéressée à l’issue proposée par la Russie.
J’ai la faiblesse de croire que les forces en faveur de la paix ont de l’influence et doivent donc maintenir leur vigilance. C’est, sans doute, le meilleur service que, de là où nous sommes, nous puissions rendre au peuple syrien.